Je ne vous aime pas non plus !
J’étais aujourd’hui à la manifestation pour une enquête publique sur la collusion dans l'industrie de la construction organisée par le Mouvement 24 septembre. J’y étais avant tout parce que je veux, comme la majorité des Québécois, que les choses changent mais aussi pour voir si les Québécois vont me faire mentir sur ce que j’avais dit quelques jours plutôt à un ami. Au Québec, on a l’indignation facile, on s’indigne dans les salons, autour des machines à café, autour d’une bière, etc. On s’indigne, avec raison, contre les politiciens : « ce sont des crosseurs, des menteurs, des mafieux, ils gaspillent nos impôts, il faut les crisser dehors… ». L’indignation reste toujours passive sans aboutir sur de véritables mouvements sociaux pouvant influencer le cours des choses. M. Charest est tellement consciente de cette réalité qu’il s’entête à ne pas répondre à la demande du peuple québécois de déclencher une enquête publique sur les magouilles avérées dans le monde de la construction. Vu la gravité de la situation actuelle et la courbe de l’indignation qui a atteint son paroxysme, je m’attendais à voir au moins 100 000 personnes au centre-ville. Mais nous étions peut-être environ 2 000 personnes. C’est un peu loin de mon rêve mais l’ambiance était belle et je considère que c’est un bon début.La manifestation de cet après-midi est quand même un signe quela situation est très grave. Avec tous les scandales qui défilent dans les médias depuis quelques années, le Québec présente l’image d’un pays politiquement sous-développé. Je me sens exactement comme dans des pays en développement dirigés par des bozos qui gaspillent l’argent des contribuables et traficotent les richesses de leurs pays pour leurs intérêts personnels. Les Québécois se posent des questions. Des problèmes dans l'attribution de places en garderies subventionnées? Quelle organisation en profite? Des dépassements de coûts dans des travaux publics? Qui s'en met plein les poches? Des contrats en informatique? Paye-t-on le juste prix? La liste s’allonge. Le rapport Duchesneau vient de jeter une grosse pavée dans la marre en établissant l'existence de liens d'influence entre le MTQ, l'industrie des travaux routiers et les financements occulte des partis politiques.Au Québec, les extras « extravagants », les dépassements de coût exorbitants sont devenus les normes dans la gestion des travaux publics. Je peux comprendre qu’il y ait dépassement de coûts dans des projets d’envergure qui s’étalent sur plusieurs années. Juste, l’augmentation des prix des matières premières sur le marché peut-être une source d’augmentation des coûts dans ces cas. Mais en général, ce sont des variables qui sont déjà prévues dans les évaluations de coûts de projet. L’ampleur démesurée des dépassements et des extras et le manque apparent des limites et des conditions restrictives par le gouvernement soulèvent des questions légitimes. C'est que comme si le gouvernement laissait l'entier contrôle des paramètres du jeu aux entreprises privées. Et, surtout, cette question latente : est-ce que les dépassements de coûts, les extras, les contrats de gré à gré ne servent-ils pas à garnir, par l'intermédiaire des canaux obscurs, les coffres des partis, notamment du Parti libéral?SVP,M. Charest, déclenchez cette enquête publique, la grande majorité de la population québécoise la veut et la réclame. S’il est vrai que la démocratie se définit par « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », soyez pour une fois un grand démocrate, respectez la volonté du peuple et déclenchez une commission d’enquête publique sur l’industrie de la construction. Il ne s’agit plus ici de savoir qui a raison entre vous et nous mais de sauver la classe politique entière des sables mouvants dans lesquelles elle s’enfonce depuis quelques années, de restaurer la confiance de la population envers ses dirigeants. Ne pas le faire donne l’impression que vous et votre parti avez des choses à cacher, et pire que vous n’avez aucun respect, aucune considération pour le peuple qui vous a élu. La démocratie ne se limite pas seulement à se faire entendre lors des élections et se la fermer et laisser nos dirigeants faire ce qu’ils veulent pendant tout leur mandat. Vous n’êtes pas le boss mais l’employé du peuple et vous devriez nous écouter. Le jusqu’au-boutisme n’est pas une option. Cette fois ci, c’est trop tard, M. Charest, trop tard pour pousser les saletés sous le tapis. Les poubelles débordent, c’est le moment de faire le nettoyage, le grand ménage.