Investir dans les dividendes : quels sont les risques ?

Publié le 11 octobre 2011 par Chroom

L’investissement dans les dividendes passe souvent pour une stratégie peu risquée. Cette méthode a la cote tout particulièrement lorsque les marchés sont malmenés. Les investisseurs recherchent des royalties, souvent supérieurs à ceux qu’ils pourraient obtenir par des obligations, et qui leur offrent une sorte de protection contre les variations des cours.

Si l’idée en soi est excellente, elle repose néanmoins sur une erreur de taille : les actions ne sont pas des titres à revenus fixes. Ceci signifie que le dividende versé hier peut tout simplement être suspendu demain. Si vous payez 50$ pour un titre qui a versé 2$ de dividendes l’année précédente pour toucher au minimum le même montant cette année, vous courez le risque de ne toucher que 1$, voire même rien du tout. Pire, comme dividende, bénéfice et cours sont intimement liés, non seulement votre investissement ne vous rapportera rien, mais en plus vous perdrez une partie de votre mise de départ.

 Les 4 risques d’investir dans les dividendes

  1. risque de ralentissement
  2. risque de stagnation
  3. risque de diminution
  4. risque de suppression

Les risques énumérés ci-dessus sont dû au fait qu’une société est tributaire de ses bénéfices pour payer un dividende à ses actionnaires. En fonction de la marche des affaires, de la solidité de la compagnie et de la politique en matière de dividendes, l’entreprise choisira d’augmenter ses distributions (et dans quelle proportion), de les garder au statu quo, de les abaisser, voire de les supprimer.

La société Tartempion augmente chaque année son dividende de 10% depuis cinq ans. Vous décidez que c’est une bonne opportunité de placement. Cependant l’année suivante l’entreprise, suite à une stagnation du bénéfice, décide que le dividende sera augmenté de 5% seulement. Vous touchez toujours un revenu, même supérieur à celui de l’année précédente, mais inférieur à celui que vous attendiez. C’est le risque de ralentissement de la progression des distributions. Les conséquences sont bénignes, sauf si le taux de croissance reste inférieur à 3% sur le long terme, faisant courir le risque d’une perte de la valeur du dividende, due à l’inflation. Une baisse de la progression du dividende est aussi un indicateur intéressant qui peut annoncer le début d’une mauvaise série, et nous amener successivement vers les trois autres risques énumérés ci-dessus.

Plus le ratio de distribution augmente, plus la part du bénéfice dévolue aux actionnaires devient importante, et moins il reste de la marge à l’entreprise pour continuer à augmenter son dividende. A partir d’un certain stade, si les bénéfices continuent à stagner, la société ne pourra tout simplement plus augmenter ses distributions. C’est le risque de stagnation. Beaucoup d’investisseurs seraient déjà heureux de pouvoir s’assurer un revenu fixe, comme ils pourraient le faire à partir des obligations. Les actions n’étant pas des titres à revenu fixe, on peut considérer que les sociétés qui parviennent à assurer un dividende au minimum constant sont dignes d’intérêt. C’est vrai, cependant le problème se présente, tout comme pour le risque de ralentissement, lorsque cette situation perdure sur le long terme, à cause de la perte de valeur due à l’inflation. Si le ralentissement n’est qu’un simple indicateur, la stagnation des distributions est un véritable signal d’alarme, la dernière étape avant une baisse, voire une suppression du dividende.

Lorsque le bénéfice ne fait plus que stagner mais qu’il baisse sensiblement, l’entreprise peut être contrainte de diminuer le montant qu’elle accorde à ses actionnaires. C’est particulièrement le cas lorsque le ratio de distribution est déjà élevé. Le risque de diminution du dividende est sérieux. Si vous avez acheté pour 10’000 $ de l’action Tartempion en espérant en tirer pour 400$ de dividendes par année et que l’année suivante, suite à des difficultés financières, les distributions ne vous ramènent plus que 200$, le rendement par rapport à votre coût d’achat aura été divisé par deux. Alors qu’à priori, avec un rendement de 4%, la société semblait un bon investissement, vous faites au final une bien mauvaise affaire, d’autant que le cours de l’action aura sans aucun doute chuté dans le même temps. Dans ce cas vous auriez encore mieux fait d’acheter des obligations.

Mais il y a pire encore, le risque de suppression du dividende. La société Tartempion est tellement mal en point, qu’elle ne peut plus payer ses actionnaires, et cela peut durer plusieurs années. C’est comme si vous étiez proprio d’un immeuble et que vos locataires ne vous versaient plus de loyer. Pire,  en même temps votre terrain perd de la valeur. En effet, le cours du titre, qui contient la valeur des bénéfices et des dividendes, s’effondre aussitôt que ces derniers disparaissent.

Notons qu’en fonction de la situation financière de la société il est possible de passer directement aux phases de baisse et même de suppression du dividende, sans passer par le stade du ralentissement et de la stagnation. C’est ce qui est arrivé aux banques en 2008.

Le graphique ci-dessous retrace la performance des titres versant des dividendes croissants (Dividend Growers), de ceux dont le dividende stagne (Stocks with No Change in Dividends), ainsi que ceux qui diminuent ou suppriment leurs distributions (Dividend Cutters or Eliminators). On constate sans surprise que les dividendes croissants battent le marché. Les dividendes stagnants font moins bien que le marché, mais leur performance est positive. C’est un bon signal d’alarme. La performance des dividendes diminués ou éliminés est tout simplement catastrophique, puisqu’elle affiche une perte sur près de trente ans.

  Quelles leçons en tirer ? D’abord il convient d’éviter les titres trop sensibles à la conjoncture, telles que les valeurs technos et financières. Ces dernières passent trop vite d’une phase de croissance des distributions à une suppression pure et simple. Pour les autres valeurs, il s’agit d’éviter celles dont le ratio de distribution est trop élevé et de se concentrer sur celles qui font croître de manière régulière et depuis longtemps leur dividende. Celles dont les distributions stagnent doivent être vendues au profit de dividendes croissants, car elles sous-performent le marché et courent le risque de diminuer ou supprimer leurs distributions, avec les conséquences que l’on connaît.