Il y a un aspect absurde dans le raisonnement qui consiste d'une part à vilipender les agences de notation pour leurs notes qui n'auraient aucun sens, et d'autre part à sacraliser le AAA qu'elles nous décernent, comme s'il s'agissait de la preuve de la bonne gestion de nos finances publiques.
Ecoutons ce que nous disent les marchés aujourd'hui, alors que Moody's envisage éventuellement de placer notre note sous perspective négative, d'ici à quelques mois.
Les taux à 10 ans sont à 2.00% sur le Bund allemand, à 3.10% sur nos OAT françaises. Le spread de taux est donc maintenant à 110 points de base, niveau record. Il y a un an, ce spread était à 30 bp, et on l'a déjà vu négatif !
Si l'on regarde les prix des CDS, credit default swaps, sur la dette française, on flirte avec le niveau de 200, alors que l'Allemagne est à 92. Le prix du CDS sur la France est équivalent à celui des Philippines, lequel pays est noté BB ! Statistiquement, selon CMA, fournisseur de prix de CDS, un niveau de 200 équivaut à une probabilité de défaut d'environ 15% à 5 ans, et correspond plutôt à une notation A.
Les agences de notation ont 2 ou 3 ans de retard sur la réalité, pour ce qui concerne le risque souverain. Le AAA qu'elles nous décernent est une illusion, un vestige de notre gloire passée, et s'y accrocher est une fanfaronnade qui nous empêche de voir la réalité en face. La dynamique de notre dette publique est sur une trajectoire insoutenable.
Comment faire pour s'attaquer au problème, sachant qu'une forte diminution des dépenses publiques a un effet récessif marqué, qu'une augmentation des impôts, vu le niveau d'où l'on part, est tout aussi récessif, et qu'une augmentation de la dépense publique, dans un délire keynésien, est encore plus inimaginable, le tout dans un contexte de croissance durablement faible ? Bon courage au prochain Président ! En anglais, il y a l'expression : kick the can down the road. C'est ce que l'on a fait jusqu'à présent. Les marchés nous disent aujourd'hui que ce n'est plus possible.