La statistique impressionne : 94 internationaux participant à la coupe du monde en Nouvelle-Zélande sont des joueurs du Top14. C'est une forme de record pour un championnat national (on met de côté le Super 15 qui regroupe des équipes de trois nations différentes). Et ce record n'est pas, on s'en doute, totalement neutre en termes d'équité sportive.
En effet, il suffit de regarder le classement du Top 14 après cinq journées pour constater les conséquences de ce chevauchement des calendriers sur le résultat des rencontres. Aujourd'hui, Montpellier et Biarritz ferment la marche au classement. Le MRHC, finaliste l'an passé, et Biarritz, habitué des phases finales, sont clairement à la traîne. Et ces ceux équipes sont des pourvoyeuses importantes d'internationaux.
Il paraît difficile de ne pas faire le rapprochement entre les absences de François Trinh-Duc, Fulgence Ouedraogo, Mamuka Gorgodze (pour ne citer qu'eux) et le rendement de l'équipe de Fabien Galthié. Quant à celles de Biarritz, elles conduisent tout simplement les coaches à chambouler l'intégralité de la troisième ligne et à se priver de leur demi-de-mêlée stratège, Dimitri Yachvili. Pour Biarritz, les difficultés s'additionnent dès lors que les blessures viennent diminuer un peu plus le potentiel de l'équipe.
Ces deux exemples sont très parlant. Mais Montpellier et Biarritz ne sont évidemment pas les seuls clubs à souffrir des absences. La profondeur du banc de Toulouse, par exemple, permet au champion de France de pallier en grande partie la saignée des internationaux. Il faut aussi saluer la qualité des jeunes joueurs alignés par certains clubs, à l'image de Clermont, actuel leader du Top14 malgré 14 absents.
Les fameux "jokers coupe du monde", ces contractuels de courte durée, ne permettent que partiellement de compenser l'indisponibilité momentanée des internationaux, une indisponibilité pouvant aller jusqu'à 10 journées de championnat.
On veut bien croire que les absences n'expliquent pas tout. A Biarritz, l'entraîneur Patrice Lagisquet reconnaissait bien volontiers que lors de la dernière défaite de son équipe, celle-ci avait joué en contradiction avec ses consignes et ce qu'exigeait la physionomie de la rencontre. Néanmoins, il n'est pas totalement aberrant d'estimer que certaines carences sont précisément liées à l'absence de leaders de jeu, actuellement en Nouvelle-Zélande.
Les revendications sportives et financières des clubs apparaissent difficilement critiquables. Et il devient délicat de ne pas évoquer un championnat faussé dès lors qu'un tiers de son calendrier se déroulera sans un nombre significatif de ses principaux acteurs.
Décidemment, il n'y a pas qu'aux antipodes que le rugby Français marche sur la tête...