Le livre de Jeff VanderMeer pour une fois tient la promesse d'être un livre monde. Nous allons nous immerger dans le monde fabuleux d'Ambregris avec son festival du Calmar géant, ses champigniens. Pour cela l'auteur utilise la technique du patchwork: le roman est en fait un ensemble volontairement hétéroclite de nouvelle, de monographie savante sur la calmarologie, de guide touristique, de texte crypté, d'illustrations ... Pour bien appuyer l'aspect hétéroclite, la typographie change, c'est comme si on était en présence d'une sorte de dossier tombé par hasard entre nos mains. L'ensemble est baroque, jouant sur les ruptures de ton: tantôt sarcastique, tantôt angoissant (au détour de certaines pages, on se met à craindre de rencontrer un Calmar ou un champignien ...), léger, grave, ...
On trouve aussi bien dans La Cité des saints et des fous un conte qui rappelle Hoffmann que la monographie savante qui m'a bien fait rire, d'autant plus que, de formation, je suis habitué à ce type d'écrit. On y retrouve tous les excès propres à ce type d'écrit (je parle toujours, bien entendu de la monographie): le ton inutilement polémique (surtout quand on traite d'un sujet très pointu), la bibliographie monstrueuse, constituant à elle seule un livre en soi (et uniquement destiné au spécialiste qui ne la lit au fond que pour savoir s'il a raté un ouvrage important dernièrement sur son domaine de prédilection), le ton pompeux ...
Dernière chose: c'est au détour de sites consacrés à la SF que j'ai eu connaissance de La Cité des saints et des fous mais dans la librairie où je l'ai acheté (Le Furet du Nord à Lille pour ne pas la nommer), il était classé en littérature étrangère. Bon signe qu'un tel livre ait été perçu plus comme un livre de littérature générale que science-fictionnesque car c'est un bon livre de littérature. Dommage qu'à côté, on ne trouvait pas Whittemore dont je vous ai déjà dit tout le bien que j'en pensais.