Un demi-siècle après l’événement, la tuerie à Paris à la fin d’une manifestation pacifiste de sympathisants du Front de Libération national, reste une blessure ouverte difficile à admettre. Les Français se souviennent plus souvent de manifestation sanglante anti OAS en 1962 à Charonne toujours à Paris. La bande dessinée s’est emparée du sujet de cette terrible répression. En 2011, plusieurs albums sur le 17 octobre 1961 participent à leur manière à ce devoir de mémoire, mais aussi d’explication. Ce fut aussi l’objet d’une exposition spécifique au Festival International de la Bande Dessinée d’Alger. Première visite guidée avec Samia Messaoudi, journaliste et éditrice, fondatrice de l’association Au nom de la mémoire (ci-contre).
Alger tenait en début octobre la 4e édition de son festival international de la bande dessinée. Un an avant les festivités du cinquantenaire de l’indépendance et la libération de la République algérienne démocratique et populaire, la rencontre internationale de bande dessinée ne pouvait pas passer à côté d’un événement tristement célèbre qui a marqué la fin de ce qu’on a appelé bien plus tard en France la Guerre d’Algérie. Issus de milieux ouvrier et immigré algériens, Samia Messaoudi et Mehdi Lalloui, fondateurs de l’association Au nom de la mémoirevivant à Paris, ont organisé l’exposition sur le modèle déjà utilisé 10 ans plus tôt, à Paris cette fois là. Leurs parents avaient défilé à Paris ce 17 octobre 1961. L’information à l’époque avait été tronquée par les autorités et les médias. Beaucoup de participants ne parvenaient pas à raconter les faits tellement ils étaient choqués. Mais le plus souvent, les témoignages étaient occultés.
Pourtant, un tel événement devait être transmis et des témoins devaient s’exprimer. D’où l’idée de créer une association pour ne pas oublier et pour faire connaître cette journée funèbre. « Est-il normal que cette journée soit absente des livres scolaires ? », s’indigne Samia Messaoudi, devenue journaliste notamment à Radio Beur ou Beur TV et divers organes de la presse écrite. Oui,ce 17 octobre1961, des ouvriers algériens ont osé braver l’ordre public injuste et défilé totalement pacifiquement, sans arme, dans les rues de Paris, pour demander l’abrogation du décret préfectoral de couvre-feu qui leur avait été imposé par Maurice Papon et dont le caractère raciste était évident. En réponse, sa police chargera les manifestants et provoquera des dizaines de morts, des centaines de blessés et conduira à des milliers d’arrestations. C’est en 1961 et pas en 1941. Officiellement 4 morts. En réalité peut-être 400...
à suivre...
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Photos Exposition 17 octobre 1961 au FIBDA Alger © Manuel F. Picaud