L’amateur de cinéma coréen que je suis est toujours heureux lorsque l’automne pointe le bout de son nez. Car si les sorties de films coréens se sont faites rares dans les salles françaises le reste de l’année, comme cela a été le cas en 2011 avec seulement trois longs-métrages à se mettre sous la dent (Ha Ha Ha, J’ai rencontré le Diable et The Murderer), le Festival Franco-Coréen du Film rectifie le tir et nous offre huit jours durant un panorama éclectique de ce que mijotent les cinéastes sous le 38ème parallèle.
Cette année, le FFCF nous arrive plus tôt (merci Père Noël), alors réveillez-vous car si vous n’étiez pas encore au courant, la sixième édition du seul festival de films coréens de Paris a débuté hier soir avec, excusez du peu, le film qui jusqu’à il y a encore quelques jours était le champion 2011 du Box-office coréen, Sunny (il vient de se faire doubler de quelques entrées par Arrow - The Ultimate Weapon, plus de 7.3 millions de spectateurs chacun, tout de même).
Le lieu des festivités a changé, adieu l’Action Christine, bonjour le Saint-André des Arts (les connaisseurs remarqueront que le déménagement n’est pas trop dépaysant). Dès 19h, d’assidus amateurs s’alignaient déjà devant le cinéma afin d’acheter un billet pour la cérémonie d’ouverture. Dans cette petite rue perpendiculaire à la rue Saint-André des Arts, finalement, la rue était à nous, les coréanophiles. Entre les spectateurs attendant de pouvoir acheter leurs places, les invités, les accrédités, et bien sûr les membres du staff, l’atmosphère du festival s’est vite mise en place. Des connaissances retrouvées, des amis croisés, de nouvelles têtes pour des signatures connues, ce premier soir au FFCF – pour les intimes - avait le goût de retrouvailles agréables, en attendant que les portes du cinéma ne s’ouvrent à nous. Le film du soir ne pouvait donc mieux tomber.
De mon septième rang, j’ai vu devant moi se lever l’un après l’autre les invités de la soirée, parmi lesquels l’Ambassadeur de Corée du Sud à Paris et le réalisateur du film lui-même, Kang Hyeong Cheol, chacun venu se fendre d’un petit discours devant la salle. Deux personnes qui donnent du standing à ce festival qui à l’évidence après cette première soirée montre toujours plus d’ambition, et l’on guettera dans les prochains jours si les spectateurs parisiens répondent présent à cet appel plus audible que jamais.
En attendant, les stars de la soirée étaient sur l’écran hier, sept amies qui de nos jours se sont perdues de vue, près de 30 ans après leurs années collèges. Lorsque l’une d’elles se retrouve à l’hôpital avec un pied dans la tombe, les souvenirs de leur jeunesse vont revenir à la surface tandis qu’elles vont chercher à toutes se réunir une dernière fois. Un film comme Sunny en ouverture du Festival Franco-Coréen du Film, c’est l’occasion assez rare de voir sur grand écran un exemple de cinéma populaire coréen quand les spectateurs français que nous sommes ont plutôt l’habitude de voir le cinéma coréen soit par son versant noir comme l’encre, soit par son versant art et essai (voire les deux en même temps).
Alors à quoi ressemble donc un film qui a fait plus de sept millions d’entrées en Corée ? Parfois un peu à n’importe quoi, certes, car entre le va-et-vient constant entre les époques, l’humour quasiment parodique et les bons sentiments nostalgiques, Sunny s’éparpille beaucoup. Ce sont surtout les bons sentiments un peu trop dégoulinants qui ont tendance à se faire trop voyant, même si ce n’est pas une surprise lorsqu’il est posé dès le départ que l’un des personnages se meurt d’un cancer et que ses copines vont tenter de se réunir auprès d’elle une dernière fois. Avec ce point de départ, difficile d’être surpris par le pathos. Mais finalement, cela ne gâche en rien le film. Après tout, cela fait presque partie intégrante de ce genre d’épopée amicale entre deux époques, souvent l’occasion de souligner le temps qui passe et la désillusion des rêves d’enfance non exaucés (c’est exactement le cas ici).
La bonne humeur du film parvient à prendre le pas sur ses exagérations sentimentalistes. On l’aime cette bande de copines grandissant en révérant l’amitié et en faisant les 400 coups ensemble, avec leurs caractères exacerbés et leur humour explosif. Elles s’éclatent et nous avec, autant dans leur jeunesse 80’s bercée de tubes de l’époque (le plus étonnant dans le film reste probablement les clins d’œil assumés à La Boum de Claude Pinoteau, l’héroïne se prenant assez nettement pour la Vicky de Sophie Marceau et le tube « Reality » résonnant plus d’une fois…) qu’aujourd’hui, quadras plus amères qui se découvrent une seconde jeunesse et constatent que malgré les époques et les régimes qui diffèrent, la jeunesse reste la jeunesse.
La joie est suffisamment présente dans Sunny pour qu’on en sorte avec le sourire et qu’on lui pardonne ses excès de guimauve, qui finalement fait aussi partie du charme du film. C’est cela aussi, un panorama éclectique du cinéma coréen, et c’est ce que nous a promis le Festival Franco-Coréen du Film pour cette sixième édition. Alors autant lâcher les violons d’entrée, et réunir le public autour d’un film populaire, comme l’avait déjà fait dans un genre plus musclé The Man from Nowhere l’an passé.Voilà, le FFCF 2011 est lancé. Prochain film au programme, un documentaire sur l’homosexualité... Vous avez dit grand écart ?