Bonjour aux artistes
Bonjour aux muet(te)s
Bonjour aux zotres
S'il est un film qui fait parler en ce moment c'est bien celui-ci et pourtant, paradoxalement, il est muet ! L'audace formelle, les louanges quasi unanymes et la présence de Jean Dujardin furent autant de (bonnes) raisons pour affronter le froid du week-end et la faune particulière des Champs Elysées un samedi soir... et chopper la crève ! (et dire qu'il se jouait à 2 pas de chez moi... snif)
Le sujet
Au milieu des années 20, George Valentin est une star adulée du cinéma muet. Quelques années plus tard, sa carrière et sa fortune ne vont pas survivre à l'arrivée du cinéma parlant tandis que de nouvelles gloire apparaissent sur les écrans à l'instar de la belle et pétillante Peppy Miller.
Mon avis
Même si j'ai lu et entendu ici ou là que le film était un peu trop long et lent en raison du rythme spécifique imposé par le muet (1h40 ce n'est pas insurmontable), je n'ai personnellement pas vu le temps passer et à aucun moment je n'ai été tentée de regarder l'heure alors que je peux le faire une demie-douzaine de fois pendant un film d'action. A priori, je n'étais pas la seule happée par le film car la qualité de l'attention du public était palpable (et pas gagnée d'avance un samedi soir dans une salle sur les Champs).
Je n'irais pas jusqu'à dire que The Artist est un chef d'oeuvre mais j'ai beau me creuser les méninges, je ne vois aucun défaut à ce film que je recommande chaudement (même en cette fin octobre frisquette).
Tout y est beau, réussi, juste et enthousiasmant. Il faut tout d'abord louer la beauté formelle de ce film en noir et blanc dont les cadrages et la lumière sont superbes sans ostentation (prends ça dans les dents Wong Kar Wai !).
Ensuite, sans être à proprement parler un film comique et sans jamais tomber dans la mièvrerie, The Artist joue à la perfection sur une palette variée d'émotions et alterne émotion et drôlerie, anecdotes et profondeur, le muet donnant à l'ensemble une dimension poétique et poétique omniprésentes et permettant d'intéressantes métaphores sur la parole, le silence, le sens.
Ainsi, il semble plus qu'évident que le merveilleux petit Jack Russell qui accompagne le héros tout au long du film symbolise "la voix de son maître" slogan et animal fétiche de la marque Pathé Marconi encore dans les mémoires. Le rôle est joué par un certain Uggy qui a reçu la "palm dog" à Cannes cette année. De fait, il ne dépare pas avec le reste du casting !
Quelque soit leur nombre de pattes, tous les acteurs sont excellents et revisitent avec naturel et modernité le rythme et la gestuelle si spécifiques à l'exercice de style qu'est (devenu) un film muet !
Bérénice Béjo est rayonnante et campe une star montante parfaitement légitime, plus vraie que nature. Son dynamisme enthousiaste est communicatif et son sourire illumine tout le film. Quant à Jean Dujardin il est absolument parfait, exactement fait pour ce rôle... ou l'inverse puisque le rôle a été écrit pour lui (Idem pour Béjo-Miller d'ailleurs).
Les seconds rôles, tous américains, sont à l'unisson en termes d'engagement et de justesse. On reconnait au casting des des acteurs tels que James Cromwell (le proprio de Babe le cochon ou JWB Senior pour Oliver Stone selon les références), John Goodman (un des acteurs fétiches des frères Coen) ou encore Malcolm McDowell (Orange mécanique)
Ce film est un délice hors du temps, qui frappe par sa sincérité et sa qualité bien plus que par sa singularité qu'on oublie assez vite au profit de l'oeuvre elle-même : c'est dire si le pari cinématographique est réussi !
Quelques liens
Palm Dog méritée pour Uggy ici
Critique élogieuse là Fiche du film sur allociné et intéressantes anecdotes de tournage
Article sur le cinéma muet sur Wikipedia
Conclusion
Un très bon film, audacieux sans être révolutionnaire, deux prix d'interprétation (humain et canin) mérités !
J'en reste sans voix. Chapeau les artistes !