2012, un tour de plus pour Sarkozy ?
Avec la nouvelle rouste de magnitude 9 que vient de se prendre la droite parlementaire et la perte de sa majorité au Sénat, on pouvait s’attendre à des répliques sismiques plus ou moins fortes. Cela n’a pas manqué avec, par exemple, la polémique du président de la haute chambre qui ne veut pas décaniller. Et logiquement, cette nouvelle déconfiture titille quelques confrères blogueurs qui en profitent pour nous livrer, déjà, leurs pronostics pour la présidentielle de 2012.
Je pourrai ainsi citer l’intéressant billet de Toréador dont l’analyse le pousse à voir Sarkozy réélu en 2012. Pour lui, les jeux sont déjà faits : Sarkozy va se retrouver devant Hollande au second tour, et ce sera un non-combat tant le différentiel de classe est grand entre le Président sortant et le directeur de Prisunic. Non-combat qui entraînera tout de même une toute petite victoire de Sarkozy.
De son côté, l’Hérétique ne déroge pas à son centrisme et déclare même, avec une tirade au style un peu grandiloquent qui ne lui ressemble pas, qu’il soutiendra François Bayrou jusqu’à son dernier souffle. J’ose espérer qu’il s’agit du dernier souffle de Bayrou et non celui du blogueur, ce qui lui laisse une chance, moyennant un infarctus opportun, de se sortir de ce guêpier dans lequel il s’est gentiment fourré… Dans son billet, en effet, il estime que le Bayrou a des chances de se révéler comme l’Homme Providentiel, à la fois propre sur lui, honnête, droit dans ses bottes, indépendant, crédible, frisé et pourquoi pas, beau avec un petit côté ténébreux sur lequel la caméra n’arrive pas à faire le point.
Je n’ai pas ici besoin de citer l’avalanche de billets de la gauchosphère espérant humidement l’avènement de Martine Aubry, de François Hollande ou, dans un registre oscillant entre l’autisme et un cynisme presque méchant, la pauvre Ségolène ; ils sont faciles à trouver, nombreux, avec l’argumentation aussi astucieuse que bien construite que tous les socialistes officiels sont capables d’invoquer au meilleur de leur forme.
À l’aune de ces éléments, se lancer dans le pronostic revient essentiellement à endosser l’une des analyses déjà existante. En plus, question risque, c’est couillu : nous sommes à huit mois de la présidentielle, et la situation politique intérieure et extérieure est à ce point confuse et changeante qu’essayer l’exercice, c’est échouer à coup sûr.
On peut aussi lancer la carte Inquisition Espagnole. Eh oui : personne ne s’attend jamais à l’Inquisition Espagnole !
Mais puisqu’il faut se mouiller de temps en temps, voici ma propre analyse, en ce 28 septembre. On se doutera qu’elle a encore des chances de changer dans les prochains mois.
J’élimine par avance le cas où la situation économique et financière de la France, catastrophique, provoque un bouleversement radical de la vie politique (émeutes, couvre-feu, état d’urgence et j’en passe). Les élections, remises à des périodes plus calmes, seraient donc profondément changées et toute prévision deviendrait alors impossible… Cette situation est de plus en plus tangible à mesure que se murmurent dans les couloirs feutrés des agences de notations de pénibles dégradations. Si le pire n’est pas certain, il n’en reste pas moins possible. Et s’il y a trois ou quatre ans, on haussait les épaules à l’évocation d’une perte du AAA français ou de la faillite du pays, maintenant, plus personne ne moufte.
Reste donc la situation où les élections ont bel et bien lieu. On imaginera sans mal que Sarkozy se représente : il est soutien de famille, ne l’oublions pas, avec une femme oisive et coûteuse et un enfant en bas-âge. Et, objectivement, il n’a aucune espèce de compétence en poterie, macramé, animation de groupes d’enfants ou de pâtisserie créative : la présidence de la république est probablement un choix logique, en désespoir d’autre carrière sereine.
On imaginera aussi, toujours sans grande difficulté, que la droite saura se tenir à peu près tranquille et que les divisions et déchirures internes sauront rester petites, discrètes et patchées à la superglu le temps d’arriver en juin 2012.
En face, tout est encore très flou.
Bien sûr, Hollande, propulsé par un charisme dont les doses se mesurent en picogramme, se détache un peu du fond de la casserole socialiste. Mais si les comptes des bulletins de vote sont aussi précis que lors de la désignation de la première secrétaire, Titine a ses chances.
Le second tour des présidentielles semble donc se résumer aux trois situations suivantes :
a/ Sarkozy – Hollande. Un petit excité mal habillé contre un édredon flou et empathique comme un abribus, le débat sur la Une promet d’être passionnant. Comme Toréador, je pense que les gens voteront un peu plus contre Hollande que contre Sarkozy, dans un score serré comme un café SNCF.
b/ Sarkozy – Titine. Pour le coup, le débat sera un long échange de casseroles respectives, de la fonte, de l’alu, du cuivre, du lourd qui fait mal. Mais là encore, je donne un léger avantage à Sarkozy, président catastrophique mais candidat efficace. Aubry a toujours ce côté moralisateur et on peine à voir la carrure d’une présidente de la république dans cette secrétaire socialiste fadasse.
c/ Sarkozy – Le Pen. Là, le débat serait animé, les talents rhétoriques de la challenger donnant probablement du fil à retordre à un type qui sera éprouvé par cinq années particulièrement rock’n'roll à la tête d’un pays en déroute. Et le résultat serait incertain, tant l’abstention serait probablement importante. On ne peut pas écarter un score bananier, mais Sarkozy serait probablement réélu.
Comme on peut le voir, dans chacune des trois hypothèses, Sarkozy serait réélu. Sans gloire, sans panache, et probablement sans espoir. Maintenant, il faut se rappeler qu’aucun Président n’a été reconduit sous la 5ème République. Les deux mandats successifs de Mitterrand et de Chirac doivent tout aux cohabitations qui les ont précédés. C’est là qu’on pourrait rire.
En effet, Sarkozy réélu, rien n’empêche d’avoir (et mon petit doigt me dit que ce serait une possibilité assez forte), ensuite, un parlement … majoritairement PS. Cinq années d’immobilisme après des années d’excitations vaines et creuses : juste ce dont ce pays a besoin pour sortir du gouffre.
Pas de doute : ce pays est foutu.
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