A propos de Restless de Gus Van Sant 2 out of 5 stars
- Mia Wasikowska, Henry Hopper
A Portland, Annabel et Enoch se rencontrent un jour à un enterrement d’une personne qu’ils ne connaissent pas mais auquel ils étaient venus assister comme ils ont pris l’habitude de le faire chacun de leur côté. Dès leur rencontre, leur relation est placée sous le signe de l’étrangeté. Enoch est un adolescent replié sur lui-même et fasciné par la mort depuis le décès tragique de ses parents dans un accident de voiture. Annabel est attirée par le trépas depuis qu’elle se sait atteinte d’une tumeur incurable au cerveau et qui ne lui laisse plus que trois mois à vivre. Tombés amoureux l’un de l’autre, Annabel et Enoch décident de vivre à fond ces trois mois…
Forcément, Restless laisse le spectateur partagé, divisé entre ses qualités évidentes et des défauts non moins majeurs. Ses qualités évidentes tiennent dans la prestation mémorable de Mia Wasikowska (Annabel).
L’actrice, que l’on avait déjà remarquée dans Alice au pays des merveilles de Burton, illumine littéralement la pellicule, à la fois belle et fragile, généreuse et naturelle. Wasikowska incarne une jeune naturaliste courageuse dans son combat contre le cancer et bien que se sachant condamnée par la maladie, toujours tournée vers les autres et vers la vie. Très expansive, à l’aise, Annabel est le contraire d’Enoch (Henry Hopper, fils de Denis), personnage beaucoup plus secret et introverti, peu enclin à se confier malgré son humour.
Pour se sentir capable d’affronter ses démons, Enoch s’est inventé un double : Hiroshi, héros japonais et kamikaze de la seconde guerre mondiale. Et c’est là, si l’on peut dire que le bât commence à blesser. Parce le coup du kamikaze japonais qui écrivit une lettre à son amoureuse avant de mourir, lettre qu’il ne lui fit jamais remettre, est un stéréotype, un de ceux hélas qui parsèment Restless.
Malgré la gravité de son sujet, la narration du film s’apparente à celle d’un conte mignon pour enfants. On pense à Harold et Maud d’Hal Ashby dans ce côté « amour impossible ». Restless se déroule en Automne, et les couleurs jaune, orange des paysages enneigés de Portland confèrent au film une dimension romantique mais « cliché » aussi.
L’histoire se situe à notre époque, mais Annabel et Enoch s’habillent comme dans les « années folles » (1920), ce qui leur confère un côté décalé baroque ou « bobos » selon le point de vue. Au début du film, Enoch porte un costume, une cravate et des bottes noirs qui lui donnent l’air d’un peintre maudit, un artiste torturé ou romantique habillé à la Edvard Munch. Enoch, à la limite de l’autisme au début du film, s’ouvre de plus en plus à mesure qu’il tombe fou amoureux d’Annabel.
Dans Restless, Van Sant a voulu effacer la trace des ordinateurs, des téléphones portables, de YouTube et de Facebook. Ses personnages ont ainsi l’air plongés dans une autre époque, et l’air de communiquent vraiment entre eux.
Mais cet aspect pertinent de son film est contrebalancé par les clichés de ces costumes des années 1920 et des couleurs automnales. En fait, étrangement, Restless ne dégage pas réellement d’émotion malgré une vraie connivence entre ces deux héros qui se sont créés un monde à eux, littéraire et intellectuel, imaginaire et poétique.
Van Sant aurait gagné en pouvoir d’évocation par une économie de moyens. Aux clichés cités plus haut s’ajoutent les compositions trop présentes, trop signifiantes de Danny Elfman. Van Sant étouffe un peu la pellicule par une surenchère de moyens, d’artifices.
Dommage quand on avait sous la main une actrice aussi formidable que Wasikowska, capable de tous les exploits et à elle seule, de déclencher tous les torrents du monde…
www.youtube.com/watch?v=W8BacmGJyuI
Film américain de Gus Van Sant avec Henry Hopper, Mia Wasikowska, Ryo Kase (01 h 35).
Scénario : 2 out of 5 stars
Mise en scène : 2 out of 5 stars
Acteurs : 4 out of 5 stars
Dialogues : 2.5 out of 5 stars