N’en déplaise à notre ami Politiconaute, qui me/nous reprochait insidieusement, à l’occasion de mon dernier billet, de parler de “personnes” au lieu de d’idées, je persiste et signe en continuant à prendre des symboles pour étayer mon sentiment sur le militantisme.
A propos de militantisme actif, je n’ai pas meilleur symbole à mettre en avant que celui de feu Mohamed BOUGRINE! Mon choix peut peut paraitre surprenant à certains, mais je sais rester objectif.
Quand on observe l’itinéraire de cet homme, on en reste estomaqué.
Depuis l’âge de 15 ans, jusqu’à son décès le 5 avril 2010 à l’âge de 74 ans, Mohamed BOUGRINE a toujours milité activement pour une cause, nationale ou politique, au détriment de sa liberté et souvent au risque de sa vie.
Il a toujours développé un militantisme brut, sans fard, sans mise en scène, un militantisme de base, un militantisme d’action, un militantisme de terrain, un militantisme populaire, qui l’a mené plusieurs fois en prison où il a passé seize ans de sa vie : il a eu le double et triste privilège d’une part d’avoir été le prisonnier politique le plus âgé de l’histoire moderne de ce pays et d’autre part d’avoir connu la prison sous trois rois successifs!
On ne peut que s’incliner devant la persévérance de ce militant d’un autre temps, même si on ne partage pas ses idées ni les moyens mis en oeuvre pour les défendre!
Les jeunes du mouvement du 20 février se sont appropriés un de ses mots les plus célèbres : “MAMFAKINCHE” sans en mesurer le poids et la portée!
Mais le mot est porteur comme on dit en terme de marketing et il a permis de lancer une autre forme de militantisme, le militantisme virtuel, plus soft et surtout bien plus confortable!
Ainsi a-t-on vu se regrouper des néo-militants autour de ce mot d’ordre “MAMFAKINCHE”, sorti de la bouche d’un homme dont la vie a été dédiée entièrement à ses idées et à son idéal, un homme qui a pratiqué la politique à l’époque où la politique menait au mieux au commissariat, devant les tribunaux et en prison et au pire dans les centres de détention secrets où la torture et les sévices étaient chose courante!
Je ne citerai pas de noms, ce serait faire injure à ceux que je citerai tout autant qu’à ceux que j’aurai omis : mais la liste n’est pas bien longue! Le net se charge de la faire tourner en boucle et en vase clos, avec des rôles soigneusement répartis malgré parfois des cafouillages incompréhensibles.
Les néo-militants virtuels ont choisi comme champ de bataille les murs de Face Book qu’ils prennent pour Maidane At-Tahrir, les 145 caractères et les autres applications autorisés par Twitter pour diffuser leurs idées, les blogs où tout est permis et bien sûr YouTube qui autorise tous les excès et toutes les manipulations, sans oublier les tribunes généreusement offertes par certains publications ou associations étrangères.
Il faut reconnaitre de certains descendent dans les rues et fraient avec le peuple, le contact avec wlad wa bnaty ach-cha3b est enrichissant à ce qu’il parait : ils le font en toute quiétude, sinon la crainte d’être bousculé par un agent de police ou par une espèce nouvelle qu’on ne connaissait au Maroc, les baltajiya.
A ce train-là, le militantisme est aisé et les néo-militants peuvent fleurir.
Entre les Che Gueverra de pacotille et les révolutionnaires de salon, Feu Mohamed BOUGRINE aura du mal à reconnaitre les siens : ils ne sont pas bien nombreux, malgré les professions de foi enflammées, les slogans incendiaires et les postures parfaitement mises en scène!