Le Colonel Kadhafi est mort jeudi 20 octobre après huit mois d'affrontements meurtriers avec les rebelles libyens.
La photo de l'AFP montrant le leader libyen les yeux fermés et le visage couvert de sang a fait le tour du monde avant même que ne soit annoncé officiellement sa mort par le Conseil National de transition (CNT). La presse internationale, revient au lendemain de la mort du "Guide", sur cet événement majeur pour la Libyz, qui survient après 42 ans de dictature.
La mort de Mouammar Kadhafi constitue une victoire triomphale qui sonne comme un avertissement aux autres dictateurs du Moyen-Orient, tout en soulevant des inquiétudes sur l'avenir du pays, estime la presse britannique vendredi 21 octobre.
En France. "France Soir" titre "Kadhafi ils ont eu sa peau". Une photo en gros plan surmontée de gros caractères. Toute l'horreur et la violence de la scène, en toute première page. Si "Libération", "France Soir" et "La Nouvelle République" ont fait le choix d'une Une sensationnelle en optant pour la photo du leader en sang, d'autres, comme le "Figaro, "Le Parisien" ou encore "Ouest France", se sont contentés de titres sobres à l'image de"Kadhafi, la fin", "La fin de Kadhafi", et "Kadhafi tue, la paix reste à reconstruire". Un décalage dans la surenchère qui interpelle.
Le poids des mots et le choc des photos
Aux Etats-Unis. Le journaliste David D. Kirkpatrick du "New York Times" explique : "les photos de son corps ensanglanté (…) ont circulé juste après sur les écrans de téléphones et de télévision". Et de poursuivre : "La sanglante fin de Kadhafi a inscrit dans la conscience de chacun les défis à relever. L'arbitrage entre vengeance et justice, entre l'impatience de trouver un emploi et la reprise lente de l'économie, entre la fidélité à l'islam et la tolérance des minorités, et entre la stabilité et l'envie d'abattre les piliers de l'ancien gouvernement"
Il s'agit d'une situation inédite. Mary Beth Sheridan du "Washington Post" explique l'importance de telles images : "Kadhafi est le premier leader à être tué dans le Printemps arabe, et les photos de son visage couvert de sang se sont dispersées rapidement partout dans la région, envoyant un message fort aux dictateurs et aux manifestants d'ailleurs, tout comme les photos de l'ancien dictateur égyptien Hosni Moubarak jugé devant une cour".
"Le plus humble des citoyens est connecté"
Sur "Al Jazeera", Robert Grenier, ancien membre de la CIA, parle d'un "monde dans lequel les balayeurs de rues ont des téléphones portables, où même le plus humble des citoyens est connecté intimement au monde". Un régime comme celui de Kadhafi est, de fait, presque inimaginable aujourd'hui dans une des régions les plus régressives du globe. "Son départ ne permettra pas en soit aux Libyens de réaliser leurs aspirations les plus ambitieuses, mais il faut le voir comme il est : un départ nécessaire bien qu'insuffisant", explique-t-il.
"Ce que Kadhafi s'est attiré sur lui en quelques mois est le fruit inévitable de son délire d'omniprésence, un délire dans lequel, pendant 40 ans, il avait congelé son peuple". C'est ce que défend "la Repubblica". Pour le journaliste italien Vincenzo Nigro, une chose est sûre ; le pays qui fût une colonie italienne, avec la mort du Colonel, sort d'un tunnel sombre de 41 ans de terreur.
Le quotidien espagnol, "El Pais", sous le coup de l'annonce d'ETA de déposer les armes, relègue la mort de Kadhafi au second plan. Jason Pack et Sami Zaptia conseillent aux Libyens de ne pas remercier l'aide internationale "dans la subordination, mais dans la prise de décisions difficiles et nécessaires pour asseoir les bases d'un futur démocratique, méritocratique et ouvert d'un point de vue économique".
Fanny Abouaf – Le Nouvel Observateur