François Bayrou, le Monsieur tout le monde en politique.

Par Sergeuleski

François Bayrou…

Homme sans qualité qui attend, tapi dans l'ombre, qu'un plus mauvais que lui échoue... à savoir : le candidat PS ou UMP au premier tour d'une élection présidentielle.

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Laborieux, sans panache, en éternel don Quichotte de la politique, un temps à la tête d’une UDF créée voilà quarante ans aux seules fins de sortir de l’étouffement du Gaullisme - celui des carrières et des ambitions -, pour quiconque n’était pas dans l’orthodoxie…

S’auto-proclamant porteur d’un projet qui se situerait au-delà des clivages politiques traditionnels - projet qui, dans les faits, consiste à jeter la politique à la porte sans se soucier de la fenêtre laissée entr'ouverte…

François Bayrou n'a qu’un souci : passer l’Histoire à la trappe ; aspiration illusoire car la politique, ce n'est pas ce qu'il nous faut être - comprenez : ce qu'il est raisonnable d'attendre des autres et d'espérer pour soi-même…

Non ! La politique, c'est ce que nous sommes ; et ce que nous sommes, nous le sommes depuis des lustres. Et personne ne nous changera ! Et sûrement pas un projet qui aurait la prétention de faire de l'être humain un agent a-politique et raisonnable.

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Derrière cet homme appelé par personne et à qui le destin et la fatalité n’ont rien demandé, on sera bien en peine de trouver une seule nécessité quelle qu’elle soit... nécessité pour nous, pour la France, l'Europe, le monde… de souhaiter et de le voir un jour occuper la fonction de Président de la République.
La besace légère, projet cen-triste (1) sous le bras - projet des uns qui pourrait tout aussi bien être celui des autres, sans distinction, sans ambivalence et sans altérité, précisément là où se trouvent déjà Hollande, Villepin, Borloo, et plus tard, Sarkozy au 2è tour d’une présidentielle pour un grand écart de l’extrême droite au centre-droit…

Que reste-t-il à François Bayrou comme espace politique ?

Ministre de l’Education Nationale chez Juppé et Balladur, ministre aux ordres, transparent et aphone - « Pas de vagues ! Pas de vagues ! Et pas de vagues ! -, européen aveugle d’un enthousiasme imbécile, sans Parti - un Parti avec des adhérents-militants, des références historiques et des racines, sans oublier des moyens financiers -, seule demeure une ambition, une seule... obsessionnelle : l’Elysée. Une ambition têtue qui, au fil des ans, ne semble concerner que lui. Ambition juvénile venue de dieu sait où ! Sans doute cet éternel provincial s’est-il laissé un jour séduire puis aveugler par les lumières de la Capitale et, plus tard, par les lampions de nos bâtiments et monuments publics, hautement symboliques, Matignon et l’Elysée entre autres, tout le monde s’étant bien garder de lui rappeler que tout ce qui brille n’est pas d’or, et que tout ce qui scintille et clignote ne lui est pas nécessairement destiné…

Ambition qui, à la longue, embarrasse tout le monde, tellement cette ambition est disproportionnée comparée à celui qui la porte. Quant à ses chances de parvenir un jour à occuper le fauteuil élyséen, et même s’il ne faut jamais jurer de rien - la politique et des électeurs pusillanimes, le plus souvent amnésiques ou tête en l’air, savent récompenser les candidats patients et déterminés -, encore une fois, il semblerait que seul l’échec de ses concurrents pourrait permettre à Bayrou de rafler la mise suprême… comme le cornet de glace du même nom.

Mais alors... qui sauvera Bayrou ? Ou bien plutôt, qui le délivrera de cette ambition ?

Et le retrait de Jean-Louis Borloo n’arrangera rien, c’est à craindre car, la pire chose qui puisse arriver c’est que Bayrou recommence à y croire, lui et son « ni droite ni gauche » tarte, d'une profonde vacuité et d’une ignorance et historique, et sociologique, et politique surprenante…

Ignorance feinte, bien évidemment !

Car enfin... de tout temps, n’a-t-il pas toujours été question de ce ni droite ni gauche qui, dans les faits, ne peut signifier qu'un "un coup à droite, un coup à gauche", de de Gaulle à Chirac en passant par Mitterrand (pensons un instant à Jospin et à ses privatisations que toute la droite lui a longtemps enviées pour avoir désirer y placer leurs petits copains) ?

Concept ambidextre par excellence donc, inclusif et non exclusif ce ni droite ni gauche - un coup à droite, un coup à gauche !

Privé de Parti digne de ce nom pour le soutenir et le porter - en cinq ans, Bayrou a trouvé le moyen de mettre à genoux le MoDem ; en effet, nombreux sont ceux qui l’ont quitté depuis la présidentielle de 2007, Bayrou n’ayant aucun don pour le travail d’équipe et le travail en équipe…

Auto-exclu donc, force est de reconnaître que Bayrou n’a guère le choix : il lui faut se situer en dehors du champ politique de ceux dont lui et son ambition se sont volontairement détachés.

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Interview après interview, Bayrou semble n’avoir pour seuls référence et modèle - unique horizon indépassable de sa vision politique -, l’Allemagne ! Et pas n’importe laquelle : celle de Merkel.

Et alors que tous les économistes savent que la prospérité toute relative de ce beau et grand pays repose sur l’asphyxie de la demande intérieure ; et par ricochet… sur toute l’Europe et la France en particulier….

Compression des salaires : les allemands d’aujourd’hui sont les japonais d’hier - ceux des années 60 et 70 : "On exporte ce qu’on ne peut pas (ou ne peut plus) s’offrir !"…

Quant aux bons chiffres du chômage allemand, ces derniers sont dus à une natalité catastrophique (les Allemands ne baisent plus après leur journée de travail) et au fait que les femmes allemandes depuis 30 ans ont été fortement encouragées à rester à la maison, libérant ainsi des emplois pour leurs hommes, occupés, lorsqu’ils ne travaillent pas d'arrache-pied à la prospérité du commerce extérieur allemand sur le dos des partenaires européens -, à regarder le sport à la télé, à boire de la bière et à roter sous le nez de leurs épouses potiches qui, à défaut de faire des enfants (mais qui peut bien souhaiter les mettre au monde dans un pays porteur d’un tel projet ? Les Italiens, les Grecs et les Espagnols … eux, au moins, ont su s’amuser et en profiter !), s’abrutissent devant des séries télé aussi sinistres qu’indigestes.

N’oublions jamais que l’Allemagne est le pays qui a produit Derrick… (281 épisodes de 59 minutes) ; une série d’une pauvreté, d’une laideur et d’un ennui inqualifiables, une gifle, une insulte à la face de tout ce qui de près ou de loin pourrait ressembler à du talent aussi modeste soit-il… très certainement à l’image de ce que les Allemands vivent au quotidien, ou du moins... de ce qu'on leur donne à vivre depuis trente ans, ou bien encore... de ce qu'ils sont devenus.

Avec cette référence constante à l’Allemagne, pays qui n'est pas un modèle mais un échec d'une ampleur sans précédent en Europe, Bayrou nous rappelle que les outsiders, éternels challengers, n'admirent et n’envient rien tant que la force et la puissance, même et surtout d’un égoïsme et d’un autisme destructeurs.

De même, nombreux sont ceux qui n’oublieront pas de si tôt un Bayrou chantre de "la politique autrement", pourtant bien incapable d’accepter la main tendue par une Ségolène Royal qui, au deuxième tour de la présidentielle de 2007, était loin d'avoir perdu toutes ses chances d'être élue. Un Bayrou infatué qui n'a pas eu l'humilité, la modestie, le désintéressement, le civisme, la générosité - que sais-je encore ! -, d’appeler ouvertement à voter pour Ségolène Royal, se sachant pourtant hors-jeu mais préférant jouer la carte du pourrissement...

Bayrou ne se considérait-il pas alors comme un homme providentiel ? Ne se voyait-il pas homme de l’ultime recours pour 2012, pour un peu... sur-homme, une fois la gauche à terre et une droite éclatée après 5 années d’un sarkozisme ravageur ?

Bayrou pouvait-il ignorer qu’un Sarkozy Président serait une catastrophe pour la France (ce qu’était déjà Sarkozy alors ministre de l’intérieur) ?

Comme tant d’autres avant lui, et comme tant d’autres après lui, et plus nombreux encore, à cette occasion, François Bayrou – bassement calculateur pour son seul profit, du moins le croyait-il -, s'est donc avéré, en ce fameux mois de mai 2007, incapable de s'asseoir à la même table qu'un candidat mieux placé que lui pour gagner une élection présidentielle, et alors que les circonstances l’exigeaient et que le danger était imminent.

75% des électeurs de Bayrou (2) choisiront Sarkozy au 2è tour.

Certes ! On ne pourra pas leur reprocher de ne pas connaître leur droite de leur gauche ; on leur devra même une nouvelle définition de ce qu'on appelle en politique le centre : tout ce qui penche à droite, voire... à l'extrême droite (en effet : difficile d'oublier que, jamais, avant Sarkozy, un candidat de droite n'avait fait campagne sur les terres du FN).

Une escroquerie le positionnement de Bayrou qui se dit tout autre pour une politique du même nom ?

Assurément ! Car avec Bayrou, un Bayrou tartuffe, champion toute catégorie de l’auto-illusion à la racine de laquelle on trouve toutes les hypocrisies, et ses électeurs avec lui, on est bel et bien et encore... dans la décadence et la déliquescence de tout ce qui de près ou de loin touche à la politique et à la noblesse de son exercice : altruisme et efficacité pour une justice des conditions de vie pour le plus grand nombre.

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Mais alors…

Et si Bayrou n'existait pas ? Et si ce Bayrou qui se veut novateur, au dessus de la mêlée et de toutes les mêlées, même au pays du rugby dont il est pourtant originaire… n’existait décidément pas ?

Des électeurs auraient-ils rêvé Bayrou comme on rêve… l'Atlantide ou Tombouctou ?

Ou bien alors, Bayrou existerait mais... seulement dans la mesure où l'on est capable, et sans difficulté, aujourd'hui encore, de trouver des individus de la même espèce dans toute la classe politique, et ce de tout temps ? Il suffit pour cela de donner un coup de pied dans n'importe quelle corbeille de n'importe quelle permanence électorale, une fois le scrutin clos, bulletins de vote au vent, tournoyant et virevoltant.

Est-ce donc là la vérité sur Bayrou ?

Allez ! Disons-le une fois pour toutes !

Bayrou ne sera jamais rien d’autre que ce qu’il poursuit : l’ambition de poser un jour ses fesses (on les dit grasses, lourdes et larges) au palais de l’Elysée.

Autant dire… en politique, l’ambition et le rêve de Monsieur tout le monde. En cela aussi, François Bayrou ne se démarque guère de ceux qu'il n'a de cesse de conspuer depuis 2002, année de son premier échec à l'élection présidentielle ; échec renouvelé en 2007.

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Aussi... empressons-nous de passer à autre chose : je sais pas moi... la fin de l'été... l'arrivée de l'automne...

Ce soleil d'octobre... radieux !

Un cadeau inespéré.

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1 - Le centre, c’est l’équilibre. Tous ceux qui manipulent des balances le savent : cet équilibre on l’obtient en plaçant un poids identique sur le plateau de gauche et sur le plateau de droite.

Les anglais utilisent le terme « balance(d) » pour équilibre ; à la fois verbe et substantif.

Aussi, un homme politique qui se dit du centre et qui ne re-connaît ni la gauche ni la droite ne pourra jamais prétendre, dans son action, atteindre un équilibre quel qu’il soit.

De plus, cette idée d’équilibre – pour peu qu’elle puisse impliquer la recherche d’une justice des conditions de vie et d’existence pour le plus grand nombre - est une belle escroquerie, puisqu’à l’état naturel, en l’absence de toute politique corrective, il n’existe aucun espoir d’arriver à ce fameux équilibre tant convoité par un Bayrou décidément très équilibriste, sur la corde raide, en funambule d’une pensée politique qui ne répond qu’à une seule nécessité : SDF de la politique, Bayrou sait mieux que personne que sa soif Elyséenne ne trouvera aucune place à gauche comme à droite - les prétendants y sont bien trop nombreux et trop bien implantés, depuis bien trop longtemps.

2 - Quand on sait que c'est cet électorat-là, électorat dit du centre, qui fait l'élection présidentielle (entre autres élections)... on frémit à l'idée de devoir dépendre d'un tel corps électoral, à la fois inconstant, sans courage et sans imagination.