Le Compagnonnage dans L'Almanach des Métiers en 1852

Par Jean-Michel Mathonière

S'il fallait encore un témoignage de l'influence qu'a exercé depuis sa parution, en 1839, Le Livre du Compagnonnage d'Agricol Perdiguier, on signalera l'Almanach des Métiers publié à Paris en 1852 par G. de Gonet, éditeur au 6 de la rue des Beaux-Arts, et par Martinon, libraire au 4 de la rue du Coq-Saint-Honoré. C'est avec délice que j'ai récemment mis la main sur cette petite rareté bibliophilique, dont j'ignorais jusqu'alors l'existence.

En 96 pages, ce livret populaire donne des informations et des illustrations sur les saints-patrons des métiers, la boulangerie, la boucherie, l'imprimerie, le métier de maçon, la peinture et la la vitrerie, les maréchaux-ferrants, les petits métiers et petits commerces, et, morceau de choix, sur le Compagnonnage (pages 59 à 72). C'est en réalité un extrait du livre de Perdiguier, ce dont l'auteur de la notice, après avoir fait l'éloge d'Avignonnais-la-Vertu, ne se cache pas : « Nous n'avons pas besoin de dire que tout ce qui va suivre est emprunté, sinon entièrement pour la forme, au moins pour le fond à M. Perdiguier, qui nous saura certainement gré de cet emprunt que nous lui faisons, à raison de l'intention qui nous y pousse. »

Il faut dire qu'en 1852, Agricol Perdiguier ne pouvait pas aisément protester de cet « emprunt » forcé : député Républicain, il avait été exilé de France à la suite du coup d'état de Napoléon III ! Et dans sa détresse matérielle du moment, il est fort à parier qu'il aurait davantage apprécié de percevoir quelques droits d'auteur que ces quelques lignes de considération…

Aucune des illustrations du livre de Perdiguier n'est toutefois reproduite, pas davantage que celles de l'article du journal L'Illustration paru en novembre 1845. L'article est d'ailleurs, à la différence de tous les autres composant l'ouvrage, totalement dépourvu de gravures. Mais la couverture de l'Almanach des Métiers donne au compagnonnage la place centrale et on admire un Compagnon fièrement campé, des flots de couleurs voltigeant au vent, accrochés à son côté, à son chapeau et à sa canne.

J'ignore si cet opuscule a connu d'autres éditions en 1853 et les années suivantes. Dans son Histoire des livres populaires ou de la littérature de colportage (1854) volume I, p. 18, Charles Nisard juge d'une seule phrase cet almanach : « badin »…

© Cliché Jean-Michel Mathonière, reproduction interdite.

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)