d'après Maupassant, toujours et encore...

Publié le 24 octobre 2011 par Dubruel

UN BANDIT CORSE

Nous nous promenions

Dans la vallée du Niolo.

-C’est ici, dit

Paulo,

Mon compagnon

Que sont réfugiés tous nos bandits.

Soudain à l’orée d’un bois

Nous apparut un petit calvaire :

Une simple croix

Plantée dans un tas de pierres.

Mon voisin reprit :

-J’ai connu ici

Le plus célèbre des bandits,

Le terrible Sainte-Lucie.

Ses parents étant morts,

Il restait seul avec sa sœur Éléonore.

Comme il était petit, chétif, sans énergie,

Il ne déclara pas

La vendetta

A l’assassin de son père.

Tous ses parents le supplièrent

De se venger. Mais il restait sourd

À leur supplication.

Alors, conformément aux traditions,

Sa sœur lui ôta ses vêtements noirs pour

Qu’au moins

Il ne portât plus le deuil d’un mort non vengé.

Et au lieu de décrocher son fusil

Ou saisir une arme de poing,

Il ne sortit plus de chez lui

N’osant être dévisagé

Par les regards méprisants des voisins.

Or une nuit, l’assassin et son frère

Passèrent

Devant la maison des deux orphelins.

Sainte-Lucie se leva,

Se signa, prit le fusil,

Sortit,

Hurla :

-C’est le moment !

Et il tua l’assassin de son père

À bout portant.

Le frère

Voulant fuir ; Sainte-Lucie

Réarma son fusil

Et le tua aussi.

Le lendemain, il était dans le maquis.

Plus tard, quand il en parlait

Il dira :-J’ai senti qu’il le fallait !

Bien sûr toute sa famille fut capturée

Par les gendarmes. Même son oncle le curé

Soupçonné d’incitation

À la vengeance fut mis en prison.

Savez-vous ce que fit, ce Sainte-Lucie ?

Il tua toute la famille ennemie.

Il massacra six officiers de gendarmerie.

Sainte-Lucie fut le bandit le plus terrible

Qu’on ait pu voir.

J’interrompis :-Quelle coutume horrible

Que celle de la vendetta !

-Que voulez-vous, on fait son devoir !

Le reste n’existe pas.