Pierre Seel et le témoignage indispensable

Le livre de Pierre Seel « Moi, Pierre Seel, déporté homosexuel » est un indispensable. C’est, au-delà du témoignage d’un homme, un hurlement contre l’oubli, contre le silence.

Pierre Seel a été déporté, parce que fiché par la police française avant même l’arrivée des nazis, et ce parce qu’homosexuel.

Des années durant, Pierre Seel s’est tût. La « honte », le poids de la société, le regard des autres, le poids de la religion, de la famille. Pourtant, c’est bien l’horreur qu’il a vécu, quand, dans son Alsace natale, il est interné dans un camp. Quand on lui demandera d’assister au pire, pour le briser psychologiquement, et qu’on lui fera construire un four crématoire avec ses codétenus. Quand il est relâché pour être incorporé, histoire de servir de chaire à canon de l’armée nazie.

De toutes ces épreuves il se sortira, jouant de chance plus qu’autre chose, et il le sait. Il en porte le poids. Mais, au fil des années, il comprend qu’il faut rompre le silence, réparer l’injustice de l’oublie des plus de 800 000 homosexuel(le)s déporté(e)s durant la guerre (et avant celle-ci). Qu’il n’y a pas pire que les morts qu’on oublie. Alors il parle, écrit, hurle sa colère. Et écrit ce livre, passionnant et glaçant de bout en bout, avec l’aide de Jean Le Bitoux (que l’on oublie aussi un peu trop ces temps ci).

Un livre coup de poing, un livre pour la mémoire, pour que nous n’oubliions pas, pour que nous ne soyons pas aveugles de notre histoire. Un livre qui n’est pas revanchard si ce n’est sur la vie et contre l’oubli.

Pierre Seel est un grand homme par ce qu’il a vécu, mais surtout par la force qu’il a su trouver pour nous transmettre sa mémoire.

Comme pour Rudolf Brazda, c’est à nous qu’il revient aujourd’hui de l’entretenir, mais aussi de continuer le combat pour qu’enfin la déportation homosexuelle soit reconnue, et que l’homosexualité cesse d’être vue comme une tare.

Emission "Là bas si j'y suis" : http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=795