George Harrison vu par Avedon et maintenant par Scorsese (rencontres au sommet)
Voilà qu’il passe de l’autre côté des Stones… Martin Scorsese, davantage versé dans les Rolling tributes (voir la BO de ses films et Shine a light) consacre cette fois un documentaire à George Harrison (1943 – 2001), l’un des fab four qu’on adore. Tout juste diffusé sur la chaîne HBO aux Etats-Unis, George Harrison : Living in a material world sort en DVD ce lundi en France. Dès les premières images, le ton est donné : derrière un lit de tulipes, le garçon dans le vent apparaît tour à tour souriant et grave, et sa voix issue d’un autre enregistrement s’interroge… George Harrison a mené une vie exceptionnelle à bien des égards, tout aussi créative que les deux piliers que sont John Lennon et Paul Mc Cartney, mais… plus discrète, et peut-être plus singulière encore. Car il n’a jamais cessé de chercher le sens, un sens à l’existence, et la beauté où qu’elle se trouve. C’est à celui qu’on surnommait The quiet one que l’on doit, notamment, ce fabuleux titre (paroles et musique) :
If I needed someone to love
L’apport et la richesse créative de l’éternel Harrison : voilà ce que l’on découvre dans ces trois heures et demie de docs d’archives et d’interviews des témoins de la vie de George (regardez-les plutôt en deux fois…). On y croise Terry Gilliam et Eric Idle bien sûr, puisque Harrison mouilla sa chemise pour produire l’extravagante et brillante Vie de Brian des Monty Python, puis le légendaire producteur George Martin, Jeff Lynne [Elo mon Lionel], Tom Petty, Ringo (tellement touchant), Yoko Ono, “Macca”… Une longue liste de potes prestigieux, dont Eric Clapton, toujours ébahi par la beauté de cette chanson…
With every mistake we must surely be learning
Quand on croit tout savoir, à force de discographies et de biographies, sur cette histoire-là du rock, on se rend compte ici qu’on se trompe, et la figure de George, guitariste, inventeur, producteur, en quête de sens constant, prend ici sa vraie place dans les annales pour un public plus large, moins averti que les monomaniaques du riff et du binaire. Entre le monde matériel et le monde spirituel, George a trouvé sa voie, comme dans ce précepte taoïste auquel il est fait référence dans le film et dont je parlais ici. Il est passé par l’Inde et le sitar de Ravi Shankar pour ça, tout en fulminant sa vie durant contre les impôts britanniques ! (cf. la chanson The taxman). Martin Scorsese, avec son sens du rythme et de la rupture, reprend ce chemin avec beaucoup de talent – le même qu’il employa pour The Band (The last Waltz, là) ou Bob Dylan (No direction home) – et livre un portrait pas forcément complaisant. Il est aidé ici par Olivia, la veuve de l’artiste, et s’appuie, outre les témoignages, sur nombre d’images, photos, et inédits soigneusement choisis.
You have to change…
Beatles ou post-Beatles, ce parcours est passionnant. Pour ma part j’ai longtemps écouté les Beatles, et j’y reviens toujours. Du pulsionnel And I saw her standing there (and I saw myself dancing again!), aux bouleversantes notes de Strawberry Fields forever qui me cueillent systématiquement (« No one I think is in my tree, I mean it must be high or low… »), aux albums entiers passés en boucle (Rubber Soul ! Revolver !) : autant de chansons qui accompagnent, dans le pire comme dans le meilleur, l’existence. Parmi toutes ces merveilles, l’une de mes préférées, qui m’apaise à chaque fois. Signée George bien sûr. Sweet lord… Thank you so very much.
It seems like years since it’s been here
It’s all right.
- George Harrison, Living in a material world, de Martin Scorsese. Disponible en double DVD ou blu-ray, ou coffret DVD et Blu-ray avec CD audio et livre de 96 pages. Grove Street Productions-Metropolitan Film & Video/Warner Home Video.
Ps. Je ne résiste pas à vous soumettre les quatre portraits que fit le gigantesque photographe Richard Avedon des Beatles :