Nous nous promenions
Dans la vallée du Niolo.
-C’est ici, dit
Paulo,
Mon compagnon
Que sont réfugiés tous nos bandits.
Soudain à l’orée d’un bois
Nous apparut un petit calvaire :
Une simple croix
Plantée dans un tas de pierres.
Mon voisin reprit :
-J’ai connu ici
Le plus célèbre des bandits,
Le terrible Sainte-Lucie.
Ses parents étant morts,
Il restait seul avec sa sœur Éléonore.
Comme il était petit, chétif, sans énergie,
Il ne déclara pas
La vendetta
A l’assassin de son père.
Tous ses parents le supplièrent
De se venger. Mais il restait sourd
À leur supplication.
Alors, conformément aux traditions,
Sa sœur lui ôta ses vêtements noirs pour
Qu’au moins
Il ne portât plus le deuil d’un mort non vengé.
Et au lieu de décrocher son fusil
Ou saisir une arme de poing,
Il ne sortit plus de chez lui
N’osant être dévisagé
Par les regards méprisants des voisins.
Or une nuit, l’assassin et son frère
Passèrent
Devant la maison des deux orphelins.
Sainte-Lucie se leva,
Se signa, prit le fusil,
Sortit,
Hurla :
-C’est le moment !
Et il tua l’assassin de son père
À bout portant.
Le frère
Voulant fuir ; Sainte-Lucie
Réarma son fusil
Et le tua aussi.
Le lendemain, il était dans le maquis.
Plus tard, quand il en parlait
Il dira :-J’ai senti qu’il le fallait !
Bien sûr toute sa famille fut capturée
Par les gendarmes. Même son oncle le curé
Soupçonné d’incitation
À la vengeance fut mis en prison.
Savez-vous ce que fit, ce Sainte-Lucie ?
Il tua toute la famille ennemie.
Il massacra six officiers de gendarmerie.
Sainte-Lucie fut le bandit le plus terrible
Qu’on ait pu voir.
J’interrompis :-Quelle coutume horrible
Que celle de la vendetta !
-Que voulez-vous, on fait son devoir !
Le reste n’existe pas.