La FNAC s’allie à Kobo pour contrer Amazon

Par Ebouquin

Il y a quelques jours, la FNAC a laissé courir le bruit qu’une annonce importante concernant son écosystème de lecture était imminente. C’est dans les colonnes du quotidien Le Monde qu’Alexandre Bompard, PDG de la société française, a annoncé ce qui n’est rien d’autre qu’un revirement stratégique pour le distributeur. En effet, la FNAC s’est alliée au canadien Kobo (communiqué de presse officiel), numéro trois du livre numérique en Amérique du Nord et futur leader européen. Très actif au Royaume-Uni et surtout en Allemagne, Kobo est le seul acteur en dehors d’Amazon et Barnes&Noble à disposer d’un écosystème de lecture complet, de l’ereader à la librairie numérique. Un choix idéal pour la FNAC. Récit d’une union annoncée.

L’aveu d’impuissance de la FNAC

L’histoire de la FNAC avec le livre numérique ne remonte pas au FnacBook. Fin 2008, l’« agitateur de curiosité » attiré par le succès du Kindle aux États-Unis ouvrait sa première librairie numérique en partenariat avec le distributeur Numilog. Cette offre (essentiellement composée de PDF, de quelques EPUB et surtout des seuls éditeurs distribués par Numilog) était accompagnée du reader Sony de l’époque, le PRS-505. Mais le succès ne fut pas celui rencontré par le reader d’Amazon. Alors que les ebooks se vendaient par millions aux États-Unis, la FNAC parvenait à vendre quelques dizaines de milliers de titres seulement.

Ce premier échec a poussé la FNAC à faire plusieurs constats. Tout d’abord, l’offre de contenus proposée n’était pas suffisante. De plus, le Sony Reader PRS-505 ne s’est pas révélé être à la hauteur des attentes des lecteurs, d’autant plus que son prix élevé le destinait à une clientèle d’early adopters. L’arrivée de l’iPad et l’essor de l’iPhone démontrèrent aussi que la lecture numérique n’était pas uniquement destinée aux readers à écran en papier électronique, mais à un plus vaste registre d’appareils. En somme, la FNAC devait construire un véritable écosystème de lecture, ex nihilo.

En octobre 2010, le distributeur français présente en grande pompe les innovations qui devait lui permettre de prendre pied sur le marché du livre numérique. Une librairie numérique rénovée avec tous les grands éditeurs francophones, une série d’applications pour iOS et un reader 3G griffé de la marque et le FnacBook étaient les éléments du renouveau. Pourtant, un an après, les équipes de la FNAC ont du faire un nouveau constat d’échec. En parallèle aux moyens financiers employés, la stratégie de la FNAC n’avait pas conquis le lecteur. Le FnacBook n’a pas rencontré sans public, à juste titre, tandis que la librairie numérique du distributeur a souffert de son partenariat technique avec ePagine.

En dépit de l’expérience des équipes du site Fnac.com (l’un des leaders de la vente en ligne en France), elles n’ont pas réussi à construire une plateforme de distribution de livres numériques à la hauteur des attentes. Le management interne et le manque de moyens de l’équipe en charge du livre numérique n’ont pas permis les améliorations nécessaires. Enfin, la FNAC a dû reconnaître que son métier est la distribution et non pas l’élaboration de services demandant un savoir technologique difficilement externalisable (cf. échec du FnacBook). Face à un tel constat, le choix de Kobo semblait aller de soi…

Kobo à la rescousse avec un écosystème de lecture complet

Kobo est un cas atypique. Filiale de la société canadienne, Indigo Books, Kobo a réussi à se placer parmi les leaders de la lecture numérique dans le monde avec plus de 5 millions d’utilisateurs sur sa plateforme. Fervent défenseur du format EPUB et proposant un vaste choix d’application de lecture pour permettre à l’utilisateur de choisir son support préféré, le modèle Kobo a fait ses preuves. Ces lecteurs à écran en papier électronique ont rencontré un vif succès et le dernier Kobo Touch (en image ci-dessus) semble promis à un succès bien plus important.

Mais Kobo ne s’arrête pas à la simple lecture et développe une solution de lecture sociale particulièrement avancée, Reading Life, surtout par rapport à ce que propose Amazon ou Barnes&Noble (quant aux acteurs français, ce type de fonctions n’a pas encore attiré leur attention). Cet outil a fidélisé une importante communauté autour de la plateforme Kobo et devrait faire de même avec les utilisateurs de la FNAC. Les importantes ressources engagées par la société canadienne sur ce service le rendront bientôt accessible depuis Facebook pour développer le partage de lecture.

À peine arrivée en France, la société Kobo montre déjà ses ambitions avec ce partenariat avec la FNAC. Pour l’entreprise française, c’est le choix de la raison. Plutôt que de s’obstiner à s’inventer un nouveau métier (celui de distributeur de livres numériques et de fabricant de readers ou d’applications), la FNAC a choisi de s’associer à un partenaire de taille, mais aussi indépendant. Ainsi, « Kobo by FNAC » va envahir les 81 boutiques du groupe d’ici la fin de l’année avec des espaces dédiés au nouveau service de lecture. De quoi faire oublier l’échec du FnacBook (qui a d’ailleurs disparu du site de FNAC.com).

En disposant d’une solution de lecture complète, un véritable écosystème, FNAC est en bonne posture pour aborder la période des fêtes qui s’annoncent déjà comme historique pour le secteur de l’édition numérique. En surfant sur la vague lancée par Amazon et son Kindle à 99 €, la FNAC pourra proposer une offre concurrente dont le Kobo Touch sera le fer de lance (vendu à 149 € en Allemagne). L’écosystème Kobo n’a rien à envier à celui d’Amazon et semble déjà faire consensus auprès des éditeurs qui acceptent de confier leur catalogue au distributeur canadien.

Le co-branding « Kobo by FNAC » est une option plus réaliste que les précédentes stratégies retenues jusqu’à présent par la FNAC sur le livre numérique. Portera-t-elle ses fruits? Cette fois-ci, la FNAC a tout fait pour.