RENAN APRESKI : Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! La grande surprise de la semaine politique, c’est bien évidemment Jean-Louis Borloo qui renonce à sa candidature aux présidentielles ; alors, monsieur Borloo, pourquoi cette décision ?
JEAN-LOUIS BORLOO : Pourquoi ? Ben… Heu… Comment t’expliquer ça… Heu… Bon, t’as vu Very bad trip ?
R.A. : Non, mais j’en ai entendu parler, pourquoi ?
J.-L.B. : Bon, tu connais l’histoire : des gars se paient une cuite monumentale, et quand ils se réveillent, tout est sens dessus dessous autour d’eux et ils ne se rappellent plus de ce qu’ils ont fait la veille… Et bien moi, c’est pareil : un beau jour, ou peut-être une nuit, prêt d’un lac, je m’étais endormi…
R.A. : Un lac ?
J.-L.B. : Ben ouais, j’avais pas retrouvé mon lit ! Bon, ensuite, j’appelle un taxi pour me ramener à la maison, et sur l’autoradio du chauffeur, j’entends le speaker qui dit « les tractations vont bon train autour de l’hypothèse d’une candidature de Jean-Louis Borloo » ! Là, je comprends que j’ai salement déconné, j’ai laissé croire que j’allais me présenter ! Alors je me suis dépêché de réparer ça, tu penses…
R.A. : Mais…même si c’était un pari d’ivrogne, la perspective de peser dans la campagne ne vous attirait pas ?
J.-L.B. : Ah non ! Chirac, à l’époque, m’a dit que pour mener une bonne campagne, il faut se lever tôt tous les jours, il faut être bien habillé, bien coiffé, il ne faut boire que devant les photographes…très peu pour moi, surtout si c’est pour finir avec un score digne de Bayrou ! Merci, ça va, on m’avait déjà fait le coup quand on disait que je pourrais être nommé premier ministre, je vais pas me faire avoir une deuxième fois !
R.A. : Vous parliez de François Bayrou : vous croyez que votre retrait va accroître ses chances ?
J.-L.B. : Quoi ? Tu peux répéter là ?
R.A. : Je vous demande si vous pensez que votre retrait va profiter à Bayrou pour les présidentielles ?
J.-L.B. : Attends, t’es sérieux, là ?
R.A. : Ben…oui.
J.-L.B. : Et ben mon cochon ! T’en tiens une sacrée ! Pour une fois, c’est pas moi qui suis le plus bourré !
R.A. : Heu…Oui, vous avez peut-être raison ! Et vous, Jean-Michel Apathie, que pensez-vous de tout ça ?
JEAN-MICHEL APATHIE : Et allez donc ! Encore une fois, on bafoue les droits élémentaires du métier d’éditorialiste !
R.A. : Qu’est-ce que vous voulez dire, Jean-Michel ?
J.-M.A. : Vous ne l’avez pas remarqué ? Cette campagne démarre absolumeng n’importe commeng ! Avec mes collègues Duhamel et Macé-Scarron, nous avions tous annoncé que Dominique Strauss-Khan serait le prochaing président, et crac ! Il se fait serrer comme un vulgaire violeur de banlieue ! Ensuite, on avait dit que notre amie Nicolas Hulot serait le candidat des écologistes, et boum ! Ces connards d’écolos, non content de nous emmerder quand on va à la chasse, nous collent cette chieuse Eva Joly qui a passé toute sa carrière à chercher des poux aux gens qui paient nos analyses ! Et maintenang, voilà les centristes qui s’y mettent aussi ! Qu’est-ce que c’est, ce merdier, à la fing ?
R.A. : Ben…c’est la vie, Jean-Michel, il arrive que tout ne se passe pas comme prévu…
J.-M.A. : Mais je m’en fous de la vie ! On me paie pour que je dise aux Français ce qui va arriver, pour qui ils vont voter, alors je le fais ! Si les politiciengs et les électeurs me mettent des bâtons dans les roues, on va vers la mort du petit commerce ! Il ne manquerait plus que les socialistes choisissent Martine Aubry comme candidate ou que Sarkozy renonce à se représenter ! Si ça continue comme ça, nous les éditorialistes, on va finir par se mettre en grève !
R.A. : Très bonne idée, n’hésitez pas à la rendre illimitée ! Bon, changeons de sujet avec le chômage des seniors…
GÉRARD LARCHER : Oui, bonjour ! Je me présente : Gérard Larcher, 62 ans ! Il y a trois ans à peine, je venais de trouver un boulot de président du Sénat ; on m’avait assuré que c’était un emploi peinard et sans danger que je pouvais garder au moins dix ans, de quoi attendre sans m’en faire que l’heure de la retraite sonne… Et merde, voilà que je me mets à parler comme ce gauchiste de Jean Ferrat ! C’est sûrement la découverte brutale de la précarité qui fait ça puisqu’il y a une semaine, on m’a viré au profit d’un freluquet de 59 ans ! À mon âge, qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire ? À part poser mon cul sur un fauteuil et écouter causer des grabataires, je sais rien faire ! Ma seule chance, c’est que Michel Drucker m’embauche pour participer à son émission du dimanche !
R.A. : Souhaitons bonne chance à cette victime de la précarité ! Bon, la gauche est donc encore toute à la joie d’avoir remporté la majorité au Sénat, voyons ce qu’en pensent les deux gérontes de la République, Jacques Chirac et Valéry Giscard d’Es… Ben, messieurs, pourquoi tapez-vous dans vos mains ?
JACQUES CHIRAC : Nous applaudissons notre successeur, monsieur Apreski !
VALERY GISCARD D’ESTAING : Oui, reconnaissez que l’exploit mérite d’être salué !
R.A. : Messieurs, vous n’êtes pas très charitables !
V.G.E. : Écoutez, même moi, je n’avais pas réussi à rendre les gens mécontents au point de laisser la gauche devenir majoritaire au Sénat, il est quand même le premier président de droite à réaliser cette performance !
J.C. : Ça ! Il nous promettait la rupture, on est servis ! En tout cas, il s’est rattrapé sur ce volet-là, parce que niveau magouilles, par contre, il fait comme nous !
V.G.E. : Comme VOUS, vous voulez dire, Jacques !
J.C. : Faux cul ! Entre Bokassa et la Bettencourt, la différence n’est que de couleur !
R.A. : Messieurs, s’il vous plait, ce que j’aimerais savoir, c’est si Nicolas Sarkozy peut encore rebondir, d’après vous ?
J.C. : S’il ne fait pas comme Valéry, c’est jouable…
V.G.E. : …et s’il n’a personne à droite pour lui faire un sale coup comme Jacques me l’a fait, c’est jouable aussi !
R.A. : De ce point de vue-là, ce n’est pas gagné : la chute de votre successeur arrangerait beaucoup de monde à droite : Juppé, Copé, Bertrand…
J.C. : Alors c’est foutu ! À sept mois de la présidentielle de 2002, moi aussi, j’étais donné perdant, mais presque toute la droite était sous ma bannière, personne n’avait intérêt, dans mon parti à laisser Jospin me battre !
V.G.E. : À part Bayrou, mais c’est négligeable !
J.C. : Bayrou, c’est pas toi qui l’a formé ?
V.G.E. : Si, mais dans toutes les classes, il y a le cancre de service ! Vous savez de quoi je parle, vous avez bien formé Sarkozy !
J.C. : Là-dessus, je te rejoins, ce qui nous fait retomber sur nos pieds ! Notre analyse est terminée !
V.G.E. : Tout à fait ! Et bien, au revoir !
R.A. : Attendez, messieurs, il reste le mot de la fin ! Nous avons jugé courtois de le laisser à Manuel Valls…
MANUEL VALLS : Ya ! Merzi, Herr Apreski ! Je foulais dire à vos lekteurs que je zuis le kandidat idéal pour faire driompher le socialisme nazional en 2012 ! Zeul un homme cheune et déterminé komme ich peut nettoyer la Vranze de la ragaille kosmopolite et remettre la kanaille au travail ! Sonntag, aux primaires, fotez Valls ! Ein volk, ein reich, ein maire d’Évry !
R.A. : Hum ! Je crois que cela aura aidé beaucoup d’électeurs à faire leur choix… Allez, kenavo !