Ce titre choquant est une affirmation de Stephen Harper, premier ministre du Canada, qui a été prononcée avant qu’il n’atteigne le plus haut poste politique de notre pays. Plusieurs de mes lecteurs la connaissent, mais je la répète car elle est la seule explication possible aux actions continues et incompréhensibles de notre PM conservateur contre la lutte pour la protection de l’environnement. Il continue à agir comme s’il en était l’ennemi public numéro 1.
Alors qu’Harper propose de réduire de 50% les budgets d’ « Environnement Canada » et de « Pêches et Océans Canada », le commissaire canadien à l’environnement a déclaré hier que le pays est incapable de faire une évaluation environnementale du Nord de l’Alberta (où se situent les sables bitumineux). De plus, il dénonce l’autorisation de nombreux nouveaux projets d’exploitation qui s’accumulent avec les autres et empirent le problème. Sa déclaration ne calme pas l’inquiétude des scientifiques en rapport avec « la pollution venant de l’extraction du bitume des sables, de son raffinage et de son entreposage dans d’immenses bassins à ciel ouvert ».
Le PM dit reconnaître qu’il y a lacune dans l’obtention de données de base environnementales et dans les mécanismes de leur surveillance. Par contre son gouvernement refuse d’annuler ses coupures aux budgets des ministères responsables et d’imposer « un moratoire sur les nouveaux permis ». La politique prime dans ses paroles et ses actions. Pour bien comprendre, il faut être bien renseigné. Le Canada ne l’est pas et ne veut pas l’être.
Pour calmer les esprits des opposants, Harper a mis en place un groupe d’experts « indépendants » pour évaluer les impacts environnementaux de ce projet immense et produire un rapport. L’étude doit coûter 100 millions $ et est financée par l’industrie pétrolière. En fait, je crains que tout çà soit de la foutaise ! J’ai lu quelques pages de rapports anciens des pétrolières. Ils sont très bien faits et la présentation est impeccable mais le contenu est faussé. Ce n’est que de la propagande pure servant à appuyer leurs arguments. Les experts indépendants, s’ils le sont vraiment, vont vite déchanter.
De son côté, le ministre canadien de l’environnement, Peter Kent, vient d’affirmer que ce rapport va vite aider le Canada à vendre son pétrole. Kent se moque de nous puisqu’il sera complété dans deux ans et que, pendant ce temps, les projets se développent à toute vitesse, au point que les pétrolières veulent quadrupler leurs exploitations d’ici 2030, pour atteindre 3 millions de barils par jour. C’est une vraie mine d’or, des revenus incroyables pour l’Alberta, pour le gouvernement du Canada et pour les Canadiens puisque c’est la deuxième plus importante réserve de pétrole au monde. Mais est-ce une raison suffisante pour accepter les dégâts quasi-irréparables à la forêt boréale, au réchauffement du climat, aux rivières et aux fleuves dans lesquels elles se jettent, à la faune ?
Il y a aussi le débat sur la construction du pipeline Keystone XL pour transporter le pétrole brut, extrait des sables bitumineux, au Texas. Mon blog du 21 août dernier « Le pipeline des sables bitumineux : une occasion pour Obama » traitait de ce sujet. Je suis favorable à ce projet si le pétrole est « propre ». Et c’est là qu’Obama peut aider car actuellement le pétrole est « polluant ». L’Union Européenne, par exemple, refuse de le recevoir sur le vieux continent et menace de restreindre les exportations canadiennes sur son territoire. Ailleurs, le New York Times vient de prendre position contre le pipeline à cause des impacts négatifs sur la forêt boréale. J’espère qu’Obama insistera pour que le pétrole qui entrera dans son pays soit propre et retardera l’acceptation du pipeline jusqu’au moment où ses experts établiront que cet objectif est rencontré. Cela forcera les pétrolières à revoir tous les aspects de leur exploitation en Alberta.
On peut protéger l’environnement, mais faut-il vouloir le faire ! A ce jour, le gouvernement conservateur de l’Alberta n’a autorisé qu’un seul projet de réhabilitation couvrant 100 hectares sur les 60 000 hectares minés. Ce n’est pas sérieux.
On apprend aussi, aujourd’hui, qu’un trou sans précédent a été découvert dans la couche d’ozone dans l’Arctique. Le centre canadien qui l’observe joue un rôle absolument nécessaire, selon les responsables mondiaux, pour la poursuite des travaux dans ce secteur. Encore là, une partie de ces chercheurs affirment craindre de voir leurs postes disparaître à cause des coupures d’Harper. Il est clair que le Canada ne veut plus être, comme avant, un chef de file en matière d’évaluation environnementale.
De la façon qu’il se comporte actuellement, le gouvernement d’Harper ne rencontrera même pas les objectifs réduits qu’il avait établis pour 2020 après avoir laisser tomber le protocole de Kyoto, accepté par son prédécesseur. Il n’a pas encore mis en place la stratégie globale nécessaire à la coordination, à l’établissement des objectifs, des échéanciers, des cibles provisoires, etc… qu’il doit réaliser pour 2012. Il n’est pas sérieux. Il fait semblant. Le Canada risque d’être ridiculisé à nouveau.
Le PM et son parti PC atteignent un degré d’arrogance méprisant qui dépasse la borne. Enivrés de la majorité parlementaire qu’ils ont obtenue à l’élection du 2 mai dernier, malgré que 60,4% des électeurs aient voté pour leurs adversaires, les Conservateurs ne cessent de répéter que les Canadiens leur ont fait majoritairement confiance et que cela justifie leurs actions unilatérales. Harper va même jusqu’à conclure que le pays est devenu conservateur et le PC, le parti du peuple. Il rêve en couleurs !
De plus, le grand stratège, comme aime l’appeler les membres de sa cour, se trompe. Des signes extérieurs le démontrent. Ainsi les élections provinciales récentes dans les provinces de l’Île-du-Prince-Édouard et du Manitoba sont des signes avant-coureurs qui ne trompent pas. Malgré qu’Harper ait mis sa machine électorale au service des partis conservateurs de ces provinces et prédisait des victoires « bleues » partout, le Nouveau Parti Démocratique (NPD) a gagné la première et le parti libéral la deuxième. Il reste à venir l’élection d’aujourd’hui (6 octobre) en Ontario. Au moment où ces lignes sont écrites, le parti Libéral est en avance de 10% (il traînait de 10 % il y a à peine un mois) et a toutes les chances d’être réélu.
J’espère que ces mise-en-gardes que lui envoient les électeurs de trois provinces représentatives du Canada anglais (une de l’ouest, une du centre et une de l’est du pays) feront réfléchir notre PM que les Canadiens ne sont pas à droite de la droite et qu’ils considèrent ses politiques comme rétrogrades pour le temps que nous vivons.
Claude Dupras