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A propos de @TousHollande et de son “retweet automatique”

Publié le 05 octobre 2011 par Variae

Ce soir, les primaires vont connaître leur troisième débat. Lors de la précédente édition, la semaine dernière, une fonctionnalité du site TousHollande, pourtant déjà utilisée et largement commentée lors du lancement du site, a donné lieu à un buzz plutôt drôle (« les robots de François Hollande »), mais colportant néanmoins un certain nombre d’éléments erronés.

A propos de @TousHollande et de son “retweet automatique”

Tout part d’un article qui, s’il n’est pas factuellement trop inexact, prend bien soin d’accoler des mots-repoussoirs (« robots », « marchand de viagra », « spam », « zombie », « Jeunes Pop ») à une réalité qui n’a pas grand chose à voir avec eux. Dans un second temps, les partisans des autres candidats aux primaires rediffusent massivement l’information en poussant à leur tour des cries d’orfraie. Dans un troisième temps, la presse moins spécialisée se saisit de l’affaire, en copiant-collant les mots du premier article sans chercher (sauf exceptions notables) à en vérifier la pertinence, mais en convoquant au chevet du buzz des spécialistes en influence, agences de communication digitale et autres Docteurs Knock de l’internet social. Du téléphone arabe 2.0, ou comment la répétition d’erreurs, ou d’informations erronées, finit par devenir une vérité.

Rétablissons donc la vérité vraie, comme on dirait chez une autre candidate.

De quoi parle-t-on ? D’une application Twitter développée dans le cadre de la communauté de blogueurs et twittos TousHollande, qui regroupe les soutiens de François Hollande sur le web. Cette application – qui n’est qu’un élément parmi d’autres de ce site communautaire – permet aux twittos qui donnent leur accord, lors de leur inscription, de rediffuser automatiquement certains tweets de François Hollande, sélectionnés par son équipe de campagne de manière parcimonieuse et exceptionnelle (une grosse dizaine de tweets en un mois d’existence). On peut très bien s’inscrire sur TousHollande sans se connecter à cette application, qui est destinée au noyau dur des soutiens de François Hollande.

Cela n’a pas empêché quelques contre-vérités d’être énoncées et reprises sans vérification.

Première contre-vérité : ce serait une idée reprise à l’UMP. Les faits sont têtus : cette application a été développée au printemps 2011, et mise en ligne avec TousHollande le mercredi 31 août. Les premiers articles dont j’ai connaissance sur un système semblable créé par les Jeunes Pop datent eux du 6 septembre. En admettant que les articles sur l’UMP aient eux aussi eu du retard, on peut tout au plus conjecturer un développement parallèle.

Deuxième contre-vérité : il s’agirait de comptes twitter « robots », ce qui sous-entend qu’ils n’auraient aucune indépendance, voire qu’il s’agirait de comptes fantômes créés ad hoc. Là encore, on peut facilement vérifier l’inverse : tous les twittos inscrits sur TousHollande sont répertoriés de façon transparente sur le site, et correspondent à des individus réels qui tweetent par eux-mêmes.

Troisième contre-vérité : il s’agirait d’une fonctionnalité masquée jusque là, et utilisée à l’insu des twittos. Il suffit pourtant de lire les articles évoquant  TousHollande, début septembre, pour en entendre parler. Elle est en outre très clairement mentionnée au moment de s’inscrire sur le site. Et surtout, elle avait déjà été utilisée avant le débat de mercredi dernier.

Reste alors le débat de fond, sur le caractère légitime, ou non, d’un tel système. Le journaliste qui a lancé la polémique se lamente : « Le porte-à-porte numérique, travail artisanal que pourrait encourager Twitter devient un travail d’usine ». Il met le doigt, sans le savoir, sur le problème du militantisme numérique. Tout une partie de cette activité est, d’une certaine manière, robotique. Il suffit de regarder les comptes twitter des militants les plus investis (je me mets dans le lot) : pendant les moment d’intense focalisation (en particulier les débats), tous les soutiens d’un même candidat en viennent, de fait, à diffuser (pour partie au moins) la même information, à reprendre les mêmes mots. C’est logique : quand il le faut, on met son individualité dans sa poche pour diffuser la parole de son candidat. A partir de là, il est dans l’intérêt de tout le monde d’automatiser cette tâche. Dans l’intérêt du candidat, pour donner plus de visibilité et d’impact à des messages qu’il juge importants. Dans l’intérêt des militants, qui peuvent se décharger de la partie la moins personnelle de leur activité pour se concentrer sur d’autres opérations – et notamment des tweets – où ils peuvent mieux mettre en valeur leur créativité et leur inventivité.

Internet n’est pas une science exacte, et les campagnes politiques digitales sont un domaine tellement récent, et si peu défriché, qu’il est important de tester de nouvelles façons de procéder. Nous revendiquons ce caractère expérimental sur TousHollande. Une chose est sure, l’Internet social devenant de masse, il n’est plus possible de compter sur la débrouille et la viralité spontanée pour diffuser une information au-delà du petit cercle des internautes les plus experts et les plus assidus. Faudrait-il toujours que les partis politiques aient un train technologique de retard ?

Romain Pigenel


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