LES CONDITIONS REQUISES POUR ACCUEILLIR UN ENFANT POURRAIENT ÊTRE HOMOGÉNÉISÉES. JEAN-MARIE COLOMBANI VA REMETTRE SES TRENTE PROPOSITIONS.
Alors que la demande des familles est de plus en plus forte, les chiffres de l'adoption ne cessent de décroître : seuls 3 162 enfants étrangers ont été adoptés par des Français en 2007 contre 3 977 en 2006, soit une baisse de 20,5 %. Un paradoxe encore plus frappant quand on confronte le total des adoptions l'an passé, 3 800 (compte tenu des quelque 700 adoptions en France), aux 8 000 agréments attribués la même année. Autrement dit, moins de la moitié des couples qui détiennent un agrément se voient confier un enfant. Et il y aurait aujourd'hui pas moins de 35 000 agréments en cours de validité.
Un problème de taille qui soulève la question des conditions d'attribution de l'agrément. Pourquoi les conseils généraux, qui les délivrent, ne comptabilisent que 10 % de refus, se demandent certains spécialistes qui parlent d'«une spécificité française». Sans doute parce qu'ils ne disposent pas de critères d'attribution objectifs. En effet, si la récente loi de 2005 a uniformisé le formulaire administratif d'agrément en imposant le même sur tout le territoire, «elle n'a pas touché au fond», relève la responsable en matière d'adoption d'un conseil général du sud de la France. «Cent départements, cent façons de faire de l'adoption ! Il faut homogénéiser tout ça», constate Raphaëlle Cavalier, la responsable de l'unité adoption et droits de l'enfant au département du Nord. « Car ce n'est pas normal que des adoptants soient différemment traités selon qu'ils sont à Paris ou à Châteauroux.» «Objectiver» les critères de l'agrément, c'est précisément l'une des pistes majeures de la réflexion de l'ex-directeur du journal Le Monde, Jean-Marie Colombani, qui, chargé de mission par le président de la République en novembre dernier, doit livrer un rapport assorti de 30 propositions pour redynamiser l'adoption.
Imposer une limite d'âge
Entre autres redéfinitions, comme la détermination du nombre d'entretiens obligatoires des adoptants avec un psychologue, actuellement variable selon les régions, il serait question d'imposer une limite maximale à l'écart d'âge entre l'adoptant et l'enfant. «On voit trop d'abus», confie Raphaëlle Cavalier, qui a récemment retoqué la demande d'un homme de 74 ans. «Rien ne l'interdisant dans la loi, nous avons dû biaiser pour justifier ce refus», regrette-t-elle. En France, 15 % des adoptions sont faites par des gens de 50 ans et plus. Un pourcentage fort qui s'explique par la longueur des parcours médicaux pour traiter la stérilité des couples. Plus radicale, la Suède, elle, est en train de fixer une limite d'âge à 42 ans pour adopter. Surtout, «il est capital d'informer les adoptants», demandent expressément nombre de conseils généraux. «L'adoption est souvent idéalisée, trop de familles ignorent sa réalité, les besoins, les spécificités et les difficultés de l'enfant adopté», souligne Raphaëlle Cavalier. Une demande que pourrait bien retenir le rapport présenté par l'ex-président du di-rectoire de la SA Le Monde, qui veut par ailleurs favoriser l'adoption des pupilles de la nation pour regonfler les chiffres de l'adoption. En effet, seuls 800 petits Français ont été ado-ptés l'an dernier alors que nombre des 140 000 qui végètent dans des placements longue durée de l'Aide sociale à l'enfance pourraient l'être.