Des soldes à la FIAC ? Oui, chez Florence Loewy (F15), à l'étage : installation de Yann Sérandour, bien en phase avec son ironie critique. Kounellis (et d'autres) apprécieront.
Ceci dit, le parc immobilier n'y est pas en très bon état, comme en témoigne la vitrine d'agence immobilière gazaouie due à Taysir Batniji sur le stand de Sfeir-Semler (C08).
Les révoltes du printemps arabes fournissent un sujet parfois exploité de manière un peu facile ou opportuniste (Claire Fontaine sur le stand de la galerie israélienne Dvir; A04). Les indignés sont partout : cette très belle image mystérieuse et menaçante est un écran de téléviseur fracassé, échardes de verre, treillis métallique, avec cet oeilleton au fond, comme un viseur : c'est de Mohamed Borouissa chez Kamel Mennour (B23).On remarque au passage un beau jardin de Dan Graham chez Massimo Minini (A08), l'âne savant de Pilar Albarracin chez Valois (A09) et la magistrale critique de la publicité de Victor Burgin chez Thomas Zander (B43). Une première cabane en bois abritant un cabinet de curiosité : Mark Dion chez Fabienne Leclerc / In situ (B41), puis une autre, archéologique et sombre, de Paolo Bronstein chez Franco Noero (C01), havre de silence au milieu du brouhaha. GB Agency (B01) montre cette pièce douce-amère et pleine d'ironie de Jiri Kovanda : déshabillons les photographes plutôt que les modèles. Aussi sur ce stand, plusieurs pièces de Roman Ondak, dont le film d'une promenade dans la vieille ville de Bratislava pour déverser dans une fontaine historique des kilos de pièces de monnaie, geste porte-bonheur au centuple; un récit militaire d'Omer Fast ponctué des images incongrues que Google Images suggère pour chacune des phrases; et les miroirs noirs de Yann Sérandour. Parmi les stands mono-artistes, celui de Mehdi Chouakri (C05) consacré à Mathieu Mercier est sans doute le plus réussi. Ne pas manquer l'espace dédié à la gagnante des Audi Talents Awards (C32), la jeune et prometteuse Emilie Pitoiset, dont les installations et les vidéos toujours un peu énigmatiques évoquent et détournent des fantômes chorégraphiques, Merce Cunningham ou Oskar Schlemmer. Et voilà une petite sculpture (de Raphaël Zarka chez Michel Rein, C18) qui m'a bluffé : cette petite architecture en bois précieux est en fait la reconstruction par l'artiste d'un mobilier qui apparaît dans le tableau "La damnation de l'âme de l'avare de Citerna" que le Siennois Sassetta peignit en 1417 : la perspective y est encore hésitante et Zarka la redresse, il passe de deux à trois dimensions, donne volume et lignes à un objet d'appoint peint sans grande rigueur. C'est un travail de révélation, de reconstruction, un retour à des formes essentielles, historiques (ses détours vers les skate-boards ne m'avaient guère passionné, pour être franc); on peut en voir d'autres au Grand Café à Saint-Nazaire, jusqu'au 31 décembre, dont le lit de cet extraordinaire tableau de Masolino, encore visible à Jacquemart-André. Historiques aussi, de superbes pièces de Michal Rovner à la Pace Gallery (C22). Ces crucifix bisexués en argile de Didier Trenet sont discrètement montrés chez Claudine Papillon (C43).
De retour dans les étages, Laurent Godin (H22) expose deux sculptures poussiéreuses et ruinées de Peter Buggenhout.
A la galerie Wentrup (H13), le genre de photographie expérimentale qui me fascine par son audace et sa beauté pure : Timm Ulrichs agrandit et présente dans une lightbox des amorces de film en couleur (de lui et de Silvio Wolf, qui est le premier ?).Florian Pugnaire et David Raffini détruisent un cube de métal chez Torri (G12), les OVNIs de Julien Nédellec partent comme des petits pains chez ACDC (G07), on a envie d'embrasser les moulages de la bouche de feu(e) Alina Szapocznikow dans l'arrière-salle de Loevenbruck (F04) et le chroniqueur, épuisé, rentre chez lui; il écrira sur le Prix Duchamp demain.
Photos de l'auteur. Les reproductions des oeuvres des artistes : Taysir Batniji, Claire Fontaine, Mathieu Mercier, Michal Rovner, Didier Trenet et Timm Ulrichs qui sont représentés par l'ADAGP, seront ôtées du blog au bout d'un mois.