On le connaît très peu en France. Cependant ses Œuvres complètes ont été publiées avec une postface de Renaud Ego, critique d'art et de littérature, né en 1963, collaborateur à plusieurs revues, lui-même poète, romancier, essayiste français ayant séjourné au Japon, en Inde, en Afghanistan, où il a appris "la valeur de la distance et du dehors". Voici ce que je retiendrai de ce qu'il dit du Prix Nobel ICI (source Rfi.fr) Tout d'abord,il faut se dire que l'œuvre du poète est close depuis 1990, date de son accident vasculaire cérébral.
Tranströmer est l’homme du souffle, mais sans emphase. Sa poésie est sobre, mesurée, précise. C’est un très grand musicien de la langue. Et musicien tout court. En parfait connaisseur de la musique contemporaine, il sait que le temps des symphonies est désormais révolu. Le souffle symphonique qui implique une confiance absolue dans l’Histoire, comment le retrouver quand on a été contemporain des horreurs de la Seconde Guerre mondiale ? En revanche, il y a une vraie justesse dans la tonalité de la poésie de Tranströmer, une justesse qui est aussi un parti pris éthique. Tout le génie de ce poète est d’avoir su en faire une esthétique. La poésie de Tranströmer se caractérise par son souci d’être attentif au plus simple, au plus immédiat de l’expérience. C'est la poésie de l'infra réel. Or, le réalisme de Tranströmer qui décrit le réel dans toute sa banalité - un motel au bord de l’autoroute, la pluie qui martèle le dessus des voitures, un homme qui se rase le matin devant la fenêtre ouverte - est empreint de l’incertitude qui pèse sur les choses. Sa poésie procède de la conscience que le monde objectif en soi n’existe pas. C’est l’observation qui crée la réalité. Le réel surgit à travers nos perceptions subjectives qui sont autant de situations rendant possibles la rencontre entre l’être et le monde. Chacun des poèmes de Tranströmer est une mise en scène de cette rencontre à la fois fondamentale et transitoire.
Les principales caractéristiques de son écriture sont les images et les métaphores mais elle est en même temps d’une très grande exactitude. Sa poésie procède aussi par ellipses, par silences qui ne sont pas des ruptures de sens mais des articulations, des tunnels de passage entre l’extérieur et l’intérieur. Cette manière d’utiliser le souffle de l’intervalle comme un lien rappelle la poésie chinoise ou japonaise. Ce n’est pas par hasard que Tranströmer a aussi écrit des haïkus.La poésie singulière de Tranströmer est habitée par un sentiment cosmique de l’existence (Photo: Renaud Ego)