Nos médias nous parlent de temps en temps des affreux pirates somaliens qui enlèvent des occidentaux dans le Golfe d'Aden et obtiennent des rançons en échange de leur libération. Cette forme de délinquance serait à ranger au rayon des faits divers internationaux, sans grand intérêt, si elle ne résultait pas d'une histoire et d'un processus qui ne nous sont jamais racontés lors des JT.
Le documentaire de Paul Moreira, Toxic Somalia dresse un panorama bien plus large de la situation. En effet, profitant de la déliquescence de l'Etat somalien, certains pays européens, Italie en tête, déversent illégalement, contre pot-de-vin, des tonnes de déchets toxiques industriels, dont des déchets nucléaires radioactifs sur les plages. Les bateaux de pêche européens et chinois lancent leurs filets géants tout prêt des côtes, privant les pêcheurs de leur unique moyen de subsistance. Privés de poisson et de revenus, malades, leurs enfants malformés, des groupes de pêcheurs ont commencé à acheter des armes pour attaquer ces navires venus semer la misère chez eux. La réaction d'auto-défense s'est organisée au fil des années jusqu'à former une vraie mafia, organisée autour de l'enlèvement.
Toute la région profite des millions engrangés par cette activité. Outre les 4x4 flambants neufs des chefs de bande, l'Etat perçoit sa part sur chaque rançon, et les hôpitaux fonctionnent grâce à cet argent. Difficile imbrication de moralité et d'immoralité.
Dernière nouveauté sur les côtes somaliennes : les groupes pirates à Haradheere s'organisent sous forme d'une bourse permettant à n'importe qui d'investir dans leur activité, que ce soit en participant physiquement aux attaques ou en apportant un investissement sous forme d'arme, de bateau ou d'argent. Ils perçoivent ensuite une part de la rançon.
Une image projetée du monde occidental, bien compris par les pirates somaliens, où finance et crime organisé marchent main dans la main. ...