Si l'on s'en tient à la pochette de ce nouvel album, on croirait à une continuité. Le pauvre Justin Vernon se serait-il encore fait larguer? Une peinture lunaire de Gregory Euclide représentant une nature dépouillée de toute civilisation y figure. Des lacs, des épineux, une vision d'Amérique sauvage et apaisée typique d'un Minnesota qu'aime à se représenter le peintre. Et en son centre, absorbée par cet environnement méditatif, une cabane, comme un rappel aux origines de ce qui fit le succès de Justin tandis qu'il enregistrait "For Emma, Forever Ago" il y a 3 ans, et en 3 mois (je ne vous refais pas l'histoire). Une réussite unanimement et logiquement soutenue par la majorité du public.
Le décor planté, on a donc a priori tout lieu de croire qu'il va remettre le couvert sur ce 2e opus. En tout cas on l'espère. D'ailleurs faire au moins aussi bien m'apparaitrait déjà tenir du miracle tant "For Emma.." m'avait subjugué. Je n'ai depuis jamais rien retrouvé d'aussi réussi. Aucune musique d'aucun artiste "folk" ne m'a autant touché que la sienne, et mes attentes (et celles des fans), en sont d'autant plus grandes. Il ne faut finalement pas bien longtemps pour m'apercevoir que Justin à pris de la hauteur et une assurance encore plus grande. Dès l'ouverture de l'album, "Perth" marque le changement. Car cette révolution provient essentiellement de la production qui n'a plus rien à voir avec "For Emma...". Ne m'attendant pas à cela j'ai d'abord été très étonné. L'acoustique laisse place à de l'électrique. Les arrangements sont plus marqués et le son beaucoup plus travaillé, façon Sufjan Steven ("Minnesota, Wi" ou "Holocene" sont magiques). Les micros, le mixage, l'électronique, les instruments, les attributs ne sont plus les mêmes. "Bon Iver" (le titre du disque), n'est cette fois-ci pas à la source d'une rupture sentimentale mais à été écrit sur la route, parlant et jouant des endroits que le groupe a parcouru depuis 2008. Les titres en sont ses sentiments, ses visions, et tous portent le nom d'un de ces lieux. La nostalgie et la mélancolie sont toujours aussi présentes, mais c'est surtout cette voix de tête, les mélodies, et toutes ces harmonies qui vous prennent aux tripes. Le chant suffirait presque tant la pureté de ce timbre est sans équivoque, en studio comme sur scène. C'est lui qui écrit, produit, mixe, et cosupervise jusqu'aux arrangements de violons. Mon seul regret, le morceau "vocodé" très 80' "Beth/rest" qui clôture l'album, pour le coup sans aucun intérêt, mais qui reste anecdotique tant l'ensemble est cohérent. Et aussi que "Bon Iver" ne soit pas plus long. 39 minutes c'est court et ça passe vite. Mais comme pour son disque précédent (même si c'est d'emblée moins évident), celui-ci se révèle un peu plus à chaque écoute et gagne sur la longueur. Définitivement un sacre du tympan et la marque des grands. Transition plus que réussie, Monsieur.
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