Nobel de littérature en vue !

Publié le 29 septembre 2011 par Dubruel

LA BÛCHE

   

Mes camarades se sont étonnés du froid

Entre Pascal, un ami chirurgien, et moi.

 

Voici le secret de notre éloignement.

Nous habitâmes ensemble longtemps.

Un jour il m’annonça qu’il allait se marier.

J’en fus vivement contrarié,

Comme s’il m’avait trahi.

Quand un ami se marrie,

C’est fini,

Bien fini.

 

En effet, l’homme et la femme

Étant d’un ordre naturel différent

Sont étrangers d’âme

Et donc restent deux belligérants.

 

Pascal semblait au comble du bonheur.

Jeanne, son épouse, était jolie, vive d’humeur,

Une brune frisottée au teint basané.

Un soir, ils m’invitèrent à diner.

Au dessert, on vint chercher Pascal

Pour une urgence à l’hôpital.

 

Sitôt qu’il fut parti

Une sorte de gêne naquit

Entre sa femme et moi…

Il est difficile parfois

De trouver des choses à dire.

 

Le feu de cheminée faiblissait.

Jeanne me pria dans un doux sourire

D’ajouter une bûche pour le relancer.

Je m’exécutais et soufflais sur la flamme.

Puis je m’assis près d’elle sur le sofa.

Alors elle me demanda :

-Que feriez-vous si une femme

Ou moi-même

Vous disait « Je vous aime » ?

-Ça dépendrait de la personne.

Elle partit d’un rire qui sonne

Au point de casser un verre fin :

-Les hommes ne sont pas bien malins.

Elle me servit un verre d’alcool

Puis s’est allongée

La tête posée sur mon épaule,

Sa robe un peu relevée.

-Si je disais « je vous aime », que feriez-vous ?

Ses bras venaient de prendre mon cou.

Son mari ne lui suffisait donc plus !

Était-elle attirée par le fruit défendu ?

Cela ne m’allait guère.

Mais que faire ?

Tromper Pascal ?

Devenir un amant fatal ?

Cette fille était affolante,

Enflammée d’audace, palpitante.

Elle découvrit un peu ses seins

 

Que pensez-vous qu’il advint ?

…Une bûche roula sur le tapis.

Aussitôt dans l’âtre je la remis

Et brusquement la porte s’ouvrit

…Un instant de plus, nous étions surpris !

Pascal apparaissait :

-L’opération s’est bien passée.

…Une minute de plus, et j’étais…

Non, elle était…

C’est lui qui l’était

Ou plutôt qui l’aurait été !

Les conséquences, vous les voyez d’ici.

 

Je me jurais de n’être plus pris ainsi.

Jamais !

Une longue amitié était sapée.

Pascal m’éloigna progressivement.

Puis cessa de me voir définitivement.

 

Vous ne serez pas surpris :

Je n’ai jamais voulu être mari !