L'extraordinaire aventure d'un "gars de Trégunc" chez les Kanaks

Publié le 05 octobre 2011 par Anh2

Notre curiosité des îles et des faits maritimes nous  promènent d'une histoire kanak de l'île des Pins "la jeune fille et le serpent Mââgenin" jusqu' au pied d'un phare posé sur le lagon calédonien (voir la rencontre prévue avec Catherine Bayle illustratrice et l'auteur Vincent Guigueno  le lundi 31 octobre 2011 aux Quat'sardines).

Un incroyable récit de naufrage condensé par Jean-Michel Robert vient juste à point nourrir notre intérêt pour ce bout d'océan. Il s'agit du destin tragique de la corvette Alcmène avec à son bord  Yves Le Marrec matelot natif de Trégunc.

C’est l’histoire d’un  gars  de Trégunc matelot de 3èmeclasse de notre Royale Marine, arrivé à vingt ans au dépôt des équipages de Lorient le 24 février 1848. Yves Le Marrec  fait partie des 248 membres de l’équipage de la corvette Alcmène sur laquelle il embarque le 11 Mai 1848 à Rochefort.
Alcmène cette  jolie  corvette de 48mètres est fin prête en ce mois de juillet 1848 pour sa 1ère mission, direction le grand  Océan Pacifique. Selon une mode du temps on baptisait les navires de noms de la mythologie ou de l’histoire du peuple Grec. Fille de  Mycènes, Alcmène était l’épouse d’Amphitryon et Mère d’Eraclés  après avoir été
séduite par Zeus . Déjà tout un programme…

Alcmène fait partie de ces navires frappés par le malheur et la malédiction. Fin octobre 1849 Alcmène termine sa 2ème campagne dans les Iles du Pacifique, le Ministre de la Marine décide alors que la corvette devra compléter et contrôler les renseignements que possède le département  de la marine sur la Nouvelle Calédonie.

La 3èmecampagne commence donc, la dépêche Ministérielle spécifiait que l’Alcmène devait inspecter les missions catholiques et les bateaux baleiniers nationaux du grand Océan. En réalité les instructions secrètes données au Commandant demandaient une exploration approfondie en vue d’étudier les ressources de la Nouvelle Calédonie. On parle alors de riches gisements aurifères.

75 ans plus tôt, en ce début de septembre 1774, James Cook à bord du HMS Resolution  fait escale dans la baie de Balade sur la côte Est de cet archipel qu’il appelle la Nouvelle Calédonie en souvenir des monts de son Ecosse Natal. Cook notera dans son journal de bord :

« C’est la moins fertile des terres que j’ai eu l’occasion d’aborder, mais je ne serais pas surpris qu’elle recèle des richesses minières »

.

Novembre 1850, Alcmène longe les côtes Nord de la Nouvelle Calédonie et prend son mouillage en rade devant le village de Hienghene. Les Kanaks de la tribu des Daiema sont sur leur garde, leur Chef est décrit comme plus féroce de toute l’Ile. « Devant sa case s’entassait un tas d’os humain, restes des victimes qu’il a sacrifiées (et mangées) à ses appétits sanguinaires »

L’enseigne de Vaisseau  Devarenne est désigné  pour armer un canot qui sera chargé de découvrir une route pour passer au nord de l’Ile à l’Ouest du Cap Tonnerre. Le canot dispose de dix jours de vivres, 5 mousquetons, 4 sabres, 1 révolver et les munitions. Quinze hommes sont à bord dont le gars de Trégunc  Yves Le Marrec.

Au soir du 1erdécembre 1850 le canot mouille devant le village de Yenghebane Les Kanaks sont affables, on échange coco et biscuits. Le soir du 2 décembre les guerriers dansent, la tension monte et les Chefs parlent à peu près ainsi:

« Que viennent faire ici les étrangers, la couleur de leur peau, leur langage leurs habitudes ne sont pas les mêmes que les nôtres, s’ils s’éloignent d’ici, ils riront de nous et diront que nous sommes des femmes, que nous n’avons pas osé les attaquer. Il faut qu’ils restent ici, morts ou vifs »

La tension est à son maximum mais en fin de nuit les Kanaks se retirent, la consultation du sorcier Dindi est décidée. Lui-même doit consulter l’oracle  Bouat A Pat  un paquet d’herbes enlaçant un bois planté en terre. Le devin sorcier doit presser à deux mains, si le lien résiste la victoire est assurée Le lien résista  la mort des Etrangers était décidée.

suite au prochain épisode...