Après avoir travaillé dans le monde du tourisme et comme fleuriste, la décoratrice d'intérieur Patricia François a monté son entreprise il y a trois ans, soucieuse de travailler de la façon la plus écologique possible.
- Le salon Maison et Objets a fermé ses portes il y a peu de temps à Paris. L'éco-design et les tendances " natures " sont-elles toujours à la mode ?
Oui, de plus en plus. Il y a trois ans, leur présence était sporadique. Quelques stands affichaient la couleur. Désormais, de jeunes designers vont naturellement vers l'écologie. D'autres marques choisissent l'option " green " juste pour une collection. Mais je me dis que ces démarches sont tout de même positives. Et j'ai moins de moins de mal à dénicher des meubles pour la décoration qui répondent à des critères écologiques tout en ayant un design attirant. - La tendance actuelle préfigure-t-elle une offre de plus en plus large de matériaux et objets de décoration sains (à l'image des produits biologiques alimentaires) ?
Oui, clairement, nous assistons à une prise de conscience. Il n'y a que quelques années encore, cette tendance n'était vraiment qu'anecdotique. Ce n'est plus le cas. Et les pouvoirs publics s'y sont intéressés, enfin : en janvier 2012, il faudra afficher les caractéristiques sanitaires des produits de décoration, ce qui renseignera le consommateur sur les degrés d'émissivité de COV. En outre, on voit de plus en plus d'articles soulignant le problème de la pollution intérieure (supérieure à la pollution extérieure, même à Paris!). Les gens s'en préoccupent.
Et je le vois à travers la clientèle. Avant il n'y avait que l'esthétique ou le côté pratique qui comptaient, désormais les gens prennent conscience des autres aspects de ce qui fait leur intérieur. - Quels sont les dernières innovations écologiques dans ce secteur ?
De nombreux matériaux composites se développent, des matériaux recyclés. On va également bientôt me présenter une moquette bio ! Je pense également à Omexco, un fabricant belge de revêtements muraux écologiques, qui se posent comme du papier peint. Sur le salon, j'ai beaucoup aimé le concept de cloisons mobiles (Serastone), en plastique recyclé. Des jardinières peuvent être insérées.
C'est peut être dans le domaine des meubles, surtout des canapés et fauteuils que j'ai le plus de mal à trouver. Les fabricants ne se préoccupent pas particulièrement des composants de leur mousse et de leurs tissus. Il y a des marques très engagées comme GreenSofa, mais avec un design qui ne s'intègre pas à tous les intérieurs. Au total, il y en a peu. - Les produits éco-responsables sont-ils plus chers que les autres ?
On peut travailler avec des budgets très différents. Si on a un budget " Ikea ", il faut sélectionner les produits les plus adaptés (en bois massif, ou en matières naturelles). J'ai choisi pour un client une penderie But, en bois massif et rotin. Ce qui peut coûter très cher, c'est quand des designers créent. Mais il faut distinguer pourquoi c'est cher : est-ce le design ou côté pièce unique, ou est-ce en raison de matériaux très nobles ? Mais c'est tout de même plus facile de trouver des produits éco-responsables aujourd'hui. - Y a-t-il des marques éco-responsables que vous pourriez conseiller à nos lecteurs ?
J'aime travailler avec les peintures Biofa qui sont bio. Du côté des meubles, j'ai découvert Pyrenea, un groupement de designers du Sud-ouest qui travaillent de façon très intéressante. Il est possible aujourd'hui de marier écologie, design et modernité. - Quels sont pour vous les critères les plus importants pour un habitat écologique ?
Les peintures et les sols, car ils représentent de grandes surfaces et peuvent libérer une grande quantité de substances chimiques s'ils ne sont pas écologiques. Et cela pendant des mois, voire des années ! - Quelques conseils pourriez-vous donner aux lecteurs soucieux de leur habitat ?
Après avoir cerné son style et son budget, il faut faire attention aux produits que l'on achète, lire les étiquettes. On peut commencer par relooker des meubles, un petit coup de peinture et cela change un intérieur ! C'est écologique, comme de faire les vide-greniers ! Autrement, toujours réfléchir : quand on veut changer de tapis, choisir plutôt un tapis 100% laine, avec un dessous en latex, une matière naturelle. Et vérifier où il a été fabriqué. Si on veut un parquet mais qu'on n'a pas le budget pour un parquet massif, pourquoi ne pas choisir un vrai linoleum (latex et résine) qui peut apporter une touche très moderne ? Les parquets flottants en aggloméré contiennent en général des colles et vernis nocifs.
Pour les rideaux, on peut opter pour des matières naturelles comme le lin, le chanvre.
Au niveau des éclairages, il y a beaucoup d'évolution. Les LED permettent soit de réaliser des éclairages directionnels, soit d'ambiance. On peut insérer un bandeau lumineux, un ruban... installer des petites lumières à l'intérieur d'une cheminée, etc.
Même si c'est difficile de trouver un produit 100% écologique, car c'est une démarche globale (qui doit prendre en compte la composition, la fabrication, le transport et la recyclabilité), c'est un secteur en plein développement.
Retrouver les coordonnées et l'univers de Patricia François sur www.deco-ecologique.com
Patricia François est en outre partenaire de GreenProperty, une société immobilière innovante, créée par Anissa Bouhalassa, qui en plus des transactions immobilières, réalise du conseil en développement durable lié à l'habitat et de l'assistance aux travaux.
Propos recueillis par Caroline Chavigny