Duo Brassens Einstein : Fête de la Science ?
« En l’espace d’une nuit, l’impensable devenait l’évidence.»
Après André Gorz, quoi de plus naturel que d’évoquer Ivan Illich. La Convivialité a vieilli car le ton est catastrophiste et noir au possible. On peut même lui reprocher de dépeindre la société avec un parti pris négatif injustifié.
Mais paradoxalement, La Convivialité n’a pas pris une ride ! En relisant les pages sur la chute de Wall Street, en pleine agitation d’Indignés, on se surprend à se dire que le grand soir (ou plutôt la petite nuit… et surtout le petit matin !) sont à portée.
Entendons-nous bien ! Plus personne ne croit au Grand Soir. Le Grand Soir, c’est la version eschatologique des idéalistes. Être idéaliste pourquoi pas ! Mais croire à la possibilité d’un achèvement, c’est navrant de naïveté.
Même Nicolas Hulot parle de grande mutation. C’est à dire de mouvement.
Bref, d’accord avec Illich que les renversement de situation passent du domaine de l’impensable à celui de l’évidence… après coup. Mais une nuit n’y suffira pas !
Titre anglais ou français...
Quoiqu’il en soit, sa dénonciation de notre course effrénée au mieux-être touche juste. Nous nous écartons sensiblement du bien-être par cette fuite en avant qui, d’ailleurs, confond mieux et plus.
Cela m’a rappelé ce calcul d’un lecteur du journal La Décroissance. Il observait que l’avion solaire Solar Impulse, le prototype de l’explorateur Bertrand Piccard, avait relié Bruxelles à Paris en 16 heures et 5 minutes. Soit une vitesse moyenne de 16 km/h.
Autant y aller en vélo…
Le sarcasme est facile et on m’opposera à raison que la science progresse aussi avec ce genre de fantaisie. D’ailleurs c’est la Fête de la Science ces jours-ci.
Mais de quelle Science parle-t-on ?
Le décalage est bien là. Si l’on s’évertue à vouloir rendre festive la science, c’est bien parce qu’elle ne promet plus des jours meilleurs.
Ah si ! On peaufine les gadgets pour entretenir notre besoin de besoins artificiels (je me demande d’ailleurs si ce besoin de besoins n’a pas lui même été créé…).
Un autre explorateur de l'absurde
Ah si ! On développe à tout va des bases de données pour câbler intelligemment le monde. Télé, ordinateur, smartphone, chaine hi-fi, interrupteur, ouverture de porte, etc. Tout doit avoir un numéro unique pour répertorier, faire des statistiques et étudier les interactions. Le cheptel humain suivra aussi mais d’une certaine manière, téléphone portable et passeport devraient fusionner.
Ah si, enfin ! Il faut fêter la Science qui va nous permettre de détecter, mesurer et évaluer in fine la nocivité des différentes émissions. Sans la science, pas de nouveaux matériaux plus sains et plus écologiques pour remplacer les vieux plastiques avec BPA, les crèmes gorgées de phtalates (phthalates en anglais), les poêles en Téflon, etc.
Bien sûr, le bois, le verre et l’inox suffisent. Bien sûr de l’huile végétale et un peu d’huile essentielle font l’affaire. Et bien sûr on pourrait cuisiner à la fonte et avec un peu d’huile d’olive…
Mais il faut faire bien faire de la Science. Parce que la Science n’est plus possible sans croissance et études marketing. Et que la croissance n’est plus possible sans innovation et obsolescence programmée.
Rassurons-nous, l’actualité nous montre que la Science décomplexée existe encore. Au CERN par exemple, où la découverte probable de particules contredisent le grand Einstein, en se permettant des excès de vitesse. Plus rapide que la lumière. Un siècle de théorie prête à s’éffondrer.
« En l’espace d’une nuit, l’impensable devenait l’évidence« .