La rétention de sûreté ne sera donc pas rétroactive.
Telle sera la loi qui sera probablement publiée au J.O du 25 février 2008.
Mais le Président de la République vient de demander au Premier Président de la Cour de Cassation « d'examiner la question » et de faire « toutes les propositions nécessaires » pour appliquer immédiatement la rétention de sûreté aux criminels déjà condamnés.
En d’autre terme, il vient de prendre une mesure destiné à faire échec à l’exécution de cette loi.
Ce comportement recoupe très exactement l’infraction prévue et réprimée par l’article 432-1 du Code pénal :
« Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, agissant dans l'exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l'exécution de la loi est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende ».
D’évidence, il s’agit là d’un abus d’autorité dirigé contre l’administration, pouvant être assimilé un « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».
Cette remarque se fait, bien entendu, à la lumière de l’article 68 de la Constitution qui dispose : « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour »).
Mais, ne rêvons pas.
Posons-nous la question : est-elle donc si fragile, notre démocratie ?
Peut-on, d’un coup de tête revenir sur un principe issu de la déclaration des droits de l’homme ?
Peut-on en un trait de plume supprimer le Conseil Constitutionnel ?
Sans conteste, nous vivons bien une «période sombre pour la justice » (R. BADINTER)
Qu’il nous soit permis néanmoins de répondre à la question du Président.
Nul besoin de violer la déclaration des droits de l’homme et du citoyen pour protéger des victimes potentielles.
Il suffit en effet d’appliquer l’article L. 3213-1 du Code de la santé publique qui dispose : « A Paris, le préfet de police et, dans les départements, les représentants de l'Etat prononcent par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation d'office des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. »
A consulter :
La Décision n° 2008-562 DC - 21 février 2008, « Loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ».
Texte de la loi déférée
Saisine par plus de soixante députés
Saisine par plus de soixante sénateurs
Observations du Gouvernement
Communiqué de presse
DÉCISION INTÉGRALE
Dossier documentaire
Législation consolidée avant décision
Commentaire aux Cahiers
Sur le site du Sénat, le dossier
La polémique :
Déclaration du Porte-parole suite à la validation par le Conseil Constitutionnel de l'introduction de la rétention de sûreté dans notre droit
Pour autant l'application immédiate de la rétention de sûreté aux criminels déjà condamnés, qui présentent les mêmes risques de récidive, reste un objectif légitime pour la protection des victimes.
Le Président de la République a demandé au Premier Président de la Cour de Cassation d'examiner la question et de faire toutes les propositions nécessaires pour l'atteindre.
Sur le site du Monde : Rétention de sûreté : levée de boucliers contre l'initiative de Nicolas Sarkozy
Robert Badinter : "Nous sommes dans une période sombre pour notre justice", Propos recueillis par Alain Salles
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