Si vous suivez attentivement le générique d’Assaut, le film de John Carpenter, vous verrez que le monteur se nomme John T Chance. Ce pseudonyme cache John Carpenter lui-même, sans doute un peu gêné de voir son nom si présent puisqu’il signe déjà la réalisation, le scénario, la production et la musique.
Chance, c’est surtout le nom du personnage joué par John Wayne dans le Rio Bravo de Howard Hawks. Ce pseudonyme, c’est un acte de filiation. On connaît l’admiration de Carpenter pour Hawks, et, au sein de son œuvre, pour ses thématiques, son sens de l’espace et le dispositif minimaliste qui élève Rio Bravo au rang des grandes tragédies classiques.
Ce qui est moins connu, c’est que la véritable inspiration d’Assaut, c’est un autre western, moins aboutit, plus ancien, réalisé en 1953 par John Sturges : Fort Bravo, dans lequel des nordistes avec leurs prisonniers sudistes sont coincés dans un trou en plein désert, assiégés par une horde d’indiens invisibles qui les bombardent dans un silence coupé de sifflements par une multitude de flèches. Si on prend la peine d’analyser les situations des trois films, on voit bien qu’Assaut a bien plus à voir avec le Fort qu’avec le Rio.
Alors, ça me fait un peu marrer, à l’occasion de la sortie du remake d’Assaut, d’entendre parler tout le monde de la filiation avec Rio Bravo. Du remake, rien à dire, je ne l’ai pas vu et puis j’irais pas. Comme pour L’Aube des Morts et Massacre à la Tronçonneuse, il s’agit de versions édulcorées, aseptisées, formatées, de grandes œuvres subversives des années 70. Roméro, Hooper et Carpenter faisaient de la vraie série B, des films engagés qui passaient par le fantastique et l’horreur pour s’attaquer violemment à la société de l’époque. Aujourd’hui, ils sont presque tous réduits au silence. Mais leur oeuvre est toujours très présente et le meilleur hommage que l’on puisse leur rendre, c’est de s’abstenir d’aller voir leur tristes clones qui seront oubliés dans deux ans.