Magazine Culture
Les ateliers d’écriture, j’en ai toujours détesté le principe, je n’ai jamais compris leur utilité. Comme je demandais à Abdelkader Djemaï, lors d’un festival du livre à Saint-Claude, à quoi pouvaient bien servir ces ateliers d’écriture qu’il animait avec constance en France et à l’étranger, il me répondit « Surtout pas à faire des écrivains ! », confortant ainsi ma conviction. Il me donna ensuite, car l’homme est subtil, des justifications (communiquer l’amour des mots, de la littérature, le goût de la lecture, développer les facultés créatrices, etc.) qui ne suffirent pas à me convaincre. Mon avis reste que cela ne peut servir qu’à assurer un revenu complémentaire à des écrivains nécessiteux (et par définition, presque tous le sont). A de très rares exceptions près, les auteurs ne peuvent vivre de leur écriture qu’à la condition de consacrer du temps, à côté de leur œuvre, à des activités para-littéraires (interventions en milieu scolaire, ateliers d’écriture, résidences d’auteurs, piges diverses pour des magazines, etc.) dont certaines sont largement aussi prenantes et assommantes que le second métier que nos aînés pratiquaient et que la plupart d’entre nous pratiquent encore. A toutes ces corvées subventionnées ou chichement rétribuées, que l’on obtient essentiellement par relations, en étant introduit et bien vu par certains donneurs d’ordre, je préfère infiniment le second métier (et d’ailleurs dans mon cas l’unique métier, mes droits d’auteurs ayant été dérisoires) que j’ai exercé dans le privé puis dans l’administration, lequel avait au moins l’avantage de me rendre libre de toute attache, indépendant, sans comptes à rendre. La liberté n’a pas de prix.
Pour en finir avec les ateliers d’écriture, je pense que l’écriture créatrice ne s’enseigne pas, car elle n’est pas réductible à des procédés. Leur danger est de donner à certains candidats à l’édition l’illusion qu’elle les transformera en écrivains. Si Raymond Carver fut un génie, les ateliers qu’il fréquenta n’y sont pour rien.