De quoi s'agit-il ? Cette méthode contraceptive, appelée « birth control shot » commercialisée sous la marque Depo-Provera, par Pfizer, consiste à injecter la progestérone par voie intramusculaire tous les 3 mois, L'injection, dont la version générique coûte environ 1,08 $ aux États-Unis est utilisée par plus de 90 millions de femmes dans le monde entier.
Cette étude menée auprès de 3.790 couples dans 7 pays d'Afrique sub-saharienne constate que les hommes non infectés sont 2 fois plus à risque de contracter le VIH si leur partenaire féminine utilise cette contraception dont le principe actif est la progestérone.
· Parmi les 1.314 couples au sein desquels le partenaire séronégatif est de sexe féminin, les taux de transmission du VIH-1 des femmes aux hommes s'élèvent à 6,61/100 années-personnes quand les femmes utilisent la contraception hormonale vs 3,78/100 années-personnes quand les femmes ne l'utilisent pas (HR : 1,98, IC : 95% de 1,06 à 3,68).
· Parmi les 2.476 couples au sein desquels le partenaire séronégatif est de sexe masculin, les taux de transmission du VIH-1 des femmes aux hommes s'élèvent à 2,61/ 100 personnes-années quand les femmes utilisent la contraception hormonale vs 1,51/ 100 années-personnes quand les femmes ne l'utilisent pas (HR : 1,97, IC : 95% de 1,12 à 3, 45).
Réévaluer le rapport bénéfice-risque: Ces résultats incitent aujourd'hui les épidémiologistes, les spécialistes des maladies infectieuses et de santé publique à réévaluer les risques et les avantages de cette contraception. De son côté, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a convoqué une consultation technique en début d'année 2012. L'objectif sera de décider si l'OMS recommande toujours, à la lumière de ces nouvelles données, l'utilisation de contraceptifs injectables pour des femmes séropositives et pour les partenaires féminines des hommes infectés.
On le savait depuis 15 ans, protestent certains scientifiques: Une étude de 1996 avait en effet montré que les macaques femelles avec implants de progestérone avaient 7,7 fois plus de risque d'être infectés par le VIS que les macaques avec implant placebo. « Nous aurions du réagir il y a dix ans », écrit Preston Marx, microbiologiste au Tulane National Primate Research Center en Louisiane.
Mais pourquoi? Les experts émettent l'hypothèse que l'amincissement de la muqueuse vaginale par la progestérone facilite l'entrée du VIH dans la paroi vaginale d'une femme non infectée, et, inversement, la transmission du virus au partenaire. Des changements dans le microbiote vaginal provoqués par la progestérone sont également en cause. Enfin, la progestérone pourrait stimuler dans la muqueuse vaginale le développement de cellules de Langerhans, cibles du VIH au cours des mutilations génitales.
Les experts en santé publique ont toujours « fait la sourde oreille » pour ne pas avoir à faire face à une menace sanitaire en contrepartie d'une méthode contraceptive accessible, bon marché et populaire, qui répondait aux contraintes du monde en développement. Ils rappellent que de précédentes études sur l'Homme sont parvenues à des conclusions identiques, en particulier une étude prospective de dix ans menée auprès de plus de 1.500 travailleuses du sexe à Mombasa (Kenya).
Source: Lancet Infect. Dis. http://dx.doi.org/10.1016/S1473-3099(11)70247-X (2011) “Use of hormonal contraceptives and risk of HIV-1 transmission: a prospective cohort study” et Nature Published online 7 October 2011 doi:10.1038/news.2011.582 «Contraceptive risk of HIV long suspected” (Visuel Nature:” Epithélium vaginal humain pendant la première moitié du cycle menstruel lorsque l'œstrogène est dominant et l'épithélium vaginal est plus épais, et pendant la deuxième moitié du cycle, lorsque la progestérone est dominante et l'épithélium vaginal plus fin »)