Photographies 1 et 2 : 'Le lever des grisettes'. Estampe d'époque 1802-1812. © Photographies LM. Un autre
exemple est ici. Celle-ci a un pendant : Le coucher des grisettes.
J'ai plusieurs fois dit dans ce blog que j'allais faire des articles sur les petites mains de la mode
française dont elles sont une partie intégrante et importante. Je suis donc heureux de constater que du 14 octobre 2011 au 15 janvier 2012, la Maison de Balzac à Paris accueille une exposition
intitulée : Elle coud, elle court, la Grisette... « Une centaine d’œuvres de toute nature (peintures, caricatures, faïences, livres et journaux illustrés, partitions,
échantillons d’étoffe) sont réunies en un parcours décliné suivant cinq thèmes, au cœur de la représentation de la grisette au temps de Balzac (1815-1850). Pour chaque section, des chansons de la
première moitié du XIXe siècle, spécialement sélectionnées pour le parcours, ont été interprétées par Le Hall de la chanson, et font l’objet d’une diffusion sous des bonnets ou chapeaux
sonores. I – La grisette en conditions II – Constellation grisette III – À quoi reconnaît-on une grisette ? IV – Les plaisirs et les jours… et les nuits ! V – Fil et profils : du
trottin à la passante. »
Photographie 3 : Livret d’époque 1838 d’une pièce de théâtre intitulée Un Bal de grisettes. Vaudeville en un acte
(Paris). © Photographie LM.
Photographie 4 : Illustration intitulée « La grisette » du chapitre LXIV
« Les grisettes et les lorettes » de Tableau de Paris d'Edmond Texier de 1853 (tome second). © Photographie LM.
La GRISETTE est un personnage important de la mode française. Depuis le XVIIe siècle des textes relatent
la beauté des couturières, vendeuses et autres petites mains de la mode dans ce quartier du bon goût qui entoure le Palais-Royal. Si leur vie à Paris est celle de travailleuses à bas salaires,
elles y trouvent une certaine liberté, de l'espoir d'ascension sociale parfois réalisée, et pour les plus belles peuvent jouir de la galanterie de la capitale française où tous aiment à
badiner.
Dès 1797, année de sa fondation, le Journal des Dames et des Modes rend hommage à la grisette
dans sa planche n°33 : « Costume parisien. Grisette en négligé du matin, faisant sa provision au marché des Quinze-Vingts » (Voir ici cette estampe).
Il existe plusieurs estampes de dames représentées de cette manière comme ici : Femme de qualité en grisette (1683), ou ici
: La Grisette (1776).
Voici des représentations de grisettes au XIXe siècle : Les grisettes de Paris
(1856) ; dessin à la plume, encre brune et aquarelle de Constantin Guys
(1802-1892) intitulée Grisette au tablier
jaune.
Au XVIIIe siècle on emploie surtout le nom de 'grisette' pour signifier de jolies petites mains : des ouvrières
souvent employées dans la mode. Jeunes, sans fards, assez pauvres, elles peuvent avoir
une réelle vénusté. Et même si certaines élégantes du XVIIIe et avant font œuvre d’un raffinement extrême, la beauté
brute n’est jamais méprisée en France, au contraire (comme en témoigne le goût pour les pastorales) et cela de tous temps. Cependant ce nom au XVIIIe siècle garde une signification liée à une
condition médiocre ; et il faut attendre l'édition de 1832-5 du Dictionnaire de L'Académie française pour que soit ajoutée à cette définition celle « d'Une jeune ouvrière coquette
et galante » : « se dit aussi d'Une jeune fille ou d'une jeune femme de médiocre condition ; et, plus particulièrement, d'Une jeune ouvrière coquette et galante. Il n'y avait que
des grisettes à ce bal. Il ne voit que des grisettes. Ce sens est familier. » Le terme désigne souvent des ouvrières ou employées de maisons de modes et de beautés, gracieuses
et se laissant courtiser assez facilement : « couturières, modistes, fleuristes ou lingères, enfin tous ces gentils minois en cheveux, chapeaux, bonnets, tabliers à poches, et situés en
magasins » (Balzac, Œuvres div., t. 2, 1831, p. 277). « Quand la grisette assise, une aiguille à la main, Soupire, et de côté regardant le chemin, Voudrait aller cueillir des
fleurs au lieu de coudre » (Hugo, Châtim., 1853, p. 347). La grisette est un personnage coutumier de la littérature de la première moitié du
XIXe siècle : pièces (comédies, vaudevilles …), opérettes, romans, chansons … la mettent en scène. Mais ce mot
est petit à petit remplacé par d'autres sans doute du fait de sa connotation péjorative : 'grise'.
Photographie : Carte postale semblant avoir un tampon de La Poste de 1905 d'une série
intitulée « Comment ils déjeunent » avec ici « IV. Le trottin. » © Photographie LM.
Comme son nom l’indique, la COUSETTE est employée dans les maisons de couture.
Le TROTTIN désigne plus que des petites-mains de la mode : des petits pieds qui
« trottent » dans Paris entre clients et marchands … avec des boîtes à chapeaux sous le bras ou d'autres parures de mode. Le terme est ancien. Au XVIe siècle on appelle
« trottins » les « pieds ». Au XVIIe on désigne ainsi un petit laquais ou petit commis qui fait les courses ou le coursier, puis au XIXe siècle aussi une apprentie ou
jeune ouvrière modiste, couturière ou autre chargée de faire les courses et des livraisons. Ce terme est encore employé dans la première moitié du XXe siècle. On utilise aussi les mots de
trottin' et 'griset' pour désigner les équivalents masculins.
Photographie : Estampe du XIXe siècle signée Ferocio et Birouste intitulée :
« Le griset du Midi. » © Photographie LM.
© Article LM