La critique de Claude :
« Cet instant-là », c’est celui « où pas maintenant se transforme en jamais », c'est-à-dire celui de l’occasion perdue, de l’immense gâchis. La catastrophe qui attend les amants sauve cette histoire, qui, disons la vérité, s’engage sous le signe de la banalité. Nous avons tous lu ou vu quelque chose sur le Berlin du Mur : Kennedy y précipite son jeune héros au milieu d’un décor que nous connaissons tous –et, pour y être passé en 1980 et 84, je peux dire que la réalité était bien pire que les tableaux qu’on en faisait -. Donc les deux cent premières pages paraissent un peu longues.
Mais effectivement, un rebondissement qui n’est même pas inattendu – au contraire, on le redoute depuis longtemps - vient bouleverser ces jeunes vies presque innocentes : un second récit est proposé au lecteur, d’un autre « point de vue » (notion qui nourrit la littérature américaine) ; le livre s’anime, se « corse », passe du rose au noir, et le lecteur est récompensé de sa patience.
Donc c’est un livre qu’on peut lire, si on aime suffisamment l’auteur pour rester indulgent.
Cet instant-là, Roman de Douglas Kennedy, traduit par Bernard Cohen, Belfond, 493 p., 22,50 €