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Attention, expérience. Valhalla Rising ne ressemble à rien de connu, et ne propose rien d’attendu. A la place du sanglant film de vikings dont il revêt l’apparence, ce Guerrier silencieux est un long, très lent, trip sensoriel dans les Highlands écossais. Son personnage principal ? One-Eye, un barbare mutique et borgne. Les dialogues ? Infimes. L’intrigue ? Inexistante. Que peut donc bien proposer le danois Nicolas Winding Refn pour affoler les sens ? C’est simple : une virtuosité de chaque plan, dopée aux bonnes références et enrobée d’une vraie singularité, dans les thématiques (bestialité, masculinité, nature, esthétisation de la violence) et dans les formes (la part belle est faite au ressenti). Pour cela, il emploie les grands moyens : soundtrack psychédélique et envoûtant, refus radical des conventions, photographie sublime qui rappelle tout à la fois Herzog et Malick (et signée Morten Søborg), et montage surprenant, expérimental, en mouvement (Anne Østerud).
Du regard de Mads Mikkelsen, aussi froid que les paysages nordiques qu’il contemple, le cinéaste tire une puissance surréaliste: sans prononcer un seul mot, l’acteur bouffe l’écran, intense, primitif, monstre d’incarnation. Côté scénario, on ne va nulle part : l’arrière plan religieux est balayé par un néant métaphysique aussi repoussant que fascinant, courageux, prétentieux, admirable, discutable. Valhalla Rising, c’est du vide à l’image et mille choses qui se passent, là, dans l’estomac. De la création ex nihilo impossible à résumer, à décrire, à imaginer. C’est un renouveau total, une manière d’envisager une trame périmée, sous un angle supérieur. L’expérience est jusqu’au-boutiste, pas toujours agréable, mais tellement extrême dans sa démarche, qu’elle ne peut que remuer. L’enjeu de tout art, en somme.
Drive, le nouveau film de Nicolas Winding Refn est actuellement en salles.