Auteur : Ruta Sepetys
Editeur : Gallimard Jeunesse (Collection Scripto)
Prix : 14 €
Résumé :
Une nuit de juin 1941, Lina, quinze ans, sa mère, Elena et son petit frère, Jonas, dix ans sont brutalement arrêtés par la police secrète soviétique. Au bout d’un voyage épouvantable de six semaines, presque sans eau et sans nourriture, entassés dans des wagons à bestiaux, ils débarquent au fin fond de la Sibérie, dans un camp de travail soviétique. Logés dans des huttes, sous alimentés, brutalisés, les déportés tentent de survivre et de garder espoir. Dans le kolkhoze, le travail de la terre est éreintant. Mais malgré la mort, la maladie, le froid, la faim et la terreur, Lina tient bon, soutenue par une mère exemplaire, son amour pour un jeune déporté de dix-sept ans, Andrius, et portée par sa volonté de témoigner au nom de tous et de transmettre un signe de vie à son père (condamné à mort dans un autre camp) grâce à son art du dessin et à l’écriture.
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Ils l'ont arrêtée en chemise de nuit.
Cette nuit où tout a basculé, voilà la première pensée qui a choqué Lina, 15 ans, Lituanienne, quand la police soviétique a débarquée chez elle pour les prendre, elle, son frère Jonas de 10 ans, et sa mère, Elena.
Elle sera la première d'une liste presque interminable de chocs pour la jeune fille.
Que se passe t-il réellement ? Où les emmènent-on ? Pourquoi eux et pas certains voisins ?
Ce n'est que le début des questionnements, des doutes, des peurs, des indignations, des souffrances.
Séparée de son père, elle vivra un enfer sans nom aux côtés de sa mère et son frère, mais également de tout un groupe dans le même état qu'eux.
Entassés dans un wagon à bestiaux pour un voyage dont ils ignorent la destination ou la durée, les liens qui vont se tisser entre ces personnes seront-ils suffisant pour leur donner la force à tous de garder la tête haute et de résister à tout ce que leur feront subir les soviétiques ?
Comment peut-on vivre quand on se demande tout les matins qui sera le prochain à mourir aujourd'hui ?
Voici le récit d'une fille de 15 ans dans l'enfer des déportations.
Pfiou ...
Bon, rien qu'en écrivant ce résumé, j'avais les larmes aux yeux en pensant à cette lecture.
Beaucoup de qualificatifs forts pourraient convenir pour en parler, comme intense, poignant, bouleversant ou inoubliable.
Je l'ai déjà dis dans de précédentes chroniques, je n'aime pas l'histoire. Je suis la première que ça ennuie, car j'ai l'impression de passer à côté de pleins d'évènements importants à notre culture.
J'avais donc peur, en commençant ce livre, de ne pas vraiment m'y retrouver, d'être perdue et de me sentir un peu larguée. Car, soyons honnête, franchement, la deuxième guerre mondiale, désolée, mais je n'y connais rien, à part les très grandes lignes et quelques noms vaguement connus.
Donc, pour rassurer ceux qui seraient dans le même cas que moi : ça n'a aucune importance !
Non seulement car ce titre est essentiellement axé sur l'émotionnel, mais également car, quand un minimum d'information est nécessaire, des explications sont subtilement insérées dans le récit, de manière fluide et discrète.
Idéal donc !
Le ton est donné dès les premières lignes : ce que vous allez lire va être poignant et dur, rien ne vous sera épargné.
Rien n'est censuré ou édulcoré, et certains passages sont parfois vraiment éprouvants à lire, j'avoue sans honte avoir pleuré plusieurs fois, tellement je percevais certains moments comme un véritable coup douloureux au coeur.
Mais cette dureté dans le ton est, je pense, sa plus grande qualité, car il évite au récit entier de tomber dans le mélodrame, le larmoiement gratuit, du genre sortez les violons.
Non, ici, tout nous est exposé sans fard, la cruauté, l'égoïsme, la torture, la mort, le désespoir, ...
Du coup, les moindres émotions positives sont exacerbées également, grâce à la formidable plume de l'auteur.
Espoir, amitié, amour, solidarité, ... la moindre joie est décuplée, et colle un énorme sourire sur notre visage. On a envie d'y croire en même temps que les personnages, que c'est possible qu'ils s'en sortent, que ça ne peut pas terminer mal.
Pouvez-vous seulement imaginer, par exemple, le bonheur renversant de prendre une douche après plusieurs semaines à stagner dans la crasse, entouré de plusieurs dizaines de personnes dans le même état, couverts de poux ? Non, personne ne peut se l'imaginer. Et pourtant, Ruta Sepetys arrive à nous faire ressentir cette ivresse, cette joie indescriptible, comme si on avait également traversé ces épreuves.
Je trouve que c'est un énorme talent, et cette écriture rend ce livre d'autant plus vibrant et incroyable.
Lina fait partie de ces personnages que l'on oublie pas de sitôt, qui fait preuve d'énormément de courage et de détermination dans l'adversité.
Sa passion, le dessin, l'aidera à garder la tête hors de l'eau, à se fixer des buts, à s'échapper quelques fois.
Mais la personne qui m'a le plus marquée dans cette histoire, c'est sa mère, Elena.
Cette femme aura su rester digne jusqu'au bout, et bien que traversant les même épreuves que les autres personnes l'entourant, elle n'aura comme seule obsession de tout faire pour ses enfants et pour aider un maximum les gens autour d'elle.
Une grandeur d'âme époustouflante qui ne peut que forcer le respect, elle a dégagé, pour moi, une beauté comme rarement je n'en avais vue dans un livre.
Je terminerais en vous laissant une citation, figurant dans le mot de l'auteur à la fin de l'ouvrage. C'est la première fois que je le fais, mais pour moi elle résume parfaitement la teneur du récit, et met en avant l'espoir et la force de ces milliers de gens qui ont subis le pire, et qui pourtant, ont su garder fierté et amour.
"La guerre, en général, se caractérise par des opérations militaires. Mais pour les peuples baltes, cette guerre était essentiellement d'ordre idéologique. En 1991, après cinquante ans d'occupation, les trois pays baltes ont retrouvé leur indépendance et, avec elle, la paix et la dignité. Ils ont préféré l'espoir à la haine et montré au monde qu'une lumière veille toujours au fond de la nuit la plus noire. S'il vous plaît, réfléchissez à cela. Parlez-en autour de vous. Ces trois minuscules nations ont appris au monde qu'il n'est pas de plus puissante arme que l'amour. Quelle que soit la nature de cet amour - qui peut aller jusqu'à pardonner à ses ennemis -, il nous révèle la force miraculeuse de l'esprit humain."
Un énorme merci à Gallimard Jeunesse pour cette lecture qui est devenue, en l'espace de quelques heures, un très gros coup de coeur pour moi.
Vous trouverez ce bijou en librairie à partir de ce 13 octobre.
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