Article fort intéressant de Denis Colombi, publié en septembre dernier à l’occasion de l’annonce du départ de Steve Jobs, et qui mérite aujourd’hui que l’on s’y attarde quelques minutes.
Directement inspiré de la théorie de la domination de Max Weber (un des fondateurs de la sociologie compréhensive), le charisme du cofondateur et ex-PDG d’Apple
n’a pas besoin de résider dans des capacités exceptionnelles réelles : il suffit que les autres, et plus particulièrement un petit groupe actif rassemblé autour du leader, soient convaincu de l’exceptionnalité de celui-ci
[…]
C’est donc d’abord la façon dont a été mise en récit son parcours, avec ce qu’il faut de légendes, de mystères, de traversées du désert et tout ce qu’il fallait pour respecter un canevas finalement déjà écrit, qui lui a conféré son charisme.
En d’autres termes, le charisme de Steve Jobs s’appuie, certes, sur sa vision innovante du marché de l’informatique grand public mais également sur son talent à rassembler autour de lui un noyau dur de collaborateurs dévoués et de fans qui, par leur travail et leur évangélisation, ont contribué à faire naitre le mythe d’Apple, et donc, le sien.
le charisme est le mode d’exercice du pouvoir privilégié par les prophètes. La religion fournit une matrice de la domination, politique ou économique. Si le chaman s’appuie sur la tradition et le prêtre sur l’institution, le prophète s’appuie sur l’exceptionnalité qu’on lui prête - d’où l’importance, par exemple, des miracles (pas de la magie : la magie est une technique de chaman qui respecte des règles anciennes, les miracles sont quelque chose qui n’appartient qu’au prophète).
Le fait que Steve Jobs doive une grande partie du succès des premiers ordinateurs Apple à Steve Wozniak, l’autre cofondateur de la marque, ou au travail acharné des équipes de développement et de design pour l’iPod ou l’iPhone, le fait est que son image restera à jamais associée à ces trois produits cultes…