Ce mardi 18 octobre, Nicolas Sarkozy file en province, comme chaque mardi. Le thème du jour est « la formation et
l'insertion professionnelle des jeunes ». Il y a beaucoup à dire sur le bilan de Nicolas Sarkozy sur le sujet.
A Nice, Sarkozy n'évoquera pas la campagne électorale qui démarre, la désignation de François Hollande, les enquêtes
qualitatives de son cabinet noir pour abattre l'adversaire, les manoeuvres de la cellule Riposte dirigée par Hortefeux.
Il ne parlera pas davantage du fiasco du RSA jeunes ni de la précarisation de la jeunesse.
Sarkozy n'évoquera pas son bilan. Pour 2012, il veut tuer son compétiteur.
Saloperies de campagne
Lundi soir, le Monarque a reçu Brice Hortefeux à l'Elysée. L'ami de trente ans, sous le coup d'une enquête pour entrave à la
justice, s'est auto-proclamé patron de la cellule Riposte de l'UMP.
Comme chaque mardi, il partira après son petit-déjeuner politique avec les principaux dirigeants de son clan. On peut ainsi
caler les discours. Depuis la désignation de François Hollande comme candidat du PS et
du PRG dimanche soir, Sarkozy a fixé l'angle d'attaque: critiquer le programme mais surtout fustiger la personne de François Hollande. Jean-François Copé a commencé dès lundi matin lors du
point presse de l'UMP : « on ne dit pas de François Hollande qu'il est courageux ». Quelle hauteur !
« Toute la campagne va consister à débusquer François Hollande » a confirmé
un conseiller élyséen. A l'Elysée, on a déjà déjà reçu les résultats des études « qualitatives » pour trouver comment dézinguer la personnalité de François Hollande. Le « travail
de sape » a commencé. Franck Louvrier ou Brice Hortefeux en ont confié quelques-unes des conclusions à Charles Jaigu du Figaro.
L'Élysée a notamment décortiqué cet homme jugé «transparent» au travers de plusieurs enquêtes qualitatives. Il apparaît que François Hollande serait «beaucoup moins présidentiel que François Bayrou», notamment parce qu'il apparaît «peu capable de prendre des décisions qui peuvent être impopulaires», avance encore l'entourage élyséen. Et à la question: «Si Hollande était un film?», les Français interrogés répondent Le Corniaud ou Le bonheur est dans le pré, indiquent ces sondages. Deux films à succès dont les héros sont sympathiques mais peu présidentiels. S'il était une étape du Tour de France, Hollande serait «250 km de plat en Belgique», continue cette étude. Évidemment, le chef de l'État est plus facilement comparé à «l'étape du Galibier», ajoute l'Élysée, qui concède aussi que les films cités pour Sarkozy sont Marche ou crève ou 24 heures chrono. Le décor est donc planté.
Ces études ont été payées sur les fonds publics de la Présidence de la république. Le procédé est facile, la manoeuvre
évidente. Ne sortez pas les poubelles, la cellule Riposte s'en est chargée.
Nicolas Sarkozy, lui, fera semblant de travailler. Ce mardi, accompagné de Luc Chatel (Education) et Nadine Morano (Apprentissage
et formation professionnelle), il rencontrera à son ami Christian Estrosi, le député-maire de Nice évincé du gouvernement l'an dernier. Il visitera le Nice Stadium, « chantier sur lequel
sont engagés des jeunes en contrat de professionnalisation, puis présidera une table ronde à l'Opéra de Nice ».
Attention, ne vous trompez pas. Nicolas Sarkozy n'est pas en campagne. Il n'est pas candidat. Et pour cause: quand Sarkozy
parle, c'est hors plafond...
De la jeunesse et de l'emploi, parlons-en justement. Le jeune était d'abord l'ennemi. Quand Nicolas Sarkozy fraîchement élu
parlait de la jeunesse, cette dernière était d'abord délinquante. On se rappelait son décret anti-cagoule, ses peines planchers, l'abaissement à 16 ans de la majorité pénale, ou la loi «
anti-bandes ».
Des promesses...
Dans son programme électoral, le jeune pouvait aussi être créateur: « Je vous propose des prêts aux jeunes créateurs à
taux zéro, parce que l’intérêt c’est le prix du temps, parce qu’un taux zéro c’est un acte de foi dans l’avenir. » s'écriait le candidat Sarkozy en 2006. Formidable. En 2009, voici le prêt à taux zéro Nacre... un prêt effectivement à taux zéro pour les créateurs d'entreprises, mais pas spécialement les jeunes de moins de 25 ans. Et d'ailleurs,
ce Nacre, plafonné à 10.000 euros, était réservé à celles et ceux qui pouvaient déjà obtenir des banques un prêt traditionnel.
A trois semaines du premier tour de l'élection présidentielle de 2007, Sarkozy promettait aussi de mettre « en oeuvre un
grand plan Marshall de la formation pour tous les jeunes de nos quartiers ». Fadela Amara, débauchée de la « gauche » pour cela, comprit vite qu'elle ne servait à rien.
On ne sait pas non plus ce que penserait ce candidat de 2007 qui s'indignait de « la situation générale de notre
école » qui laissait « 20 % de nos jeunes quittent l’école sans qualification » de ce Monarque qui fait porter l'essentiel de ses suppressions de postes de fonctionnaires sur
l'Education nationale, jusqu'au RASED.
En septembre 2009, Nicolas Sarkozy nous avait raconté n'importe quoi.
Oui, n'importe quoi. Il avait grossièrement menti. Il savait, à l'époque, qu'il racontait n'importe quoi. En pleine crise, il avait promis d'étendre le bénéfice du Revenu de Solidarité Active
(RSA) aux jeunes « travailleurs » de 18 à 25 ans. - ce qu'il a fait -, mais sous conditions - ce qu'il a fait. En présentant son RSA jeunes, il promit qu'il concernerait près de
120.000 jeunes.
L'idée venait de Martin Hirsch, présentée quelques semaines plus tôt, en juillet 2009, dans un « livre vert » sur la jeunesse rapidement oubliée. Le 29 septembre 2009, Sarkozy reprenait l'idée de son Haut Commissaire aux Solidarités Actives: «Qui peut
comprendre que le travailleur de 25 ans d'une entreprise a le droit au RSA et que le même travailleur de 24 ans dans la même entreprise depuis six mois n'y aurait pas le droit ?
»
Le Monarque proposait alors un grand plan pour la jeunesse, 460 millions d’euros débloqués, dont 250 millions d'euros pour
cette extension du RSA. Les autres mesures étaient le versement d'un dixième mois de bourse (Sarkozy attendra deux ans pour mettre en place cette mesure juste avec les élections), l'augmentation
du nombre d'apprentis dans les établissements publics (via les contrats CIVIS), et le doublement de l’aide à l’obtention d’une complémentaire santé (à 200 euros par mois).
... au bilan
« Mon projet pour la jeunesse, c'est l'autonomie » disait Nicolas Sarkozy.
A l'époque, certains observateurs furent surpris: parmi les conditions imposés aux futurs candidats, il fallait justifier de
2 années de travail salarié à temps complet sur les 3 dernières années. Autant dire, en cette période de chômage massif, que la mesure n'allait pas satisfaire grand monde. Les 40% d'étudiants
contraints au travail partiel étaient exclus de facto de la mesure.
Deux ans plus tard, le bilan est là, et il est sans surprise, mauvais.
1. les frais de santé n'ont cessé d'augmenter: l'an prochain, les tarifs de mutuelle complémentaires devraient progresser de 8%
en moyenne, à cause de la récente taxation supplémentaire prévue dans la loi de finances 2012.
2. 5.000 jeunes bénéficiaient du RSA en décembre dernier. Formidable ! A fin
juin, le nombre de bénéficiaires serait monté à 10.000 d'après le Figaro. Formidable ! Pire, au sein du dispositif, les bénéficiaires du seul « RSA socle » (qui a pris le relais du RMI
pour les sans-activités) ne sont que 2 000 jeunes.
Le fiasco est total, à tel point que Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités Actives, a promis d'annoncer une réforme
lors d'une conférence d'évaluation du RSA qui se tiendrait le 15 décembre. Vu les délais et la fin de session parlementaire pour cause d'élections, cette réforme sera soit modeste soit pour
après juin 2012.
Septembre 2009-mai 2012, deux ans et demi de mensonges et d'immobilité.
3. A Nice, Nicolas Sarkozy veut aussi parler d'apprentissage. Là aussi, le Monarque parle beaucoup et agit peu. Sa ministre
en charge du sujet, Nadine Morano, est plus à l'aise pour fustiger en rafales et sur commande l'opposition que pour bosser sa propre matière gouvernementale:
à fin juin 2011, le pays comptait 400.000 jeunes en apprentissage et 169.000 contrats de professionnalisation. Depuis janvier, l'apprentissage a perdu 1.000 postes et les contrats de
professionnalisation en ont gagné ... 2.000.
Quel bilan ridicule !
Et la crise ?
A Nice, Nicolas Sarkozy jouera aussi de l'argument habituel sur la reprise économique. La France, grâce à lui, aurait mieux
résisté que d'autres; la France n'est pas la Grèce ni l'Espagne; etc.
Parlons reprise, justement. Dimanche dernier, Xavier Bertrand, le ministre du Travail, accusait la spéculation boursière
d'être responsable du ralentissement économique. On croyait rêver. Le ministre du travail avait déjà été surpris en flagrant délit de saloperie sociale: il avait gli
Mais sur le fond, la situation de l'emploi reste désespérante. Que fait notre Monarque protecteur ?La hausse de l’emploi dans
l’ensemble de l’économie s'est réduite au second trimestre: l'économie française avait créé 80.000 postes entre janvier et mars, elle n'en a créé que 35.000 au trimestre suivant. Le nombre
d'emplois aidés avait été réduit par le gouvernement de 25.000 sur le semestre.
Dans sa dernière livraison sur les «
mouvements de main d'oeuvre au second trimestre 2011 » publiée le 12 octobre, la Dares relevait combien les embauches restent essentiellement en CDD, qui représente 77% des embauches. Les CDI
représentent 2,7% des embauches, comme il y a 10 ans.
Mensonges électoraux, promesses en l'air, résultats désastreux.
Qui débusquera Nicolas Sarkozy ?
Ami sarkozyste, où es-tu ?
Sarkofrance