Les primaires socialistes ont fait des ravages à l'UMP

Publié le 16 octobre 2011 par Juan
En 2007, personne à l'UMP n'avait empêché Nicolas Sarkozy d'organiser une fausse primaire pour consacrer son investiture du 14 janvier 2007. A l'époque, Jacques Chirac n'avait pas encore confirmé qu'il ne se représentait pas. Bientôt cinq ans ont passé, et Nicolas Sarkozy s'est chiraquisé, la sympathie en moins, la nervosité en plus. Les primaires, surtout chez les autres, il déteste.
Dans les couloirs de l'Elysée, on murmure chaque semaine qu'il annoncera sa candidature au plus tôt fin janvier, idéalement en février. S'il n'était pas candidat, il serait pourtant trop tard pour organiser des primaires à droite. 
Impopularité
Il y a 8 jours, Jean-Pierre Raffarin, un temps brouillé avec Nicolas Sarkozy début septembre, réclamait « un Sarkozy nouveau », une « rupture dans la rupture ». L'ancien premier sinistre de Jacques Chirac a toujours la formule creuse ou ridicule: « Pour une France nouvelle, il faut un Sarkozy nouveau. Dans ce contexte, la continuité ne peut être victorieuse. Nicolas Sarkozy doit porter la rupture de la rupture. Il doit porter le changement. Il peut être la force qui protège ».
Mais ce « Sarkozy nouveau » peine à surgir. Les enquêtes se succèdent et se ressemblent. L'impopularité de Nicolas Sarkozy, malgré des mois et des mois de prises de distance, de fausse activité diplomatique et d'agitation provinciale, reste stable et énorme. Même chez  Opinionway, le sondeur du Figaro, on créditait Sarkozy de 66% de mécontents, soit 13 points de plus qu'en septembre 2009 ! A l'Elysée, où pourtant trois conseillers seniors et spécialistes des enquêtes d'opinion sont payés à temps plein sur le budget de l'Etat, on feint de ne pas s'en inquiéter.
Et voici que ces primaires tombent au pire moment.
Hypocrisie (1)
Mardi dernier, Sarkozy a donné une leçon de gaullisme, signe d'un énervement hors normes. «La Ve République ne peut être l'otage des partis politiques et le candidat  pris en otage par son parti. Le général de Gaulle a voulu une élection à deux tours, pas à quatre tours.» On oublierait presque qu'il avait défendu et installer le principe des primaires dans les statuts de l'UMP pour se faire sacrer candidat à 94% des suffrages le 14 janvier 2007. 
Le sénateur/blogueur centriste Alain Lambert eut la réplique cinglante: «L'idée du général de Gaulle, c'était d'instaurer une élection présidentielle à deux tours, pas à quatre tours, ni d'aller au Fouquet's le soir, ni sur un yatch le lendemain, ni d'emmener Bigard chez le Pape, ni de nommer son fils à la Défense, ni de "casser les pauvres cons".» 
Hypocrisie (2)
S'ils se déchirent allègrement sur la modernité du processus, tous les responsables de la majorité sont au moins d'accord pour répéter l'argumentaire présidentiel: il n'est pas question d'organiser de primaires à l'UMP puisque le président sortant est le candidat naturel. Jean-François Copé est même allé jusqu'à comparer la situation française avec l'exemple américain: là-bas, le parti démocrate n'a organisé aucune primaire.
Seulement voilà, aux Etats-Unis, Barack Obama est candidat. Il l'a dit même très tôt, dès le printemps dernier, pour lever des fonds en masse. Or en France, on nous répète à l'inverse que Nicolas Sarkozy n'a pas pris sa décision. On nous fait croire qu'il travaillera jusqu'à la dernière minute à son immense charge. On sait bien qu'il est en campagne, qu'il n'a quasiment jamais cessé de l'être depuis ses premiers échecs électoraux, au printemps 2008. Mais chut... Brice Hortefeux, son conseiller officieux qui se verrait bien directeur de campagne l'an prochain, expliquait ainsi mardi dernier dans le Grand Journal de CANAL+ que le Monarque devait se consacrer à sa tâche au moins jusqu'en janvier.
Et si Sarkozy ne se représentait pas... l'UMP aurait-elle le temps d'organiser des primaires que d'aucuns même à droite jugent moderne ? Evidemment non. La manoeuvre serait dangereuse - afficher des divisions internes à quelques semaines d'un scrutin.
Quelle hypocrisie.
Déchirements
A droite, on se déchire, un symptôme bien connus des fins de règne. Tout est prétexte, et même les primaires socialistes. François Fillon avait jugé le procédé « moderne », il y a 10 jours. Vendredi dernier, Chantal Jouano sénatrice UMP de Paris, avait renchéri: « C'est une bonne nouvelle de voir les Français s'intéresser à la politique, c'est une bonne nouvelle de voir des débats de fond ». La veille, Jean-François Copé avait raillé les propos de Fillon: « les primaires, c'est de gauche, donc c'est moderne ». Et paf ! On croyait pourtant que les frères ennemis Fillon/Copé avaient fait un pacte Paris : au premier, l'UMP au second. Et en 2017, primaires à droite !
Mardi, François Fillon a effectivement confirmé qu'il serait candidat aux élections législatives de juin prochain... à Paris. Rachida Dati n'a pas apprécié. Le premier ministre vise « sa » circonscription (ou plutôt, celle qu'elle ambitionne de conquérir), une zone sans risque au coeur de la bourgeoisie parisienne.
On se dispute aussi parce qu'il n'y a plus de leader. Depuis des mois, Sarkozy ne tient plus son camp. Il a toujours quelques ultra-fans, tels Nadine Morano ou Eric Besson, jamais  l'abri d'éloges caricaturales. Mais pour le reste, il n'y a plus aucun(e) candidat(e). Comme d'autres en leur temps, Nicolas Sarkozy a tué la concurrence. Il a « débranché » un à un ses rivaux potentiels ou avérés. Dominique de Villepin ne s'est pas remis par 4 ans de procès Clearstream. L'été dernier, il a jeté l'éponge et même son propre parti. Jean-Louis Borloo n'a pas eu le courage ni l'efficacité pour tenir son ambition présidentielle au-delà de septembre. François Fillon a préféré Matignon. Alain Juppé a été recruté à la Défense puis les Affaires Etrangères. Sarkozy a également calmé la jeune garde: Jean-François Copé a récupéré l'UMP. François Baroin et Bruno Le Maire sont devenus les chouchous du Palais.
Si Sarkozy n'est pas candidat, la droite perdra l'élection présidentielle de 2012.
Et le programme ?
Autre élément de langage préparé contre la primaire socialiste, le programme socialiste fut l'objet d'attaques bien concertées après le débat d'entre deux-tours, mercredi, entre Martine Aubry et François Hollande: « des idées des années 1990 » répétèrent successivement Bruno Le Maire, Xavier Bertrand et Jean-François Copé.
Mais à l'UMP, où est le programme ? Nicolas Sarkozy avait confié qu'il valait mieux faire campagne sur le caractère que les idées.
Il a tout fait pour retarder l'adoption du programme UMP pour les scrutins présidentiel et législatifs de l'an prochain. L'an dernier, Laurent Wauquiez et Nathalie Koscisuko-Morizet avaient été chargés d'y travailler. Sans attendre leur riche production, la tâche fut ensuite confiée à l'ancien villepiniste Bruno Le Maire. En août dernier, le Figaro nous dévoilait quelques propositions en avant-première. Des propositions que Sarkozy bloqua. Interdiction d'en parler lors du déchirant Campus UMP de septembre, à Marseille. Le projet est reporté aux calendes grecques, peut-être Noël. Et encore... Valérie Rosso-Debord, autre Sarkolâtre, avait confié qu'il n'engageait pas le président... Un projet... pour rien.
Un candidat qui se cache, un parti désorganisé, un programme ajourné... Quelle réussite !