Tout le monde connait le célèbre compositeur et arrangeur Quincy Jones (si ce nom ne vous dit rien je crains que ce blog
ne soit pas fait pour vous). Tout le monde connait également Bill Cosby pour l'émission qu'il animait dans les années 70, le Bill Cosby Show. Rares pourtant sont ceux qui se souviennent que ces 2
personnages influents de la communauté noire américaine ont travaillé ensemble à l'élaboration de cette sitcom devenue culte. Depuis le succès de la série télé "L'espion" réalisée en 1965 (c'est la première fois qu'un noir partage l'affiche dans un
1er rôle avec un acteur blanc), Bill prend de l'assurance et se voit rapidement confier les clefs de sa propre émission. Le grand manitou de l'humour a alors la bonne idée de convier au projet
son ami Quincy Jones en lui permettant d'apporter tout son savoir-faire de producteur éclairé et talentueux. Les sessions d'enregistrements ont lieu de 69 à 71 mais traineront dans les tiroirs
plusieurs décennies durant avant que Concord Records n'ait la bonne idée en 2004 de rééditer quelques-uns des meilleurs morceaux joués à cette époque. Il faut dire que pour cette occasion Quincy Jones n'a pas lésiné sur le choix des musiciens en piochant abondamment dans
son carnet d'adresses déjà bien fourni pour proposer un line-up changeant digne des plus belles formations de jazz. En vrac, Ray Brown ou Carol Kaye à la basse, Eddie Harris ou Ernie Watts au
sax, Joe Sample au Fender Rhodes, Paul Humphrey ou John Guerin à la batterie, Arthur Adams à la guitare, Monty Alexander ou Clare Fisher au piano, tous aux ordres du maestro Quincy qui
s'associera avec Bill pour écrire les différents titres.Composé de 10 plages sans faute ainsi que d'un remix du titre phare "Hikky-Burr" qui clôture l'album (remix au passage
sans intérêt), ce disque alterne en douceur entre jazz funky et cool jazz avec un soin du groove omniprésent et une grande complicité rythmique et mélodique entre tous les musiciens. Même un
morceau mondialement connu comme "Oh Happy Day", souvent repris, mais dans l'ensemble rarement pertinent, devient subitement très parlant dans l'interprétation qu'en fait le vibraphoniste Milt
Jackson. Une classe toute en retenue et un moelleux constant pour une simplicité malgré tout des plus expressives, comme le prouve le magnifique "Eubie Walkin" et son solo de guitare de Arthur
Adams, un blues sec tout en contenance repris par le sax et le piano de Ernie Watts et de Joe Sample qui y injecte un supplément d'âme musical très réussi. Les fans de Bill Cosby se régaleront au
passage de ses délires vocaux entamés en guise de conversation avec la pédale wah wah du guitariste sur une prise bonus de "Hikky-Burr", wah wah qui, pour l'anecdote, n'avait encore jamais été
dévoilée ni utilisée pour un show à la télévision nationale.On pourra donc dire que la collaboration entre ces 2 artistes fut une vraie réussite qui ne se ringardise pas avec le
temps, contrairement aux sketches télés qui sont un peu passés et n'ont plus le même impact qu'à l'époque. Visionnaire en son temps, le Bill Cosby Show a laissé des traces dans l'inconscient
collectif américain et dans l'histoire même de ce pays grâce à cet humour populaire et engagé qui le caractérise. Il aura aussi permis de mêler le travail scénique de l'acteur avec de la musique
de grande qualité ce qui lui permettra de contenter ses passions au sein d'un même projet, de faire d'une pierre deux coups, pour le plus grand bonheur des télespectateurs, mais également des
auditeurs.Acheter l'album