Ce soir, contrairement au concert du Bataclan il y a deux ans, pas question de s’asseoir, cela avait été trop frustrant : un concert de dEUS requiert toute notre mobilité. Ici, au Trianon, salle à la jauge et à l'élégance idéales pour le quintet, tout se passe pour le mieux. Plaisante première partie (leurs compatriotes du groupe Balthazar, inconnus jusqu’alors et très bien accueillis), puis dEUS qui déroule. Sans génie mais sans ennui. Certes la pression retombe sur certains nouveaux morceaux, certes la coda de Instant Street est ce soir complètement foirée, certes la voix de Tom Barman s'avère un peu fatiguée. Mais, comme on s’en doutait, à l’écoute de Keep You Close, un morceau comme Dark Sets In se révèle sans ambigüité taillé pour le live et un If You Don’t Get What You Want explosif réussit instantanément à anéantir mes quelques réserves et à pomper une bonne part de mon énergie. Soyons clairs : sur l’échelle dEUS, un concert moyen demeure un très bon concert.
Mais c’est au rappel que Barman et son gang nous assènent le coup de grâce. On était - mu par une vilaine curiosité - allé voir les setlists des concerts de ces derniers jours et on avait constaté, un peu déçu, que le groupe ne jouait plus certains classiques cités ci-dessus (Fell Off the Floor, Man, Theme From Turnpike, ce genre). Vers 22h30, hier soir, ils ne les jouèrent pas non plus, mais ils firent beaucoup mieux, le genre de truc dont un fan de la première heure n’aurait osé rêvé comme cadeau… Après un Sister Dew apaisant échappé de The Ideal Crash (finalement leur meilleur album d’après moi), c’est aux sommets de son tout premier disque que le groupe se confronte dans un flashback me ramenant en 1996 ou en 1997, je ne sais plus, la première fois que je les vis, à quelques dizaines de mètres de ce Trianon pas encore rénové, à la Cigale. Pas seulement Suds & Soda, donc, dernier titre attendu (et pourtant peu joué ces dernier mois), mais d’abord Worst Case Scenario, puis, divine surprise, Morticiachair où le guitariste Mauro Pawlowski (que je préférais quand même barbu) assure on ne peut mieux en doublure voix de Stef Kamil Carlens (co-architecte en chef, rappelons-le, des deux premiers chef-d'œuvres et parti, on le sait, après l'album In a Bar, Under the Sea). Finir ainsi sur trois titres d’un disque datant de 1994, c’était plus qu’inattendu. C’était sublime et inespéré, le meilleur des scénarios, et ça rattrapait très largement les petits coups de mou d’une setlist convenable mais plus convenue. De ce quart d'heure-là, je ne suis toujours pas revenu...