Ugly Betty et moi, c'est une histoire qui avait très mal commencé après un pilote désastreux et indigeste qui ne m'avait pas du tout donné envie de continuer. Ma conclusion initiale était simple : "à oublier".
Mais on ne décide toujours ce qu'on regarde. Ma soeur appréciant la série, j'ai continué l'odyssée. Guère convaincue, je suis restée longtemps très perplexe. Assez insensible à l'humour développé, agacée par des successions de clichés qui finissent par devenir lourd, énervée par cette petite morale sous-jacente constamment mis en avant sur le jeu des apparences... Cependant, il s'est passé quelque chose. Des premiers épisodes qui tentaient un humour décalé très second/troisième degré sur des thèmes qui ne prêtait pas forcément à rire, la série a évolué. Elle s'est affirmée en faisant gagner en épaisseur et en caractère des personnages dont les stéréotypes deviennent finalement des traits de reconnaissance auxquels on finit par adhérer. A mesure que la série avance, l'affectif commence à jouer. L'indifférence, voire l'antipathie, initiale envers nombre de personnages s'estompe. La paire formée par Marc et Amanda nous offre des scènes souvent cocasses, toujours suprenantes, avec un raisonnement 'Mode' qui devient une marque de fabrique.
Alex(is) annonce à son frère qu'elle est toujours vivante...
La série trouvait peu à peu ces marques en ayant dépassé la dizaine d'épisodes... Mais c'est véritablement à partir du 13ème - 14ème épisode qui la série a commencé à exploiter pleinement un potentiel que je ne soupçonnais pas. La storyline histoire d'amour entre Daniel et Sofia Reyes devenait singulièrement lourde et répétitive. Les scénaristes eurent la bonne idée de la terminer de façon définitive : Sofia se révélant avoir séduit Daniel pour un article dans son magazine... Sitôt cette relation terminée, la série introduit un personnage qui révèle sa véritable identité : Alex Meade. Depuis le début de la série, une femme mystérieure dont on ne voyait jamais le visionnage conspirait pour prendre le contrôle des éditions Meade. On avait imaginé qu'il s'agissait de Fey, la rédactrice en chef de Mode, décédée, plus précisément assassinée, peu avant le début de la série. Il s'agissait en réalité du frère aîné du patron de Betty, Daniel, officiellement décédé deux ans auparavant. Forcé de similer sa mort pour pouvoir subir les interventions chirurgicales nécessaires à sa transformation en femme. Alex devint donc Alexis, splendidement et pulpeusement interprétée par Rebecca Romijn (X-Men). Le thème du transsexualisme est assez peu abordé dans les séries, ça mérite d'explorer des thématiques intéressantes. Notamment dans le dernier épisode à ce jour diffusé aux Etats (1.16) où Alexis se heurte à l'intolérance de ces anciens amis, mais surtout d'inconnus dans une scène très forte, véritablement mémorable, où Alexis est confrontée à un inconnu rencontré dans un bar (Jerry O'Connell de passage pour l'occasion). Cela commence comme une classique scène de drague. Mais lorsqu'Alexis consent à donner son numéro à ce jeune homme d'apparence très prévenant, celui-ci se métamorphose en un discours humiliant de haine qui fait froid dans le dos. Cette chute finale est un véritable coup de poing (dans tous les sens du terme).
Alexis et Jerry O'Connell (1.16)
J'ai appris en plus sur le forum de SeriesLive que ces deux-là étaient fiancés dans la vraie vie. ^_^
La relation qu'ont développé Betty et Daniel est aussi intéressante. Il n'y a pas de romance potentielle ou un quelconque flirt derrière. Derrière le côté professionnel, c'est une amitié qui s'est affirmée. La tête toujours sur les épaules de Betty ramenant sur Terre et remotivant un Daniel versatile et spontané qui n'a pas toujours la situation bien en main. Particulièrement présente après l'épisode 'Sofia' calamiteux et humiliant, jouant les conciliatrices après le retour et les révélations d'Alex, Betty remplit un rôle de conseillère toujours très impliquée. Ces deux-là forment une paire très sympathique à suivre.
J'ai l'impression que c'est quand la série quitte vraiment la comédie pour rentrer dans du drama avec des scènes aussi fortes que la série trouve son plein potentiel. Il ne s'agit pas d'effacer les clichés. L'univers construit s'articule de façon cohérente, et on finit par s'attacher à ces personnages stéréotypés, un peu foldingue pour certains, mais l'ensemble étant moins lourd qu'au début.
La série s'est surpassée dernièrement. Ces épisodes n'avaient plus grand chose à voir avec les épisodes douteux du début. Une tendance à confirmer. Mais la série prouve au moins qu'elle sait se réinventer et s'affirmer, là où d'autres commencent à nous endormir à vivre sur leurs acquis en ce moment...