Marc-Antoine Jamet m'écrit :
« En général et en particulier, j'aime bien les papiers de Reynald Harlaud. Ils sont drôles, bien écrits, parfois d'une extraordinaire mauvaise foi ce qui ne les rend que plus épatants. En revanche, le commentaire que je vais apporter à celui-ci ne va pas me valoir que des amis. Prenons ce risque et tant pis pour les culs-bénits, les pisse-froids et autres Ignace de Loyola au petit pied.
L'amitié est un devoir. Elle oblige et elle exige. Elle se mesure davantage dans l'adversité des temps difficiles que dans l'euphorie des périodes d'abondance. Nicolas Bazire m'a souvent aidé. Alors une remarque et des faits.
La remarque est la suivante. Je ne sais ce qu'a fait (ou pas) Nicolas Bazire. Il en répondra (ou pas) devant son juge. J'ai d'ailleurs eu maille à partir avec le même magistrat lorsque, trésorier du PS, j'appliquais les directives du Premier Secrétaire, Henri Emmanuelli, pour mettre fin au système URBA. Je ne me souviens ni de la compétence ni de l'impartialité de ce monsieur. Elles ne m'ont vraiment pas frappé. Au contraire, guidé par la soif de notoriété, l'esprit de revanche et la méconnaissance absolue de ce dont il prétendait traiter, il prenait invariablement ses lubies et ses approximations pour des vérités traitant les uns et les autres avec mépris et méchanceté. En attendant, malgré les fuites du dossier dont il est coutumier, un principe, beau et républicain, s'applique à tous ceux qu'il met en examen même si ce sont des "ennemis" politiques: la présomption d'innocence.
Les faits les voilà.
1) Nicolas Bazire a passé deux concours de la fonction publique auxquels chacun peut s'inscrire pour peu qu'il satisfasse aux conditions exigées de ses citoyens par la République, l'un militaire et il s'agit de l'école navale ce qui n'est pas rien, l'autre civil et il s'agit de l'ENA qu'il est d'usage de dire que l'on n'apprécie pas. Nul n'a pris sa place alors que, déjà père de famille, il s'entraînait sur la "Jeanne" à 20000 km de chez lui. Nul ne s'est demandé comment dans une préfecture lointaine il faisait bouillir la marmite avec 6000 francs ce qui le mettait à l'abri du besoin, mais ne relevait pas de l'opulence. Il a 55 ans. Sa situation a changé voici quinze ans. Cela n'efface pas celle qu'il a connue auparavant.
2) Nicolas Bazire a été fonctionnaire. C'est mieux que de ne pas l'avoir été. A lui s'appliquait donc la totalité du statut général de la fonction publique. Pas une partie petite ou grande. Non la totalité. Après avoir fait largement plus que les dix ans de service public qui permettent ce choix, il a donc démissionné comme il en avait le droit. Faut-il le lui reprocher ? Des dizaines de milliers d'agents publics le font chaque année.
3) Nicolas Bazire travaille chez LVMH (comme moi, je le dis avant qu'on ne me le dise). Il vend des produits de luxe et c'est mal. Aurait-il fabriqué des armes qui tuent, des voitures qui polluent ou des OGM qui puent qu'on lui pardonnerait. Mais être dans une entreprise qui a son siège en France, paye ses impôts en France, vend à l'étranger des produits fabriqués en France, crée des emplois en France, assure une part des recettes du commerce extérieur de la France dans l'océan des déficits, voila un pêché supplémentaire dans la liste de ce qui lui est reproché. C'est ridicule.
Ne confondons pas tout. Je n'ai jamais aimé l'UMP, ses barons, ses marrons et ses larrons. J'ai toujours combattu la droite et ses idées qui ignorent la justice sociale et l'égalité des chances. J'ai toujours fait preuve d'une scrupuleuse honnêteté dans les affaires et en politique quitte à passer pour un parfait demeuré auprès de voisins élus, de promoteurs immobiliers, de financiers étrangers. Mais, pour les mêmes raisons, je n'accable pas un homme en fonction de préjugés ou de présupposés pour autre chose que ce qu'il a fait (ou pas) et dont il doit répondre désormais. »