Hommages
Marchais le long du mur antipoétique.
Die Mauer. Ne pas regarder par-dessus.
Il cherche à encercler nos vies adultes
dans la ville routinière, le paysage routinier.
Éluard effleura un bouton
le mur s’ouvrit
et le jardin apparut.
Jadis, je traversais la forêt avec un seau de lait.
De tous côtés, des troncs violets
où une vieille farce était restée suspendue
aussi belle qu’une barque votive.
L’été nous faisait la lecture des aventures de Mr Pickwick.
La belle vie, une calèche paisible
qu’occupaient des gentlemen offusqués.
Fermez les yeux, changez de chevaux.
Les pensées les plus puériles nous viennent dans la détresse.
Nous étions au chevet du malade et priions
pour un instant de répit dans cette terreur, une brèche
où les Pickwick pourraient faire leur entrée.
Fermez les yeux, changez de chevaux.
Il est facile d’aimer les fragments
qui longtemps ont voyagé.
les inscriptions sur les cloches des églises
les dictons qui zigzaguent sur les saints
et ces graines plusieurs fois millénaires.
Archiloque ! – Nulle réponse.
Les oiseaux caressaient le pelage de la mer.
Nous nous enfermions avec Simenon
pour renifler l’odeur qu’a l’existence humaine
là où débouchent les feuilletons.
Reniflez l’odeur de la vérité.
La fenêtre ouverte s’est arrêtée ici
face aux cimes des arbres
et aux lettres d’adieu du ciel crépusculaire.
Shiki, Björling et Ungaretti
c’est écrit à la craie de la vie sur le tableau noir de la mort
Ce poème entièrement possible.
Je regardai en l’air lorsque les branches s’agitèrent.
Des mouettes blanches mangeaient des cerises noires.
Tomas Tranströmer, Œuvres complètes, 1954-1996, traduit du suédois par Jacques Outin, Le Castor Astral, 1996