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Proposition de salaire en Suisse : 10 réflexes à adopter avant de dire oui

Publié le 20 octobre 2011 par David Talerman

Une entreprise suisse vient de vous faire une proposition de poste et vous propose un salaire. C’est plutôt une bonne nouvelle, mais ce n’est pas le moment de baisser la garde, car un salaire en Suisse est souvent difficile à estimer lorsqu’on est étranger.

En effet, cette étape reste LA grande inconnue pour beaucoup d’entre-vous, et certains avouent n’avoir absolument aucune idée de ce à quoi ils peuvent prétendre ni de la manière de juger l’offre qu’on leur fait. Pour éviter la pire des situations qui consisterait à accepter un salaire plus bas que ce que le marché propose (et peut-être se retrouver ensuite dans une situation financière qui ne vous permet pas de vivre correctement en Suisse ou aux alentours), je vous propose 10 règles à suivre avant de dire oui et de signer le contrat de travail.

1 – Savoir si l’entreprise dépend d’une Convention Collective de Travail (CCT) ou non

Si l’entreprise avec laquelle vous êtes en discussion dépend d’une Convention Collective de Travail (CCT), alors vous trouverez dans cette convention collective le salaire minimum correspondant à la plupart des métiers. Cela vous permettra de situer la proposition que l’entreprise vous fait par rapport au minimum. Pour savoir si l’entreprise dépend d’une CCT, le plus simple est à mon sens de demander au professionnel RH avec qui vous êtes en relation. Vous trouverez ici une définition des différentes Conventions Collectives de Travail (CCT), et sur le site du SECO une définition plus formelle des CCT.

Si l’entreprise n’est soumis à aucune CCT, alors vous n’aurez pas de point de repère minimum « officiel ».

2 – Consulter les calculateurs de salaires officiels

Les syndicats et les autorités suisses proposent des calculateurs de salaire qui permettent, à partir de vos informations, de faire une estimation du salaire que vous pourriez demander pour un poste. Ces calculateurs se basent sur les enquêtes officielles menées auprès des entreprises suisses qui communiquent les salaires de leurs employés à des fins statistiques. Ce sont donc des outils incontournables si vous voulez faire une estimation au plus juste de votre futur salaire en Suisse. Il existe des calculateurs de différentes sortes (pour certains cantons notamment), et nous avons regroupé l’ensemble des calculateurs de salaires sur notre page Salaire en Suisse.  Le Syndicat Unia propose également un site très intéressant et pratique pour calculer son salaire minimum.

3 – Activer son réseau pour récupérer de l’information sur les salaires

L’un des meilleurs moyens de savoir si l’offre qu’on vous fait est dans le marché, est de consulter des professionnels du secteur concerné. Si dans votre réseau proche il n’y a personne qui peut vous renseigner, peut-être que ces personnes connaissent quelqu’un qui pourrait vous renseigner (c’est le principe du réseau…). Si le salaire reste toujours un sujet déliquat à aborder, vous devriez pouvoir a minima vous faire confirmer qu’un salaire est ok ou pas.

4 – Sonder la réputation de l’entreprise

Une autre possibilité de se faire une idée de la « justesse » de la proposition de salaire qu’on vous fait est de chercher à savoir quelle réputation l’entreprise dans laquelle vous allez travailler a en matière de conditions de salaires. Utilisez les moteurs de recherches, recherchez sur les forums, bref, utilisez toutes vos compétences en recherche d’informations sur le Web pour voir si une information peut ressortir. Téléchargez notre conférence « Comment utiliser Internet pour sa recherche d’emploi » pour avoir quelques informations complémentaires sur ce sujet.

5 – Par rapport au seuil de pauvreté, où est-ce que je me situe ?

Ce n’est bien sûr pas ce qu’il faut viser, mais le seuil de pauvreté est un indicateur qui permet de situer la proposition de salaire qu’on vous fera. Certains secteurs d’activité en Suisse sont connus pour proposer des salaires particulièrement bas (par exemple, le salaire moyen proposé dans le secteur bancaire est le double du salaire moyen proposé dans le secteur de l’hôtellerie), et il faut s’assurer qu’avec ce salaire, on pourra vivre de manière décente en Suisse ou en zone frontalière.

Aussi, pour fixer les idées, le seuil de pauvreté en Suisse est à 2300 francs suisses par mois pour une personne célibataire (soit 27 600 CHF bruts par an). Pour plus de détails et d’informations, consultez ce billet sur les travailleurs pauvres en Suisse.

6 – Demandez le montant de votre salaire en net, ou calculez-le vous-même

Certains employeurs suisses vous proposeront une estimation de votre futur salaire net (car en général, la négociation se fait en brut), mais beaucoup ne le font pas. Pour répondre à ce besoin, nous avons mis en place depuis 2008 sur le site Expatwire un calculateur de feuille de salaire, et depuis cet été ce calculateur de salaire est disponible directement sur le site Travailler-en-Suisse.ch. Avec ce service, vous aurez une estimation du salaire net (pour les salariés qui y sont assujettis, nous ne calculons en revanche pas le montant d’impôt à la source).

7 – Intégrez tous les éléments de coûts dans votre décision

Ce n’est pas faute de l’avoir répété : le coût de la vie en Suisse est très élevé, parmi les plus élevé au monde. Mais le coût de la vie ne s’arrête pas à la frontière, et dans les zones frontalières (françaises notamment), le coût de la vie est l’un des plus élevés en France. Par ailleurs, que vous soyez frontalier ou résident en Suisse, vous devrez ajouter notamment les frais d’assurance maladie, qui prennent l’ascenseur depuis plusieurs années, et qui représentent par personne un budget mensuel compris minimum de 100 EUR environ (pour une couverture minimale dans le cadre d’une assurance santé frontalier), et de 200 CHF mensuel au minimum environ pour un trentenaire qui vit en Suisse (ces chiffres dépendent de nombreux facteurs, dont l’âge et la franchise) dans le cadre d’une assurance maladie obligatoire LAMal. Et ces couvertures proposent des prestations franchement minimales, et donc insuffisantes pour couvrir beaucoup de soins).

8 – Ne convertissez pas le montant de votre salaire suisse en euro et ne le comparez pas avec un salaire en euro perçu en France

Je le mentionne encore, mais j’espère que plus personne ne fait cette erreur : ne convertissez pas votre salaire en francs suisses en euro pour le comparer avec ce que vous gagnez en France ou en Europe, cela n’a aucun sens. Ce qui est important, c’est de savoir combien vous valez sur le marché du travail en Suisse. Car le cas de figure suivant peut apparaître :

  1. le salaire en francs suisses converti en euros est supérieur à votre salaire en euro en France
  2. mais le salaire qu’on vous propose en francs suisses est largement inférieur à ce qu’on devrait normalement vous proposer en Suisse (pour un tel poste)
  3. Conclusion : vous vous faites avoir et alimentez malgré vous le dumping salarial qui consiste à recevoir un salaire moins cher parce qu’on est étranger.

 9 – Il n’y a pas que le salaire fixe dans la vie…

Le salaire fixe cristallise en général toutes les attentions. Mais dans une proposition de salaire, il y a également tous les « à côté ». Il faut notamment savoir :

  • si vous toucherez un salaire variable et/ou un bonus (pratiques qui ne sont pas, selon les secteurs, uniquement réservées aux membres de la direction. Par exemple, 70% des informaticiens en Suisse touchent un salaire variable)
  • si vous bénéficierez d’avantages en nature : véhicule, participation au logement, à l’assurance maladie… Ces pratiques ne sont pas courantes mais doivent bien sûr être valorisées dans la proposition de salaire qu’on vous fait
  • si la caisse de pension est intéressante : entre une bonne et une « moins bonne » caisse de pension, la différence après quelques années de travail peut être de plusieurs dizaines de milliers de francs suisses. A vous de voir si vous souhaitez intégrer ce paramètre qui tient plus de la prévoyance que du salaire à proprement parler.

10 – C’est avant qu’il faut négocier, après c’est trop tard

Ce dernier point est un petit rappel à l’usage de ceux qui négocient leur salaire et leurs conditions et qu’il me semble bon d’avoir en tête le moment venu. Certains de mes amis recruteurs me font régulièrement part d’un trait de caractère (qu’ils attribuent principalement aux Français) qui consiste à revenir sur la négociation alors que le contrat est édité et prêt à être signé. En suisse (comme dans beaucoup de pays d’ailleurs), la phase de négociation de salaire a un temps, et une fois que tout le monde est d’accord, il n’est en général pas question de revenir sur des points du contrat. Assurez-vous donc, avant de dire « ok je suis d’accord« , que tout est bien en ordre pour vous. Et si jamais vous voulez plus d’informations et de conseils, vous pouvez aussi consulter le guide que j’ai co-écrit avec Laurent Schütz « Décrocher cun emploi en Suisse« , qui traite notamment de ces questions. Et vous, quelles sont vos expériences dans ce domaine ?

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