Dieu merci, les fashion weeks et leur lot de zombies tous plus insipides les uns que les autres, C'EST FINI ! Ça fait longtemps qu'à la rédac, on n’avait pas été aussi circonspects : – Bon, les filles ! Sortez de votre coma, va bien falloir qu'on trouve un truc à raconter !– Non mais sérieux, qu'est-ce que tu veux qu'on raconte ? C'est autant appétissant qu'un voyage presse à Auschwitz… C'est vrai que ce n'était pas très folklorique, cette saison ! Même nos valeurs sûres ont eu une créativité aussi fertile qu'une gamine de six ans qui joue à « Dessinons la mode ». Bon, ne soyons pas vaches, chez Kenzo, Carol Lim et Umberto Leon ont quand même bien réussi leur pari de re-vampiriser une femme qui s'étouffait depuis bien trop longtemps dans un amoncellement de couleurs et d'imprimés. Un vent de modernité bien particulier souffle pour dépoussiérer la maison, et ce n’est pas de refus. Chez les amerloques, on a toujours lesProenza en majestueux joueurs du kitsch-hip et Jason Wu qui nous auréole d'un glamour-sexy mais légèrement trop Madame… à suivre, et puis si ! Y’a aussi Le petit Altuzarra, Joseph de son prénom, qui réussit un brillant mix d'imprimés et d'attitudes sages mais bon, des fois, c'est quand même un peu trop "Californie mon amour", soit : "Chéri, calme-toi sur les matières dégueu". De toute façon, on n’arrive pas vraiment à définir si on est vraiment amoureux de ses collections ou si on le fait croire pour qu'il vienne visiter nos culottes. Il n'est pas nécessaire de parler de Milan, hein, on va éviter de saloper notre clavier de vomi, c'est habituel, donc, bon… Quant à Paris, eh bien… comment dire ? Euh… en fait, il y a deux Paris ! Il y a le Paris Bernardo Nono et sa merde commerciale qui va juste permettre de creuser encore un peu plus le trou de la Sécu tellement on a besoin d'antidépresseurs pour ne pas se tirer une balle ; et puis, il y a le Paris qui s'est mis un bon gros coup de pied au cul. Ce Paris-là est relayé - Alléluia! - par la presse internationale. Ils s'appellent : Jean-Paul Lespagnard en tête avec une Suzy Menkes amoureuse, Dévastée, Mal-aimée et notre bébé prodige survitaminé, alias Jacquemus.
C'est sur son cas qu'on va se pencher. Cas intéressant. Jurisprudence à l'école des avocats de la création. Jacquemus a créé une image de marque basé sur l'apologie du basique et de la fille simple qui se promène les cheveux au vent en achetant ses poireaux au marché bio. Nonchalante, elle emmerde la tendance et veut remplir ses placards d'une sobriété mode qui la rend unique et pourtant singulière d'une créativité assumée jusqu'au bout de son vernis transparent Guerlain. Pour sa quatrième collection (déjà!) prêt-à-porter, sous le nom de "Chenil", il propose cette patte, sa signature, soit une avalanche d'uniforme travaillés dans une matière unique (à savoir le lin cette fois, a contrario de la laine bouillie pour la saison dernière) avec dans le rôle-titre, une Caroline de Maigret plus nature qu'une Jane Birkin époque innocence pré Gainsbourg. Ça lui va bien, c'est son truc, à Simon, et ON AIME cette simplicité étudiée. Ça sent ses origines. Ça sent le vrai.
Pour l'été, chez Jacquemus, on ne s'emmerde pas, on va seule prendre des bains de soleil dans les calanques avec un bouquin en mangeant un sandwich végé mozza imbibé d'huile d'olive. La femme Jacquemus pue le soleil, elle rayonne d'une innocence au ralenti comme si le farniente, le vent et le sel marin de la Méditerranée étaient ses seuls produits cosmétiques pour un bien-être absolu. On adore parce que ça faisait bien bien longtemps qu'une femme n'avait pas été d'une si simple élégance, sans délires dramatiques. On a peut-être un peu trop tendance à oublier que la beauté féminine se suffit souvent à elle-même: Il en fait la preuve vivante. Il n'y a besoin de rien d'autre, c'est suffisant et efficace ; même les garçons avec les versions courtes se verraient bien dotés d'une pureté pas guindée pour un sou qui ne leur ferait pas de mal. En plus, ça fait plaisir de s'approprier les fantasmes d'un designer dans la vingtaine qui y croit dur comme fer et qui se permet de foutre autant le bordel lors de la fashion nightout (cf. : La mode ! La mode ! La mode !). Ses vêtements prennent une tout autre âme, penchant rébellion tranquille mais pas inutile.
Le seul bémol dans cette histoire, c'est que deux collections, ça va ! Mais inventer du basique pendant les dix prochaines années, ça va être compliqué. Connaissant la nouvelle génération de modasses, on se demande si celle-ci ne va pas vite se lasser, préférant le catégoriser de "buzz" plus qu'autre chose. Alors on suit, on soutient et on se met direct au sandwich végé en attendant fermement la prochaine révolution. Bien à vous.