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Dario Argento: Suspiria & Phenomena

Par Geouf

Suspiria (1977)

Suspiria - affiche

Sans doute désireux de passer à autre chose (certains disent sous l’impulsion de Daria Nicolodi), le réalisateur italien décide de se frotter au fantastique pur et dur, tout en gardant les codes cinématographiques qu’il a établi pour le giallo lors des scènes de meurtres. Mais dès le début du film, on se doute déjà que l’ambiance sera différente, et que cette fois, des forces maléfiques sont à l’oeuvre. Tout semble partir d’une académie de danse, où débarque une américaine (Jessica Harper) par une nuit de grande tempête. L’accueil est loin d’être agréable et les premiers jours seront difficiles, surtout à cause d’un meurtre par pendaison particulièrement macabre. Une présence malsaine qui plane dans l’air n’arrange pas les choses. Et pour cause, cette académie est en fait l’antre d’une sorcière! Et ils sont assez rares, les films de sorcières qui en valent la peine! S’inspirant d’un ouvrage de Thomas De Quincey, Suspiria de Profundis, et plus précisément de l’essai Levana and Our Ladies of Sorrow, où l’on retrouve la notion des trois mères: Mater Lachrymarum, Mater Suspiriorum, et Mater Tenebrarum. Argento en a fait des sorcières immortelles, et commence sa trilogie avec Mater Suspiriorum.

Suspiria - snap2

La première chose qui me vient à l’esprit pour parler du film concerne la beauté fulgurante du long-métrage. Pour un « simple » film de genre, le soin apporté aux décors, à la lumière, aux angles de prises de vue est tout simplement une (la?) référence dans le cinéma d’horreur. Une simple école de danse devient un endroit suffocant, avec son lot de pièces interdites et de professeurs inquiétants. Malgré une actrice principale un peu pâlotte, Argento ne lâche pas d’une semelle le spectateur, qui ne veut savoir qu’une seule chose: « Mais qu’est-ce qu’il se passe dans cette école, bordel de merde?!? ». Tout l’art de confronter une enquête de type policière à une chasse aux sorcières qui vire souvent à l’onirisme

Suspiria - snap1

Evidemment, la musique des Goblins joue un rôle presqu’aussi important que la mise en scène, et la comptine macabre relève de quelques crans un suspense déjà bien tendu. Il y a malgré tout quelques passages plus calmes où un petit ennui pointe discrètement le bout de son nez, mais je chipote, car il s’agit bien ici d’un des meilleurs films du maestro. Il est d’ailleurs assez difficile de dire pourquoi exactement, et je dois bien avouer toute ma difficulté à décortiquer ce film. Sans doute parce que l’expérience est plus sensorielle que la majorité des films. Suspiria enchante nos yeux et nos oreilles et laisse une empreinte indélébile dans notre subconscient. De la sorcellerie, vous dites?

Verdict: 9/10

Phenomena (1985)

Phenomena - Jaquette

Jennifer (Jennifer Connelly, ca tombe bien, non?), la fille d’un acteur célèbre, vient de poser ses valises dans un collège huppé en Suisse. Ca n’est déjà pas facile de s’intégrer dans une nouvelle école, il faut en plus que Jennifer soit « différente ». Non seulement elle a des crises de somnambulisme (pas trop grave en soi) mais elle a également un don spécial: celui de communiquer avec les insectes! Autant dire que si le début fait légèrement penser à Suspiria, la suite nous fait demander si Argento est bien derrière les manettes! Cela dit, l’italien n’est pas à un grain de folie près et injecte tout ce qui est nécessaire pour qu’on se retrouve en terrain connu: un mystérieux tueur sévit dans les environs et ce sont les jeunes élèves de l’école qui vont en pâtir, notamment la copine de chambrée de Jennifer. Deux inspecteurs arrivent sur les lieux (l’excellent acteur belge Patrick Bauchau et une vieille connaissance en la personne de Michele Soavi) pour débusquer l’assassin mais les résultats se font attendre. Grâce à ses amis insectes, Jennifer décide de mener l’enquête de son côté avec l’aide d’un vieux entomologiste, incarné par un malicieux Donald Pleasance.

Phenomena - Snap

Si on retrouve avec plaisir Dario Argento avec un film fantastique pur et dur (les insectes ont vraiment un rôle important…), il faut avouer que cela se fait au détriment de la partie giallo, loin d’être aussi réussie que ses précédentes oeuvres. Malgré tout, sa manière de traiter ces petites bêtes permet d’instaurer une ambiance particulière. Je ne sais pas s’il est aussi intrigué par elles que Guillermo Del Toro, mais il parvient à susciter un mélange de répulsion et de fascination, qui apporte beaucoup au film. Tout comme la présence de la lumineuse Jennifer Connelly, ici à ses débuts un an après Il était une fois en Amérique. Le casting est complété par la famille, à savoir Daria Nicolodi et Fiore Argento. Bref, pour les fans, le film est tout à fait sympathique grâce à toutes ces figures connues, et ce malgré quelques problèmes de rythme qui fraine la progression du récit. Aux limites du grotesque et du ridicule, la révélation finale sera néanmoins intense et réussie. Le genre de fin que n’importe quel autre réalisateur aurait foiré dans les grandes largeurs mais qui devient ici assez terrifiante en soi…

Verdict: 7/10

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